.Il était temps ... Temps de voir ce film culte de la fin des années 70 et en version Redux qui plus est.
3H30 d'une durée à double tranchant, forcément.
Dans la même veine que "Full Metal Jacket" l'oeuvre de Coppola met la patte sur les dérives psychologiques que peuvent avoir l'impact d'une guerre et l'horreur qui en résulte. Ce n'est pas un film de guerre à proprement parlé, il ne s'attarde pas sur un conflit historique ni ne retrace la vie d'un héros de guerre, non. Si la toile de fond est bien réelle puisqu'il s'agit de la très controversée guerre du Viêt-Nam le reste n'est que pure fiction, on est donc loin de la retranscription d'une bataille d'antan.
D'ailleurs, le rideau s'ouvre et se ferme sur une sorte de trip hallucinogène de Martin Sheen qui se déphase de la réalité, lui et tout son équipage qu'il ne maîtrise plus, au fur et à mesure de l'avancement de sa mission à bord d'un patrouilleur de la marine.
La force de ce film est d'avoir su créer cette ambiance psychédélique de la première à l'ultime seconde, car même quand le film se veut moins sérieux, voire totalement loufoque, notamment durant tout le passage avec le lieutenant Colonel, sa nature intrinsèque n'est jamais loin. Pour preuve, les discussions et les agissements totalement lunaires du Lieutenant Colonel qu souhaite profiter de la marée pour exhorter ses hommes à aller surfer la vague sous fond d'un décor apocalyptique.
D'ailleurs, Robert Duval qui incarne ce militaire de haut rang le fait d'une part avec maestria, et ceux d'entre nous qui avaient vu le film de Kubrick vont forcément faire le rapprochement avec l'interprétation grandiose de R.Lee Ermery qui habitait un sergent instructeur aussi dément et charismatique que ce dernier, la sympathie en moins.
Mais la très grande force de ce River-Movie c'est ce que j'ai pris en pleine face durant plus de 200 minutes. Des volutes de fumées bariolées des nuages de poussières, de terres, de cendres ... Des explosions crépusculaires démentes, avec un jeu de lumière que j'ai rarement vu en ce jour. Ca m'a rappellé un peu le Batman de Tim Burton dans l'utilisation des effets pyrotechniques, de fumées et de lumières avec son atmosphère de Gotham si particulier qu'on ne retrouve malheureusement plus dans les films de notre époque. C'est bien dommage. Ni plus ni moins que GRANDIOSE.
La musque presque en continue s'incorpore au film et le plonge encore plus dans cette ambiance stone et mortifère avec par séquences des instrus aux sonorités propre à la science-fiction. Elle n'est donc pas qu'un simple apparat mais une partie intégrante du chef d'oeuvre de Coppola.
J'ai cru dire que la version longue permettait de mettre à la lumière du jour le visage de Brando qui demeurait jusque la dans la pénombre renforçant son côté cryptique et désincarné. Je ne peux de ce fait être déçu n'ayant vu que cette version, nul doute cependant que si j'avais la version initiale cela aurait été une déception de le voir de son blanc visage.
Les Bémols de ce film :
- Le jeu d'acteur du héros, très fade. Il ne dégage rien avec son visage inexpressif et son corps d’arbalète. Il était loin d'être le premier choix, mais quand je sais que le formidable Harvey Keitel a été évincé du projet après trois semaines car le cinéaste le trouvais mauvais, ça me laisses pantois.
- Les Longueurs ... Je ne regrette absolument pas de l'avoir vu dans sa version la plus longue, j'en ai même de la gratitude, étant donné le film dont il est question. Mais, je pense qu'il aurait été encore plus agréable sans tout ce supplétif dispensable.
Pour les non-initiés, plongez-y les deux mains en avant, ce film est une pépite visuelle et sonore.