Dans la même veine que des films comme « Birdbox », l’un des plus gros succès Netflix mais aussi l’une de ses plus grandes réussites, « Awake » part d’un concept dingue et très intrigant. Ici, pas d’invasion extraterrestre empêchant les humains de voir sous peine d’être tués, mais un phénomène étrange qui empêche la population entière de dormir. Ce qui va entraîner chaos et mort certaine. L’idée est clairement géniale et jamais vue dans l’histoire du cinéma récent. C’est le genre de concept fabuleux et implacable qui aurait pu accoucher d’un chef-d’œuvre de science-fiction dite réaliste, puisqu’inscrite dans le commun des mortels. Malheureusement, le traitement choisi par les scénaristes et, à moindre mesure, le réalisateur laisse à désirer. Pire, il nous laisse clairement dubitatif.
Cela démarre plutôt bien et intrigue, la mise en place des enjeux et du postulat de base est exemplaire mais plus le film avance, plus il enchaîne les choix hasardeux, les invraisemblances notables et une espèce de je-m’en-foutisme préjudiciable. Pourtant il y avait matière à un film magistral autant sur le fond que sur la forme. D’abord, les réactions des personnages ne sont pas plausibles. A peine douze heures après le début de cette « pandémie mondiale d’insomnie » comme on pourrait l’appeler, les gens deviennent tous dingues et prêts à des extrêmes (sacrifices, meurtres, …). A la limite les pillages on veut bien mais tout va bien trop vite pour que ce soit cohérent et vraisemblable. Et pas mal de situations de cette trempe vont s’enchaîner ainsi que des incohérences notables. Et il y a bien trop de personnages et de thématiques laissées en jachère comme l’aspect religieux et fanatique (qui fait penser à « The Mist », incontournable chef-d’œuvre de science-fiction méconnu) entraperçu dans la séquence de l’église. Et tous les personnages de cette partie sont d’ailleurs totalement oubliés par la suite sans que l’on sache ce qu’ils deviennent… Et ce n’est pas les seuls. Coupes au montage (le film fait à peine une heure et demie) ou scénario écrit à la va-vite ? Dans tous les cas c’est peu concluant et donne une impression d’inachevé. Enfin, l’explication de tout cela est juste suggérée ce qui est particulièrement frustrant… Ajoutons que « Awake » captive et fait monter la tension certes, mais de manière trop sporadique.
La morale du film est classique et met en avant l’importance du lien familial. C’est très américain sur ce point et fort prévisible. L’opposition entre la science et la religion est bien trop satellite pour convaincre mais elle a le mérite d’y exister. On apprécie en revanche l’atmosphère créée pour l’occasion, terne et étrange. Gina Rodriguez qu’on ne cesse de découvrir (« Miss Bala », « Kajillionnaire », …) est impeccable dans ce rôle et se positionne comme une actrice à suivre aussi bien dans le cinéma commercial que dans le cinéma d’auteur. Le final est, comme le début, ce qu’il y a de plus réussi bien que les protagonistes perdent la raison de manière bien trop synchronisée et évidente. On pardonne une direction artistique assez classique (le réalisateur est plus habité aux petits drames familiaux comme le très beau « Kodachrome ») mais le peu de budget se ressent et le résultat ne fait pas rougir. Et on se souviendra du dernier plan mémorable et beau : visuellement impressionnant et techniquement intéressant. Bref, c’est plutôt raté au vu de ce pitch alléchant mais il y a assez de bonnes petites choses pour que cela se laisse regarder et qu’on évite le navet.
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