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    Memoria
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    3,2
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    56 critiques spectateurs

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    LAUNOU75
    LAUNOU75

    6 critiques Suivre son activité

    1,0
    Publiée le 1 février 2022
    "Le voyage, hypnotique, exige le lâcher-prise et laisse le spectateur dans un état second. Ensorcelé ou mort d’ennui". Cet extrait d'une critique presse me semble très juste. J'ai personnellement été hypnotisé au point de sombrer dans un état soporifique. Des plans fixes interminables et injustifiés, des scènes qui n'apportent aucun intérêt au film, une Tilda SWINTON inexpressive du début à la fin et un rôle que n'importe quelle actrice aurait pu jouer à la place de Jeanne BALIBAR. Je ne sors jamais avant la fin d'un film car l'épilogue peut être révélateur (un petit coucou à tous ces spectateurs qui laissent des notes mauvaises à des films en avouant être sortis de la salle au bout d'une heure...). Malgré ma patience, je n’ai pas compris l'engouement des critiques. Serais-je passé à côté d'un chef d’œuvre ?
    Selaven Hoel
    Selaven Hoel

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    0,5
    Publiée le 26 janvier 2022
    GLR la vie! Je n'ai à ce jour jamais trouvé meilleure solution pour perdre, gaspiller deux longues heure de ma vie.
    Réjane Rs
    Réjane Rs

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    0,5
    Publiée le 14 janvier 2022
    Le premier son vous défonce les tympans pour 10 à 15 minutes ensuite le film s’englue. Quitter la salle ou rester ? Le générique de fin -qui clôture une scène finale digne d’une série B insipide- ouvre la porte de la délivrance.
     Kurosawa
    Kurosawa

