Décidément bon ou excellent partout où il passe (horreur, science-fiction, drame psychologique, amour, histoire, aventures, péplum, fantastique…), Stanley Kubrick baptise sa contribution au genre guerre, par le surnom de ces cartouches de 7.62 blindées. Contrairement à l’indétrônable Platoon qui reste à mes yeux LE film sur le Viêt-Nam, cette terrible fresque est avant tout une dénonciation de la folie de la guerre en général et un pamphlet sociopolitique démystifiant les grandes valeurs d’une Amérique morale et donneuse de leçons, et qui n’y croit déjà plus depuis une dizaine d’année à la sortie de ce film en 1987, justement depuis les tristes lucidités enseignées par ce conflit sale et idiot.
Brutalité, pression, conditionnement, ininterruption, apprentissage de la perte de personnalité par la violence et les armes, habillent la première partie, en compagnie des jeunes recrues d’un camp d’entrainement de Marines, au risque pour les plus fragiles de péter dramatiquement un câble. La seconde partie s’installe dans la tranquillité relative, débilisante, surréaliste, d’une ville vietnamienne occupée, où une armée de braves types au départ s’imbibent chaque jour, sans tomber dans le piège de la caricature simpliste, de déconnection morale et sociale, de désabusement et de propagande. Le final nous achève lors de la boucherie imbécile d’une embuscade vietminh de notre groupe dans les ruines d’un faubourg en flammes, où chacun pourra appliquer, subir ou comprendre la barbarie, la haine et l’aliénation si savamment orchestrées, et réaliser des horreurs psycho-pathogéniques qui les marquera à vie.
Comment ne pas comprendre des années de retour au civil plus tard, le constat de la honte, du gâchis et la structuration névropathe, tant de l’histoire que des intimités des vétérans ?