Pour son premier film, Sidney Poitier obtient l'un des rôles les plus importants, apparaissant autant si ce n'est plus que Richard Widmarck. Alors comment se fait-il que son nom figure après le titre, comme celui d'un vulgaire second rôle ? C'est vrai que c'est un débutant, mais dans ce cas, la convention n'est-elle pas de le mettre en valeur après tous les autres : "and introducing..." ? Avouez que c'est comique, pour un film aussi violemment anti-racisme !
D'autant plus que Poitier est magnifique, il en impose aux acteurs chevronnés qui lui font face.
Le jeu halluciné de Richard Widmarck est bien convaincant, mais on regrette qu'il en fasse un peu trop quelque fois dans son rôle de "chien enragé".
Joseph L. Mankiewicz, qui excelle surtout dans l'adaptation de pièces de théâtre, signe avec No Way Out un thriller remarquable, d'une tension et d'un suspense peu commun. Un simple hold-up et l'arrestation des malfaiteurs entraîne de terribles conflits inter-raciaux : l'un des deux braqueurs meurt alors qu'il est dans les mains d'un docteur noir (Sidney Poitier), que son frère haineux et raciste Richard Widmarck) accuse alors de meurtre. Un engrenage de mort s'enclenche, entraînant un combat de rues d'une violence terrifiante. Les blancs se mettent à chercher des arbres dans un dépôt de ferraille, sans se douter qu'ils sont en train de se faire encercler par les noirs, armés eux aussi. Pour déclencher le combat, un guetteur doit lancer une fusée de détresse. Cette fusée arrête littéralement le temps : tout le monde, personnages et spectateurs, sentent leur codeur s'arrêter tandis qu'une pâle lumière de mort descend sur le champ de bataille. Cette image, plus encore que le règlement de comptes final entre Poitier et Widmarck, consacre La Porte s'ouvre comme l'un des thrillers les plus saisissants.