    578 abonnés 1 509 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 23 décembre 2021
    Avant d'écrire, on aimerait parfois prendre du recul sur les films, afin de pouvoir objectiver l'émotion ressentie durant la projection. Si certaines œuvres ne nécessitent pas forcément ce temps (en raison notamment de leur relative pauvreté), d'autres demandent au spectateur de laisser infuser leurs images : c'est le cas des longs-métrages d'Apichatpong Weerasethakul, lentes méditations qui envoûtent et font réfléchir autant pendant qu'après leur visionnage. "Memoria" ne déroge pas à la règle, et met le spectateur dans un état physique et mental naviguant entre langueur et concentration extrême. On peut en effet être passif devant le film, fermer les yeux quelques secondes pour se mettre à l'écoute des mots et des bruits, mais si l'on veut poursuivre le long-métrage, tisser des liens et méditer soi-même, il faut aussi savoir rester bien éveillé quand le surnaturel surgit et rabat les cartes. Toutefois, à ne considérer que l'aspect sensoriel du cinéma de Joe, la qualité du raisonnement critique en devient fortement impactée : il ne suffit pas de se laisser aller d'un bout à l'autre du film – certains spectateurs, à raison, pourraient ne rien ressentir et rester totalement extérieurs à celui-ci –, mais il s’agit de voir comment la rigueur de la mise en scène et du montage fait advenir un état méditatif. En cela, les deux premiers plans de "Memoria" sont exemplaires : on y entend d'abord un bruit – lequel retentira une petite dizaine de fois pendant les deux heures et quart suivantes –, puis une silhouette qui se réveille. C'est Jessica (Tilda Swinton) qui se lève et marche vers la droite du cadre, quand la caméra, elle, fuit dans un léger panoramique à gauche pour nous montrer un miroir dans lequel se reflète le personnage : ce que nous dit ce plan, c'est que Jessica est semblable à un spectre, un être étranger au monde, et par ailleurs un être double (sans que l'on puisse définir clairement cette duplicité). Lors du plan suivant, Jessica entre dans une pièce à la forme arrondie avec au fond une fenêtre (signe peut-être d'une ouverture vers le monde ?), mais celle-ci comporte des barreaux (Jessica, prisonnière de ce monde, saura-t-elle se laisser guider par un ailleurs dont elle ignore tout ?). C'est donc bien par la précision géométrique du plan qu'une force d'évocation est possible, un schéma qui ne cessera de se reproduire par la suite : les dialogues, les gestes, les moments où le bang retentit sont autant d'indices qui peuvent être liés entre eux et qui forment une source d'interprétation symbolique. "Memoria" a donc besoin d'un spectateur attentif pour exister ; en effet, il faut pouvoir ressentir la tension qui habite Jessica dans ces scènes où l'horreur apparait de manière très épurée (des alarmes de voitures qui se déclenchent seules, les lumières d'un musée s'éteignant brusquement, un chien qui suit Jessica dans la rue, etc), observer précisément le trajet créé par l'obsession et la curiosité du personnage (rencontre avec un mixeur de son, une archéologue, une médecin, un paysan, passage de la ville vers la campagne), pour pouvoir lors des quarante-cinq dernières minutes reconsidérer ce que l'on a vu précédemment et se rapprocher de Jessica. Si la partie urbaine demeure très clinique, peu sensuelle, surtout au regard de l'œuvre de Weerasethakul, et que l'on accompagne le personnage tout en étant maintenu à distance, la partie finale donne enfin accès à une émotion permettant non pas une identification, mais une connexion. Se situant dans un lieu qui paraît être le point central de la détonation du bang, Jessica, sorte d’antenne – comme le lui dit le second Hernan – semble se situer à un croisement entre différentes strates de mémoires, voire de plusieurs mondes et civilisations. Le spectateur ressent alors le changement chez Jessica, le moment où elle bascule de l’incompréhension à une sensation nouvelle qui la bouleverse. C’est lors de cette scène stupéfiante où, assise à la table d’Hernan, une pluralité de sons – souvenirs, mémoires de notre monde ou d’un autre – surgissent et révèlent une douleur insoutenable. On ne sait pas précisément ce qui se passe dans la tête de Jessica, mais on comprend que ce qui se produit la déchire – comme si elle devait ressentir lors de quelques secondes tous les maux de l’univers. Il fallait donc partir d’un son et de sa reconstitution (incroyable scène de mixage, où le son est saisit dans sa forme d’abord immatérielle, avant d’être rendu concret) pour interroger non seulement Jessica, mais les êtres humains et le cosmos dans sa dimension infinie ; partir d’un simple son, pour finalement ouvrir des brèches métaphysiques vertigineuses, comme en témoigne les derniers plans du film, qui éclatent tous nos repères spatio-temporels. La délocalisation en Colombie n’a donc rien changé pour Apichatpong Weerasethakul, l’art si précieux du cinéaste-magicien reste intact, et sa puissance n’a jamais été aussi éclatante.
    Nicolas S
    Nicolas S

    43 abonnés 540 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 23 décembre 2021
    Jessica est, on le devine, veuve depuis peu, et habite en Colombie, un pays dont elle ne maîtrise pas très bien la langue. Elle est réveillée par un bruit sourd une nuit, et va tenter d'en retrouver l'origine, alors que son environnement a l'air d'être hanté par une présence mystérieuse. À coup de longs plans fixes et avec une ambiance sonore omniprésente, Weerasethakul prend son temps pour suivre cette quête jusque dans la jungle colombienne. C'est beau, étrangement apaisant, et cela parle peut-être de la façon dont le cinéma est en quelque sorte la mémoire de l'humanité et un générateur d'empathie ; mais la conclusion m'a tout de même semblé tirée par les cheveux.
    AZZZO
    AZZZO

    301 abonnés 800 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 18 décembre 2021
    Ce qu'il y a de chouette dans le cinéma de Apichatpong Weerasethakul, c'est sa lenteur, sa délicatesse, le contre-pied de cette ultra-modernité fatigante aux mouvements de caméra incessants et aux dix plans par secondes. Ce n'est pas du dandysme mais une quête sincère de réflexion sur la mémoire des hommes, celles des sons et des émotions qui nous relient au passé et aux autres. N'en dévoilons pas davantage. Certes, quelques plans sont interminables et l'ésotérisme de l'oeuvre peut prêter à sourire, mais qu'il est bon de vivre ce genre d'expérience cinématographique atypique.
    Fibroptica
    Fibroptica

