Je ne vais pas être très original : comme beaucoup, je pensais que « Gran Torino » était la sortie idéale pour Clint Eastwood en tant qu'acteur, voire en tant que réalisateur. Ce dernier en a décidé autrement, pas toujours pour le meilleur, le « sommet » étant atteint avec « Le 15 h 17 pour Paris », ahurissant dans son propos comme son traitement. Au vu de la carrière du bonhomme, on pouvait toutefois penser que ce lourd faux-pas était un accident de parcours : il semble que ce soit le cas. Car « La Mule », c'est plutôt pas mal. Solide, cohérent, assez personnel dans le propos, Eastwood fait preuve d'un savoir-faire indéniable pour raconter cette histoire inspirée de faits réels, étonnante quant au point de départ, beaucoup moins dans son déroulement. Nous pouvons même l'écrire : le récit se déroulera presque sans la moindre surprise, limitant l'intensité, voire légèrement l'intérêt de l'œuvre. Et comme le légendaire cinéaste a pris depuis quelques années au cinéma un virage nettement plus conservateur, on aura inévitablement droit à un discours bien appuyé sur l'importance de la famille et d'en profiter tant qu'il est encore temps. Ces réserves émises, il est loin d'être interdit de prendre un certain plaisir à suivre ce film bien mené, sans fioritures, trouvant un juste équilibre entre
partie « livraison » et partie « traque »
, la belle galerie de seconds rôles (Bradley Cooper, Dianne Wiest, Andy Garcia, pour ne citer qu'eux) étant à souligner, l'humour discret mais bien présent, notamment dans les dialogues, également bienvenu. Cette fois, on peut vraiment penser que cette « Mule » sera la dernière sortie pour Clint acteur : elle serait honorable, pour le réalisateur également. On est toutefois en droit de penser (encore) que « Gran Torino » eut été un chant du cygne idéal, tout comme il n'est pas interdit d'espérer qu'Eastwood sera capable de nous claquer un dernier grand film avant de tirer définitivement sa révérence : j'y crois.