Ecrit d’après le livre de John le Carré (qui a participé à la confection du scénario), le tailleur de Panama décrit une manipulation construite sur la mythomanie d’un informateur. Les romans de John le Carré sont touffus, denses, riches en personnages et rebondissements, mais les séquences y sont trop développées, et l’on a souvent du mal à comprendre les arcanes de l’intrigue. Construire un film à partir de l’un d’eux est donc une gageure. La difficulté s’accroît ici du fait de l’importance des dialogues intérieurs du tailleur : les prendre en compte conduirait à centrer le spectacle sur l’étude du personnage et donc à transformer ce film d’espionnage en drame psychologique, les ignorer conduirait à rendre l’intrigue inintelligible. Boorman choisit une voie médiane, avec un peu de voix off et l’apparition périodique du défunt oncle Benny, et ce sans convaincre. La nécessaire simplification du sujet fait perdre beaucoup de densité au film, mais ne le rend pas plus limpide. Cette perte de densité est renforcée du fait que Boorman insiste sur le cynisme des personnages, au point de leur ôter de la crédibilité, en tirant le film vers la farce. Pierce Brosman, alors interprète de James Bond, en rejouant son personnage favori en en accentuant le côté dépravé est pour beaucoup dans cet infléchissement. Les prises de vues sont belles, et le final assez émouvant.
En bref un spectacle assez bien ficelé, mais assez insignifiant.