    3 abonnés 9 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 15 décembre 2021
    Je ne savais pas trop à quoi m'attendre avant de voir le film, les très bonnes critiques sur ce dernier m'ont poussé à franchir le pas. Ce qu'on peut dire déjà c'est que le film n'a rien à envier aux plus grande oeuvres de Tarkovski. Le film prend son temps c'est le cas de le dire et nous offre un véritable exercice du regard et de l'écoute. Effectivement le son est un élément immensément important, bien évidemment le récit met un mystérieux son au centre du récit, mais au-delà de ça, c'est une véritable ode à l'écoute. L'écoute et le regard des petits événements insignifiant de la vie. Des éléments sur lesquels en dehors de la salle de cinéma, jamais nous les aurions remarqué.
    Je suis sortie de la salle assez perdue. Je ne sais toujours pas aujourd'hui si j'ai apprécié ce qu'il m'a était donné de voir. Tout ce que je sais, c'est que jamais j'ai été dans une telle intention pour regarder un film. Toutefois il est certain que c'est un film à aller voir en salle, c'est un véritable événement qui va probablement encore quelque chose occuper mes pensées.
    Leonard B.
    Leonard B.

    1 critique Suivre son activité

    0,5
    Publiée le 13 décembre 2021
    Une torture, physique et psychologique. L'ennui le plus total se bat en duel avec le désespoir de ne pas être suffisamment bien placé pour pouvoir quitter la salle. On se surprend à espérer que chaque plan séquence est le dernier. Un calvaire !
    Francoise Aubert
    Francoise Aubert

    1 critique Suivre son activité

    2,0
    Publiée le 12 décembre 2021
    Que dire de ce film, ennuyeux, qui traîne en longueur et surtout un scénario un peu brouillon, difficile de savoir où veut nous emmener le réalisateur.
    QuelquesFilms.fr
    QuelquesFilms.fr

    267 abonnés 1 634 critiques Suivre son activité

    2,5
    Publiée le 9 décembre 2021
    En quittant la Thaïlande pour tourner en Colombie, Apichatpong Weerasethakul n’a pas laissé derrière lui son cinéma si singulier. Il continue, en d’autres lieux, à creuser son sillon artistique. Mystère, lenteur, contemplation. La première moitié de Memoria est peut-être plus “narrative” qu’à l’accoutumée. Étrange, certes, doucement surréaliste, mais avec un je sais quoi qui capte davantage l’attention. La séquence avec l’ingénieur du son est étonnamment passionnante. On avance dans un récit “façon puzzle”. On n’y comprend pas grand-chose, comme le personnage principal. Mais on avance agréablement. Et le temps semble se diluer. Des tableaux d’une grande beauté statique ont un pouvoir quasi hypnotique. L’aventure sensorielle se double d’une réflexion sur la mémoire. La poésie se conjugue à une forme de méditation métaphysique où l’on se perd encore un peu plus, entre développements extatiques et développements soporifiques, entre rêverie les yeux ouverts et rêverie les yeux fermés. Un bang. Le Big Bang. Des extraterrestres. Pourquoi ? Pourquoi pas ? Le cinéma expérimental du réalisateur thaïlandais est toujours un défi à l’attention constante, mais, dans un registre associant le sibyllin et le zen, c’est assez inouï.
    nicolas t.
    nicolas t.

    1 abonné 12 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 5 décembre 2021
    Heureux de retrouver Apichatpong Weerasethakul en d’autres terres, mais c’est bien le même vertige que pour Blissfully yours, Tropical malady ou Cemetery of splendour. Le cinéma aurait beaucoup à gagner à s’en inspirer, en trouant les récits obligés, en ouvrant des parenthèses éloignées, en faisant preuve de reserve pour qu’une vie inconnue y trouve sa place. C'est tout cela qui est offert avec Memoria. Memoria ouvre le regard par la longueur et la beauté de ses plans et ouvre l'intelligence par ses ellipses.
    Laurence Chevallier
    Laurence Chevallier

