J’ai repris le chemin des salles obscures ce lundi avec le film que je m’ apprêtais à voir le jour du confinement…La Bonne Epouse…On est en 1967-68, en Alsace, mais cela aurait pu se passer ailleurs tant existaient de ces écoles ménagères où les jeunes filles souvent de la campagne apprenaient à devenir des ménagères accomplies …En ce temps-là, qui n’est pas bien vieux, les filles portaient des jupes plissées, gardaient les yeux baissés, apprenaient à coudre, à broder leur trousseau….à « être avant tout la compagne de son mari, ce qui suppose oubli de soi, compréhension et bonne humeur » comme le précise l’un des sept piliers de cette école privée tenue par Paulette Van den Beck (Juliette Binoche) , son mari (François Berléand) , sa belle-sœur Gilberte ( Yolande Moreau) , célibataire endurcie, et sœur Marie-Thérèse ( Noémie Lvovsky) , religieuse au caractère bien trempé, ancienne résistante….Quant au devoir conjugal, un des piliers précise que cette « épreuve aussi pénible et ingrate soit-elle » s’accepte en y mettant « un peu de soi-même » … Il faut dire aussi que cela ne faisait que peu d’années que les françaises avaient obtenu le droit d’exercer une activité professionnelle, ouvrir un compte bancaire, sans l’autorisation du mari ou du père…et que le port du pantalon par les femmes était proscrit dans la plupart des entreprises…. La confrontation de trio de femmes haut en couleur avec les jeunes filles dont elles ont la charge, toutes caractéristiques de l’époque (Albane, issue d’un milieu favorisé, ne manque jamais d’afficher sa supposée supériorité ; Corinne sacrifiée au bénéfice d’un frère à qui son statut de mâle confère le droit de poursuivre des études supérieures ; Annie, la rebelle qui peu à peu dévergonde Yvette, à qui son père a enseigné la soumission depuis son plus jeune âge) est prétexte à des scènes pleines d’humour et de vivacité.
Malheureusement, la fin se perd dans un activisme un peu trop poussé. La cocasserie du début s’évapore et le film dégringole à mesure qu’il égrène des scènes qui ne sont envisagées que comme des bouées de sauvetage scénaristiques – et donc purement anecdotiques. Noémie Lvovsky et Yolande Moreau, actrices confirmées et sympathiques semblent un peu trop utilisées en pompiers de service pour sauver leurs personnages du néant…Yolande Moreau abuse trop de ses regards égarés, et de ses déhanchements maladroits…Noémie Lvovsky campe une religieuse un peu trop caricaturale…Martin Provost qui avait dans ses mains un sujet en or le gâche en appuyant trop sur les effets et en faisant s’éterniser des scènes anecdotiques comme celle où quatre élèves dansent sur une chanson de Joe Dassin… Film féministe cette Bonne Epouse ? Opportuniste sans aucun doute, cette histoire d’émancipation féminine qui arrive en pleine ère MeToo mais on se surprend toutefois à sourire de l’innocence d’une époque qui a cru que l’abolition du conservatisme suffirait à accorder aux femmes libération et épanouissement…