On connaissait les requins terreurs des bords de mer, les anacondas dans la jungle, les serpents dans l'avion, les piranhas ivres de sang frais, voici à présent les alligators dont le nom seul rime avec "predators" - c'est dire... Qu'attendre d'un film-catastrophe misant sur le pouvoir terrifiant de grosses bêtes, de reptiles qui plus est (ceux qui "crawl(ent)" en anglais et qui rampent en français), sinon des émotions fortes, des sursauts, de ceux qu'on nomme dans le langage technique des "jump scares" et qui constituent les effets recherchés dans ce type de productions ? Il faut bien reconnaître que nous sommes assez bien servis au début. Un ouragan se déchaîne sur la Floride et une jeune femme intrépide décide de braver les interdits de la police afin de venir en aide à son père isolé dans la demeure familiale, non loin, précisons-le, d'une ferme d'alligators. D'emblée, le ton est donné : jamais un film ne nous aura autant trempé les méninges et n'aura déversé autant de litres d'eau à la face d'une caméra qui plonge littéralement le spectateur dans ce qu'il convient d'appeler des eaux troubles. Bien sûr, on ne peut attendre que l'apparition des monstres qui se fait d'abord en sous-sol, puis, au fur et à mesure que les eaux montent, en surface et en extérieur. Seulement voilà : le film ne dure qu'une petite heure et demie, mais au bout d'une demi-heure déjà le procédé commence à lasser. Car - gros défaut du film - le scénario est indigent au possible. Certes le parti pris du huis clos empêchait toute intervention - ou presque - d'éléments extérieurs, mais on comprend qu'une telle production est destinée à un public peu exigeant qui, sitôt sorti de la salle, s'empressera d'oublier les subtilités (rarissimes) de l'intrigue. Et puis, d'ailleurs pourquoi s'en offenser ? Tout cela relève de la série B avec tous les ingrédients que le genre comporte. Bien sûr, on peut jouer les freudiens et lire un drame œdipien entre un père et sa fille, d'autant que ledit père occupe le statut d'entraîneur de sa fille dans le domaine de la natation où elle excelle (le crawl, bien sûr) et qu'il ne cesse de l'inciter à davantage d'audace et de volonté - même lorsqu'il a été sérieusement mordu et abîmé par un alligator et que de mort vivant il passe tout d'un coup à celui de conseiller, dissertant amplement et avec une aisance confondante sur l'attitude volontariste à conserver en toute circonstance, y compris dans les eaux les plus troubles, en l'occurrence celles de la psyché. Bref, malgré toutes les réserves que l'on peut formuler, on a passé un bon moment et c'est bien ce que l'on désirait. Alors ne jouons pas les délicats : une fois en passant, un film de série B, cela fait tellement de bien, même quand on frôle le nanar...