J’ai donc été voir L’Amour Debout de Michael Dacheux. J’y allais pour soutenir ce qu’on me vendait comme un premier film héritant de la grâce d’un Rohmer et d’un Truffaut. Ça flairait le frais émoulu FEMIS mais il faut soutenir le jeune cinéma Français. L’autre argument étant que cela semblait l’anti-thèse de Épouse moi mon pote, j’entrais donc en salle, résolu à me montrer bienveillant face aux possibles imperfections auxquelles on pouvait s’attendre. Après tout quel bonheur ce serait de découvrir un jeune prodige en devenir. Ce ne fut hélas pas le cas, d’autant que renseignements pris, Michaël Dacheux semble avoir au moins deux fois l’âge de Xavier Dolan lorsqu’il tourna J’ai Tué Ma Mère. Et il à déjà conçu un moyen-métrage dont les deux personnages, deux garçons, se nommaient Clarinette et Piano. Le film se fragmente en quatre parties, suivant quatre saisons, et donc se déroule sur une année. Déjà sur 12 mois, aucun des personnages n’aura une réelle évolution si ce n’est que ceux qui commencent à baiser entre eux au cours du film s’installeront gentiment dans leur couple. La fille qui est guide touristique au début on ne sait pas trop si elle a changé de métier à la fin par contre elle rentre dans une chorale de musique contemporaine qui se produit avec des fleurs sur la tête et chante des ritournelles saugrenues. Dès le début du film elle a rompu avec le personnage principal qui fait irrésistiblement penser à Gaston Lagaffe avec son allure de feignasse procrastinante. Elle le décrit comme un dingue de Jean Eustache qui cite des passages entiers de ses dialogues mais on est bien obligé de la croire sur parole parce que... Bref elle ne l’aime plus. On lui donne bien raison, mais à la place elle s’éprend d’un quinca qui vit sur un bateau (« il est marié? » demande-elle, on lui répond: « Non: il est musicien. » ce qui est pour le moins une réponse inattendue) Et au cours du film elle le rappelle, genre, elle le rallume, la gourgandine. Une inconstance qui n’est pas exploitée durant le film. Au demeurant elle s’habille très mal et ne sait pas se maquiller mais très vite on s’aperçoit que c’est le cas de tous les personnages, genre c’est même pas chez kiloshop que l’habilleuse est passée mais chez kilomoche. Ou alors ils ont une contrainte, en allusion à la vogue du pull moche pour Noël. Par contre c’est bien dans une friperie qu’ils ont dû acheter leurs cadrages parce que pas un seul plan n’est totalement parfait, il y a toujours un truc qui cloche, un figurant parasite, une bagnole, un montage à la louche ( sauf les quelques secondes du baiser sous la douche mais dont les dernières secondes portent à sourire) . Pareil pour les dialogues, on sent que certaines répliques se voulaient écrites ( même si on suspecte une improvisation dans certains passages, tant les voix sonnent faux et l’intonation de guingois, servis par de nombreux surjeux, notamment par monsieur Sourcil épilés très vite exaspérant) mais ces répliques finissent comiques. Comme lorsque la même fille pleure d’un oeil obstinément sec, tout en s’apercevant que sa collocatrice depuis des mois est en fait hôtesse de l’air (cherchez pas) Quant à Gaston Lagaffe, il squatte chez un beau garçon vierge, qui se souvenait de lui avec émotion depuis le lycée, mais ne le touche jamais, même s’il lui avoue avoir fait « des trucs sexuels avec des garçons » et que son hôte l’invite dans son lit dès le jour où ils se rencontrent. Par contre Lagaffe se tapera un jeune homme aux sourcils bizarrement épilés, voisin de palier d’une vieille dame ingrate ( elle les vire de chez elle comme des malpropres alors qu’ils ont montré un canapé jusqu’à chez elle) Je passerai sur les soirées repas entre amis où des tas de gens dansent le jerk sur du Colette Magny, si si. Et pour finir, à défaut de réussir son hommage à Rohmer ou Eustache, le film contient, comme un niveau caché de jeu vidéo, un subplot nous menant à évoquer un autre cinéaste français. Je vais m’y attarder car je crois qu’il symbolise la lourdeur du film. En effet, le garçon vierge déclare le premier soir qu’il peut avoir des crises de somnambulisme. En seconde occurrence du thème, on l’aperçoit endormi en caleçon monter puis descendre une échelle, okay. Selon la grammaire du scénario on se dit que la troisième fois découlera sur quelque chose, on espère un ressort dramatique, un événement qui chamboulera le film et électrochoquera toute cette tribu de personnages en quelque sorte somnambules dans la vacuité de leur vie. On se dit après tout c’est peut-être ça la clef, le sens du film. Et soudain, au détour d’une soirée de jerk sur du Colette Magny, ( oh j’oubliais : on a aussi droit à une scène de madison, nouvelle vague oblige, allusion à Bande à Part « bravo Monsieur [Dacheux], ça c’est du meuble! ») le garçon vierge probablement épuisé par Colette Magny s’en va se coucher puis Lagaffe l’aperçoit s’en allant fantômatiquement vers la forêt dans la nuit. Lagaffe alerte ses amis, il est somnambule, et tous le suivent dans la forêt. Quelques plans plus tard le garçon vierge s’assoit sur une souche, car, non non non il n’était pas somnambule, il se promenait avec un casque écouteur. C’est LE gag du film. Les autres sont tout surpris. Et alors il y a une réplique sublime, prononcée sur un ton agacé : « Ah ben si on ne peut plus se promener tranquille! » À ce moment on saisit l’hommage involontaire fait ànul autre que Max Pécas, maître spécialiste des gags qui tombent à plat.
Tout comme tombe à plat l’ultime séquence du film, la fille sort de la piscine et regarde un truc hors champ, CUT, voilà c’est fini. Combien de film ont fait ça, une fausse conclusion, une fausse fin ouverte.