C’est un peu bizarre parce que je suis le premier à reconnaître que si les John Wick sont mystérieusement passés du statut de production générique qui aurait fait le bonheur des solderies d’ici quelques années à celui de nouvelle référence du cinéma d’action, c’est pour d’excellentes raisons. Pourtant, ce quatrième épisode me semble inférieur au précédent, peut-être même inférieur au second, alors que sur tous les plans, il se livre à une surenchère forcenée de toutes les caractéristiques de la série : il est plus long, plus coûteux, plus impressionnant et il y a plus de gens tués dedans. Il me semble que depuis l’argument du premier film - un mec se venge de ceux qui ont fauché sa voiture et tué son petit chien - la franchise avait compris qu’elle se devait de conserver un peu d’auto-dérision et ‘John Wick 3’, avec, rien que pour donner un petit exemple, la mémorable course-duel “Cheval vs . Motos” y parvenait sans difficultés. Le quatrième opus, lui, qui reprend le scénario là où il l’avait laissé, c'est-à-dire au moment où John Wick doit se retourner contre la Haute Table s’il veut survivre, fait preuve au contraire d’un sérieux inébranlable. Si on enlève les petits bouts où il faut bien nourrir la machine narrative, on peut dire qu’il comporte une scène monumentale où ça défouraille sec dans le Continental d’Osaka et une scène encore plus monumentale où ça défouraille encore plus sec dans les rues de Paris. Évidemment, ces chorégraphies guerrières s’avèrent irréprochables mais sur une durée aussi excessive, il aurait impérativement fallu une excellente idée de mise en scène toutes les dix minutes : or, là, on en a deux ou trois sur deux heures trois quarts de combats furieux, pas suffisamment pour ne pas commencer à soupirer de lassitude vers la moitié du film. L’autre problème dans lequel s’est empêtré ce quatrième épisode, c’est qu’il néglige finalement l’univers pourtant intéressant dans John Wick, ce curieux monde presque réel où on n’aperçoit aucun représentant de l’état, aucun représentant de l’autorité et même pas de personne “normale”, et préfère s’intéresser aux atermoiements intérieurs de son (anti?)héros. Le problème, c’est que John Wick est davantage une idée, une ’incarnation d’un système ou d’un concept, qu’un être de chair et de sang, et qu’il est difficile d’éprouver de l’empathie pour un personnage aussi creux, tout prêt à recevoir ce qu’on a envie de projeter sur lui, que peut l’être Tintin. Si, visuellement et esthétiquement, le boulot reste impeccable et si ‘John Wick 4’ reste de toute façon meilleur que n’importe quel autre pur Actionner premier degré (ce qui n’est pas très difficile), le tour pris par la franchise, qui semble augurer d’un avenir à la ‘Fast & Furious’, me la fera dorénavant considérer avec un peu de regrets…mais j’imagine que si j’étais encore aussi amateur de films d’action que j’ai pu l’être quand j’étais plus jeune, je crierais sans doute au miracle au lieu de faire mon dédaigneux.