    1 critique Suivre son activité

    1,0
    Publiée le 3 décembre 2021
    Un film d'un ennui intersidéral... D'une longueur sans fin avec des plans fixe sans aucune action, qui laisse penser que le réalisateur se fait juste plaisir..
    Patjob
    Patjob

    34 abonnés 589 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 18 décembre 2021
    Il faut être sensoriellement et psychologiquement disponible (prêt à se laisser « embarquer ») pour aller visionner ce film exigeant et riche qui rappelle par certains aspects, ce n’est pas peu dire, le cinéma de Tarkovski : contemplation et profondeur. Avec ici une part essentielle donnée à une dimension qui échappe à la réalité concrète matérialiste : l’onirisme et le surnaturel qui viennent troubler l’ordre « normal » des choses. Ce qui frappe en premier dans ce film éminemment original et personnel, c’est le rôle central donné au son. Le seul évènement qui intervient lors du long premier plan fixe, presque abstrait, est une détonation, qui sera le fil conducteur du film. Jessica va avoir la confirmation, au détour d’un dialogue dans lequel son compagnon lui dit qu’il n’y a pas de travaux, éliminant ainsi l’hypothèse d’une cause extérieure, que cette détonation est intérieure. Elle va essayer de la définir, ce qui donne une scène passionnante avec un jeune ingénieur du son qui tente de la reconstituer, au cours de laquelle on s’aperçoit combien il est difficile de décrire un son, ô combien plus abstrait qu’une image. Elle va essayer aussi de l’expliquer, d’abord par des raisons scientifiques et rationnelles qui ne la mèneront à rien. C’est un film de questionnements, non d’explications. Et cette détonation qui vient d’un intérieur lointain n’est pas sans évoquer le big bang originel. Place centrale du son, mais aussi rôle narratif : la même première scène donne le ton en faisant comprendre au spectateur, avec le bruit de pas, que le personnage s’est levé et s’approche, hors champ, du miroir montré. La deuxième scène, un long plan fixe (une des caractéristiques formelles du film) sur un parking, lui confère tout à la fois des fonctions symboliques et émotionnelles. Cette scène, qui fait penser à une « installation », raccroche immédiatement le film à un certain art contemporain. La bande son sera ainsi fondamentale tout au long de ce film qui ne s’autorise pas de musique « d’accompagnement ». Les seules musiques entendues seront « réelles », c’est à dire le produit des scènes montrées : la musique sur laquelle travaille Hernán dans son studio, la (formidable) prestation du groupe musical dans ce même bâtiment, ou celle d’un probable juke-box sur laquelle dansent des jeunes dans la rue.
    Le questionnement central de ce film philosophique et métaphysique est celui de la perception et des frontières de la réalité. Le rêve n’est pas la réalité mais en fait quand même partie, même si certains ici, comme le second Hernán, ne rêvent pas. L’imagination et le fantasme aussi contribuent à rendre difficile ce rapport à la réalité : Hernán existe-t-il vraiment ? Comme les troubles de la mémoire, qui joue des tours à Jessica : voir cette confusion sur un ami mort ou pas. Cette quête de Jessica pour se situer et se comprendre prend des dimensions ésotériques, avec les mystères des civilisations anciennes ou inconnues, ou par l’animisme des objets qui racontent quelque chose, des dimensions surnaturelles avec la mémoire infaillible du second Hernán ou sa capacité à faire accéder aux souvenirs des autres, des dimensions cosmiques avec la possibilité d’existence d’autres civilisations, ailleurs… Et d’autres visionnages du film laisseraient certainement en percevoir d’autres richesses.
    S’il fallait trouver une parenté entre ce film qui place Apichatpong Weerasethakul dans le cercle des grands créateurs et un autre chef d’œuvre, ce serait à mon avis avec « 2001, l’Odyssée de l’espace ». Par les questionnements sur le temps et sur l’espace, le « son » entendu ici renvoyant au mystère du monolithe intemporel et les dernières images du film, celles d’une nature qui nous dépasse et où l’on se perd, à la plongée dans l’infini qui clôture le film de Kubrick.
    Michèle G
    Michèle G

    41 abonnés 26 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 2 décembre 2021
    Tout commence par un long plan fixe silencieux. Une silhouette endormie se détache d’une pénombre. Un bruit sec, bref, mais puissant, brise ce silence. Une détonation… Un « bang ».

