Journaliste, actrice, coscénariste de Razzia, tourné par son mari Nabil Ayouch, Maryam Touzani a déjà réalisé deux courts-métrages et un documentaire. Son premier long, inspiré par un fort souvenir de son enfance, est une réussite complète, en dépit d'un début un peu languissant, le temps que le charme infuse. Adam est presque un huis-clos avec des échappées dans la médina de Casablanca que la cinéaste filme avec amour. C'est surtout un hommage aux femmes du Maghreb, à leur courage et à leur dignité dans une société toujours patriarcale dans laquelle, pour ne citer qu'un exemple, les veuves ne sont pas autorisées à assister à l'enterrement de leur défunt époux. "La mort n'appartient pas aux femmes", dit l'une des héroïnes d'Adam. "Pau de choses appartiennent aux femmes" lui répond l'autre personnage principal, celle qui, enceinte hors mariage, scandale majeur, est hébergée et travaille chez la première. Adam, contrairement à Papicha, si l'on veut une comparaison avec un autre film maghrébin récent, n'est pas un film de révolte ni de guerre. Contexte différent mais même condition féminine précaire que Maryam Touzani aborde avec subtilité et même douceur. Des particularités que l'on retrouve dans sa mise en scène, pleine de grâce, notamment lorsque les deux femmes confectionnent des gâteaux ensemble. Des scènes rustiques, dont la composition et la lumière font irrémédiablement penser aux tableaux de Vermeer. Les deux actrices principales sont remarquables : Lubna Azabal, qui nous est familière, et Nisrin Erradi, qui l'est beaucoup moins. Avec elles, impossible de passer sous silence la fillette solaire qui contribue à la communication entre ces deux femmes blessées. S'il n'y avait qu'un lien entre elles, ce serait l'instinct maternel, définitivement, et plus prosaïquement, peut-être, l'amour de la pâtisserie faite maison.