Avant de se lancer dans le cinéma, Julie Manoukian a fait des études de lettres. L'idée des Vétos lui a été soufflée par le producteur Yves Marmion. "Nous avions travaillé ensemble sur un projet qui n’avait pas abouti mais qui avait créé des liens entre nous. Trois ans environ après cette collaboration infructueuse, Yves m’a rappelée pour me dire qu’il cherchait quelqu’un pour raconter une histoire sur les vétérinaires de campagne. « C’est un métier, m’avait-t-il dit, qui touche beaucoup de gens de plus en plus sensibles au bien-être animal. Je suis sûr qu’on peut raconter une belle histoire ». Et il avait ajouté que si j’arrivais à l’écrire, il m’en confierait la réalisation. J’en étais restée presque sans voix : « réaliser » est le rêve de ma vie, depuis l’enfance !"
"Mon point d’entrée dans ce monde que je ne connaissais pas, c’était les soignants", confie Julie Manoukian. "Je suivais depuis des années des médecins auteurs comme Martin Winckler, Baptiste Beaulieu, ou Jaddo, dont j’admirais la passion, l’humanité et l’humour. Quand j’ai commencé mes recherches sur les vétérinaires en zone rurale, j’ai découvert leurs conditions de travail, la pression croissante, et j’ai retrouvé le même humour, la même passion, et le même héroïsme discret à faire ce métier dévorant. Ce sont des gens qui ont mis leur vie au service des autres. Ils travaillent dans des conditions difficiles, avec des horaires de dingue, pour des salaires sans rapport avec le boulot qu’il leur a fallu fournir pour avoir leur diplôme, l’un des plus difficiles à obtenir."
La scène du vêlage a beaucoup préoccupé l'équipe du film. Julie Manoukian y tenait beaucoup parce que c’était une des scènes pivot du film, celle qui fait tout basculer pour Alex, jouée par Noémie Schmidt. "On avait prévu de devoir la truquer et fait fabriquer de fausses pattes de veau au cas où. Mais j’espérais de tout mon coeur qu’on arrive à la tourner en vrai. La date est arrivée, c’était un vendredi. Noémie ne pouvait pas être là le dimanche. On n’était pas très rassurés. Et puis, Maxime, notre consultant, est venu nous prévenir que nous devions nous tenir prêts, que l’événement était imminent. On est entrés en équipe réduite, dans un silence quasi religieux, pour ne pas effrayer la vache. Noémie s’était préparée, et elle a vécu le vêlage du début à la fin, en faisant certains gestes elle-même. Le plan que je voulais à tout prix, c’était le premier regard du nouveau-né sur celle qui l’a mise au monde, et on a pu le filmer. L’émotion nous a submergés. On s’est tous mis à pleurer en silence dans nos mouchoirs. Noémie a été formidable de sang-froid. Elle n’est même pas tombée dans les pommes !"
Un véto de campagne doit savoir soigner pratiquement tous les animaux, domestiqués ou pas, de compagnie ou sauvages, sans compter ceux qui appartiennent à des espèces exotiques. Il doit être disponible jour et nuit, aussi bien pour les mises bas que les autres urgences. En plus d’aider à donner la vie, ils sont en outre les seuls à supporter cette responsabilité exorbitante du droit d’euthanasie sur leurs « patients ». "Je suis tombée en admiration pour leur métier, qu’ils exercent toujours avec passion et abnégation, malgré un statut qui se délite et des clients qui leur en demandent plus qu’avant", déclare Julie Manoukian.
Pour le film, Julie Manoukian (fille d'André Manoukian) voulait de la musique folk. "J’avais en tête Jimmy de Moriarty. Et j’ai eu la chance de pourvoir l’utiliser avec deux autres morceaux de ce groupe qui me touche beaucoup. Ouvrir et fermer le film avec la voix de Rosemary Stanley, c’est un de mes grands bonheurs. Après, j’ai demandé à Matéi Bratescotde composer une partition dans le même esprit. Les Vétos n’était pas le bon film pour que je travaille avec mon père. En revanche, j’espère bien le mettre à contribution pour le suivant."