    Une femme se réveille. Commence alors son errance à mi-chemin du sommeil et de l’éveil dans cette ville de Bogota où elle est de passage. Au premier abord, ce son ressemble à un acouphène. Il apparaît par intermittence. Cette interférence l’interpelle, la déstabilise, semble la faire souffrir.

    Cette femme, Jessica, merveilleusement interprétée par Tilda Swinton, va aller à la rencontre de personnes qui pourraient l’aider à identifier la nature de ce « bang ». Au fil de cette traversée, une distance se crée entre Jessica et le monde qui l’entoure ; un décalage temporel. Ce « bang » serait-il un son désynchronisé qui l’entraînerait hors champ du réel ?

    Sa première rencontre la conduit auprès d’un ingénieur du son dans un studio d’enregistrement et de mixage. Ensemble, ils vont disséquer ce son insolite que Jessica va tenter de lui décrire. Prendre le temps d’écouter, de fragmenter, de reconstituer, pour s’approcher au plus près de ce son. En obtenir une copie audio, comme s’il s’agissait d’un miroir sonore.

    Prendre ce temps cinématographique. Un magnifique hommage à tout ce travail autour du son qui habituellement joue les « second rôles » face à l’image. Cette fois, la bande son est un personnage à part entière sans qui le film ne pourrait être.

    Cet ingénieur du son s’appelle Hernan. Il est aussi musicien. Son groupe porte un nom mystérieux : « depth of delusion ». Mais lui, est-il réel ? Lorsqu’il aura accompli ce qu’il devait transmettre à Jessica, il va disparaître. Elle aura beau le chercher ou aller écouter ce groupe de musiciens, ce passeur de son s’est évaporé. Est-il retourné vers ce « Bang » dont il semblait être l’un des messagers ?

    Connaître l’origine de ce mal qui l’assaille, serait-ce s’approcher de l’origine du monde ? Ce « bang » serait-il l’écho du « Big Bang » ? Au fil de ses pas et de ses rencontres, Jessica semble remonter ces temps immémoriaux dont les mémoires qui les ont jalonnés ont laissé des traces éternelles.

    Elle va franchir une nouvelle étape de sa quête, lorsqu’elle va se retrouver hors de la ville, en immersion avec la nature luxuriante de la Colombie, qui n’est pas sans rappeler la Thaïlande natale du cinéaste. Et c’est au cœur de cette nature tropicale, qu’elle va rencontrer un homme qui s’appelle… Hernan ; se retrouvant ainsi dans un autre temps décalé, où celui dont elle avait perdu la trace, réapparaît autrement. Il n’a plus 30 ans, mais autour de la cinquantaine.

    Si ces « deux passeurs » semblent ne faire qu’un dans cette traversée transcendée du temps, cette rencontre avec le « second Hernan » est la plus belle du film. C’est lui qui va transformer le « bang » de Jessica en une incarnation sensorielle, en harmonie avec la nature et les éléments où la mémoire de l’humanité est préservée. Une plongée dans un grand « Tout » où les matières vivantes et leurs mémoires universelles paraissent reliées.

    Jessica va suivre ce « nouveau guide », qui tel un alchimiste va transformer les sons en mémoires. Ensemble, ils vont pénétrer un peu plus profondément les mystères des mémoires disparues, saisissant au passage leurs souffrances.

    Disparaître comme le jeune Hernan, comme tous ceux que les régimes totalitaires effacent de cette terre. Les troupes militaires sont présentes dans ce film ; quelques plans distillés au cours du montage pour… mémoire. Des présences silencieuses, mais bien réelles.

    D’une histoire l’autre, que lui raconte Hernan, Jessica finit par lui demander de lui montrer le « visage » du sommeil. Elle souhaiterait le voir dormir pour tenter d’entrevoir cette lisière ; ce passage de l’éveil au sommeil, de la conscience éveillée au rêve ; à laisser un temps la vie en suspens pour s’approcher au plus près de la mort.

