Bien qu’inspiré d’un article d’un quotidien américain consacré à un vieux passeur de drogue (une mule) pour le cartel mexicain de Sinaloa, le film est hybride et peu original car il traite, d’une part, d’un octogénaire ruiné, Earl Stone (Clint Eastwood, 88 ans) qui fait office de mule grâce à son pick-up,
entre un garage (du Texas) et un motel (dans l’Illinois)
et d’autre part, de ses rapports difficiles et distendus avec sa famille qu’il a toujours négligée (
absence au mariage de sa fille, divorce au bout de 10 ans de vie commune
) par rapport à son travail d’horticulteur, spécialiste des hémérocalles (lys dont la floraison ne dure qu’une journée), ce qui lui a fait traverser 41 états de l’Union, sans contraventions au cours de sa carrière. Le film reste un drame (
la scène des derniers instants de Mary, sa femme, est émouvante, avouant qu’Earl a été l’amour et la souffrance de sa vie
), certes bien interprété mais non un mélodrame (à la Douglas Sirk ou à la Pedro Almodóvar) ou une tragédie (
la fin, sans réel rebondissement, gâche un peu le film
). Quant à l’enquête policière (dirigée par Bradley COOPER [qui avait tourné dans le film d’Eastwood, « American sniper » (2014)] et le trafic de drogue, elle est trop aseptisée, plus humoristique que réaliste, mettant de côté l’ultra violence du monde des cartels [illustrée de nombreuses fois au cinéma comme récemment dans « Sicario » (2015), par exemple, de Denis Villeneuve]. En fait, c’est avant tout un témoignage indirect de Clint Eastwood sur sa propre vie, la participation de sa fille (Alison EASTWOOD dans le rôle d’Iris, fille d’Earl) n’étant pas le fruit du hasard. Malheureusement, l’idée qu’il faut privilégier sa famille et chaque instant n’est pas neuve : elle est répétée comme une antienne sans réel développement, tandis que la psychologie des personnages reste trop superficielle (surtout sa fille et sa petite fille, un peu moins sa femme).