Lorsque les vieux os se font sentir, c’est qu’il est temps d’aller de l’avant, de rebondir sur une opportunité et de s’évader une bonne fois pour toutes et sans regrets. John Lee Hancock doit probablement y songer à présent. De retour dans ses écrits des années 90, son enquête, s’il est possible de le qualifier ainsi, souffre d’une sévère comparaison avec les succès de Fincher, « Seven » et « Zodiac » (pour ne pas dire « Memories Of Murder »). C’est inévitable et pourtant, quelques idées auraient pu remanier une finalité, qui nous est servie avec un temps de retard, que ce soit dans l’époque à laquelle on nous raconte les faits ou bien dans la timeline d’une intrigue qui ne cessera de creuser, sans résultat. Le réalisateur-scénariste n’a pourtant pas à bouder dans une carrière, où il finit par créer de l’attente. Mais tout ce qui était convenu de croiser dans le comté de Kern, à savoir le suspense et une tension mortifère, s’effacent peu à peu.
Un tueur en série et un couple de détectives à ses bottes, voilà un décor mille fois replanté et essoré, jusqu’à sa moelle la plus académique. L’intrigue ne cherche donc pas nécessairement à se libérer de l’emprise du « Déjà vu », sans manquer d’accentuer sa confusion dans sa démarche. Nous y trouvons ainsi un vétéran, essoufflé et notamment torturé par un crime non résolu, répondant au nom de Deke (Denzel Washington). Sa perspicacité et sa partition en solo régalent dans les seuls instants qui lui sont permis d’exister. Malheureusement, il n’est plus question de tenter le cavalier seul et c’est là que le duo pêche, autant en interaction qu’en fonctionnalité. Il serait donc judicieux de le distinguer de son jeune apprenti, avide de succès ou bien d’enterrer son stress, qui pollue à la fois sa vie privée et professionnelle. Baxter (Rami Malek) est un ambitieux qui évolue dans la sauvagerie d’un monde qu’il ne peut contenir. En courant après le crime et non en amont, il finit par cultiver une charge mentale, à en faire pâlir son interprète. Il s’agit donc d’une tâche délicate que de se placer au-delà de la superficialité des émotions de protagonistes aussi mystérieux qu’ennuyeux.
La soif de réponses se transforme ainsi en une introspection au sujet du deuil des victimes, qu’on ne saurait caractériser que par une silhouette fantomatique… Les effets de style s’empilent les uns après les autres, sans donner suite à un développement décent ou simplement existant. Et en limitant son casting quatre étoiles à ses têtes d’affiches, le spectateur perdra rapidement l’horizon, jusqu’à la soudaine apparition du suspect trop parfait, Albert Sparma (Jared Leto). Son allure, sa démarche, son élocution et sa perception d’une menace invisible en deviennent risibles, à la limite d’un nanar. C’est véritablement une variable que le film ne contrôle pas et ne soutient pas le propos qu’il cherche à couver, jusque dans les derniers instants, illustratifs à souhait. Le titre souligne pourtant ces choses et ces détails qui trahissent la volonté du vice. Le film s’y noie volontiers et sans le savoir, se déconnecte des enjeux qu’il avait initialement lancé.
En somme, « The Little Things » (Une Affaire de Détails) manque de renverser un concept revisité, sachant qu’il détient une clé de voûte dans la dernière demi-heure. Deke trouve en Baxter la même âme égarée et blessée qui l’a longtemps bercé, mais tout ceci est servi dans une autopsie d’une piètre qualité. Les personnages sont constamment broyés par un manque de modernité et de crédibilité, qui les protège le temps d’une exposition, désastreusement émiettée comme les indices que l’on nous lance et que l’on renvoie avec deux fois plus de déception.