    Hernan va s’allonger à même la terre et s’endormir les yeux grands ouverts. Un plan fixe s’attarde sur ce regard figé vers un insaisissable horizon ; à faire d’Hernan un mort le temps d’une courte absence. Imperceptibles frontières. Et s’il n’y en avait pas ! Hernan dira d’ailleurs à Jessica « Je suis le disque dur, tu es l’antenne. »

    Ce voyage sensoriel tisse les lignes d’une partition mémorielle comme un « conte » philosophique d’une incroyable beauté poétique. Un voyage au cours duquel Jessica fait une autre rencontre ; celle d’une archéologue française, interprétée par Jeanne Balibar, qui travaille sur des ossements millénaires.

    Le temps est là, autrement, dans la découverte de ces vestiges humains qu’elle exhume de la poussière. Cette archéologue va faire visiter son laboratoire à Jessica où elle va lui montrer le crâne d’une jeune fille qui a une particularité qui interpelle ; l’un de ses côtés possède un trou. Une ouverture ? Une brèche ? Ce mystérieux orifice serait-il le « trou des mémoires » ; un lieu de passage par lequel elles passent ou s’échappent ?

    Le « bang » qui envahit le crâne de Jessica serait-il passé par ce trou millénaire ? Cette ouverture vers l’infini relierait-elle les mondes visibles et invisibles ?

    « Memoria », Prix du Jury (ex aequo) du Festival de Cannes 2021, est une magnifique traversée. Une évocation de notre présence au monde. À nous conduire hors champ du visible où l’image n’a jamais eu autant besoin de sa bande son, où le montage raccorde les espaces et les fragments du temps, où l’acteur devient le passeur de toutes ces empreintes millénaires.

    Dommage que ce chef-d’œuvre glisse au final vers une issue proche de la « Science-Fiction », s’éloignant ainsi de ces ouvertures qu’offraient tout au long du film cette traversée philosophique et poétique.
    Kiberen
    Kiberen

    22 abonnés 91 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 1 décembre 2021
    Parler de "Memoria" comme d'une expérience sensorielle est l'équivalent d'expliquer qu'une porte peut s'ouvrir. Expérience auditive, guidant l'histoire, au point que le film ne sera probablement jamais diffusé ailleurs qu'au cinéma, là où pour lui, l'expérience est la plus réelle. Visuelle, avec son travail de la pellicule tout simplement sublime et des cadres qui deviennent des tableaux nous invitant à contempler l'urbanisme au sein duquel on se perd où les jungles étouffantes, réminiscence de "Oncle Boonmee". Narrative, tant Apichatpong Weerasethakul offre une quête à la pureté sensible.

    Toujours emprunt de questionnements au-delà du réel, le film emmène Tilda Swinton dans une quête spirituelle à la recherche d'un son qui ne cesse de revenir la hanter, sans que personne ne puisse l'entendre. À travers cette idée simple, Apichatpong Weerasethakul le spectre des émotions et du ressenti, un voyage qui s'installe pleinement lorsque Swinton doit réussir à décrire ce son qui l'obsède. De là, les réflexions métaphoriques sur l'espace et le temps, Éros et Thanatos, le concret et l'imaginaire s'enchaînent au gré des rencontres. Il est d'ailleurs assez sublime de voir comment le film peut sembler parfois s'éparpiller, mais qu'une fois qu'on prend du recul, on peut trouver une cohésion au cœur de son voyage.

    Œuvre intimiste au possible, la possibilité de ne jamais revoir le film hors des salles établit une étrange liaison entre l'œuvre et le récit : tout comme on explore les limites de notre réalité à travers des récits et des restes se transmettant à travers les générations, "Memoria" s'impose comme une œuvre accomplie sur la déconstruction du récit, dont le peu de gens qui l'auront vu essayera de le décrire à travers les âges, sans pouvoir montrer le film, simplement en décrivant des souvenirs et des émotions. Une sortie Blu-ray en tant que retournement de situation viendrait abattre cette conclusion avec fracas, mais le plaisir de revoir le film prendra le dessus. Une pure expérience de cinéma, dévouée à ouvrir les portes de notre inconscient.
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