Ça fait déjà un moment que j'ai ce film dans ma besace, l'air de rien, et si j'avais bien évidemment envie de le voir, je ne me pressais pas vraiment (comme toujours quoi). Mais Samedi dernier, je me suis dis "allez, hop on se le met et on verra bien". Avant toute chose, il faut préciser que si j'adore le cinéma de Pialat, ce film me paraissais tout de même particulier. Pas seulement pour sa réputation et son parcours cocasse à Cannes en 87, mais pour son sujet. En effet, là où A nos amours ou Nous ne vieillirons pas ensemble s'intéressent au quotidien le plus banal, à sa cruauté mais aussi à sa beauté propre, ce qui en fait des films absolument magnifiques, là c'est tout autre chose. C'est un film sur la religion, un sujet qui me plaît mais qui semble s'éloigner totalement des autres Pialat que j'ai vu. Du coup je m'interroge : qu'est-ce qui a intéressé Pialat dans cette histoire? Ce côté presque métaphysique, la psychologie de ce personnage cherchant la vérité ultime sur la religion et le monde? Ouais, un peu, mais on s'en fout Pialat reste Pialat! Concrètement le film s'attarde sur le personnage du curé, qui perd pied dans ce monde qu'il pense corrompu par Satan. Du coup, comprenez son geste lorsqu'il rencontre Mouchette! (je ne dis rien) Honnêtement j'ai trouvé cette histoire intéressante, déjà parce que le film ne cède jamais au pathos, non il reste plutôt austère et simple. Ensuite parce que ce genre de personnages a une psychologie follement intéressante, c'est ni plus ni moins que le classique du personnage qui tombe va tellement loin dans sa croyance qu'il finit par devenir le contraire de ce qu'il était. Seulement je dirais que c'est presque ce qui m'a le moins passionné dans le film, au contraire de scènes absolument démentes. Oui l'histoire est très sympa (pas si compliquée d'ailleurs), mais ce qui reste monumental ce sont ces scènes de discussions entre les personnages qui durent et durent. Celle qui m'a le plus marquée est celle où Mouchette ("jouée" par une Sandrine Bonnaire assez hallucinante, je l'ai retrouvé avec un grand plaisir après A nos amours) vient parler à un type
après avoir tué son amant
(je ne me souviens plus du nom du type). Cette scène dure et dure, on a pas de coupe, comme chez Kechiche on laisse la conversation intégrale, elle dure aussi longtemps qu'une vraie dans la vie, et là on peut voir le génie de Pialat, son sens de la mise en scène on ne peut plus simple qui va coller parfaitement à la situation sans en faire trop. Les acteurs ne semblent pas jouer, ils sont justes tout le temps, et là intervient le vrai si cher à Pialat. D'ailleurs la scène se termine enfin d'une manière plutôt intéressante, je ne dirais pas comment mais disons que c'était peut-être la meilleure façon de le faire. Aussi il faut parler de la beauté plastique du film. Alors oui c'est le degré d'appréciation le plus "basique", mais il n'empêche que la photo est super belle. Et Pialat a eu aussi l'intelligence de s'intéresser à ces personnages, de donner une ambiance austère que j'aime bien, il ne va pas en faire trop dans la reconstitution de l'époque, ça n'aurait aucun intérêt. A plusieurs moments j'ai eu l'impression de voir des époques différentes, surtout dans le bureau du type où se ramène Mouchette, j'avais l'impression que c'était plus "moderne". Mais encore une fois on s'en fout, c'est clairement le truc auquel Pialalt s'intéresse le moins. Et une certaine beauté ressort du coup par simple esthétique, par l'absence de musique ou par la longueur des scènes. Par exemple, vers la fin, quand le curé prend dans ses bras un garçon et le fait revivre miraculeusement, une sorte d'exorcisation (un peu comme dans Hors Satan que j'adore aussi) ba je trouve ça beau. Enfin je voudrais dire que ceux qui comme moi aiment Pialat et qui seraient rebutés par ce film, son sujet ne s'inquiètent pas on retrouve ici tout ce qu'on aime chez lui, et si je dois avouer préférer ses autres films pour le moment, ça n'en reste pas moins un grand film qu'il faut voir.