Damien Manivel débute sa carrière en tant que danseur avant de se tourner vers le cinéma. Après des études au Fresnoy, il réalise plusieurs courts-métrages remarqués dont La Dame au chien récompensé du Prix Jean Vigo. Depuis 2014, il a produit et réalisé quatre longs-métrages présentés dans des festivals majeurs (Cannes, Locarno, Venise, San Sebastian...). Avec Les Enfants d’Isadora, sélectionné en compétition internationale au festival de Locarno, Damien Manivel réalise son premier film sur la danse.
Ce film a toujours trotté dans la tête du réalisateur Damien Manivel, mais il ne se sentait pas prêt. "C’est un sujet qui m’est cher et ça m’a pris du temps pour trouver la bonne approche. J’ai commencé par faire des films où la danse est présente de façon souterraine, en observant les gestes de mes acteurs avec la même attention que s’ils dansaient. Et puis, il y a eu la rencontre d’Isadora Duncan qui a déclenché ce nouveau film. Nous avons commencé par faire des essais avec Agathe Bonitzer et une amie chorégraphe, Aurélie Berland. Un jour, au cours d’une improvisation, Agathe a fait un geste très lent, comme un adieu, bras tendu. Aurélie s’est tournée vers moi et m’a dit que ce geste lui rappelait le solo « La Mère » d’Isadora Duncan. Elle m’a alors appris la mort tragique de ses deux enfants d’où cette danse tire son origine et j’ai écouté la musique de Scriabine qui m’a touché. J’ai tout de suite compris que j’avais trouvé là le point d’ancrage, la source à partir de laquelle je pourrais construire un récit à la fois personnel et ample."
Selon Damien Manivel, il y a une démesure chez Isadora Duncan, quelque chose de plus grand que nature, une exigence artistique folle et en même temps une injonction constante à être toujours plus libre. "Comme le dit Marika dans le film : « Tu dois trouver ta propre danse ». Il faut travailler avec ce paradoxe apparent : traiter son art avec toute l’admiration qu’il suscite, mais avoir une vision personnelle. Assez vite, par exemple, il m’est apparu qu’il fallait éviter toute mimique – il ne s’agit pas ici de danser comme Duncan le faisait en 1921, en portant d’amples tuniques grecques – mais d’observer concrètement cette danse qui, comme en surimpression, se déploie dans des corps contemporains. D’autre part, ma finalité étant le cinéma, je ne filme jamais le solo comme une forme achevée mais comme une danse en travail, à l’état d’esquisse, comme un croquis de gestes qui apparaissent sur l’écran nous dévoilant l’intériorité de ces femmes et le rapport que chacune entretient au sentiment maternel. Après la perte de ses enfants, Isadora n’a eu de cesse d’essayer de fonder son école, c’était le grand rêve de sa vie. Avec ce film, j’essaye par l’imaginaire de poursuivre cette filiation."