Bertrand Blier a mis 9 ans avant de revenir sur grand écran ! Son dernier film en date est Le Bruit des glaçons avec Albert Dupontel et Jean Dujardin, sorti en août 2010.
Gérard Depardieu et Bertrand Blier ont tourné à de nombreuses reprises ensemble, notamment pour Les Valseuses, Buffet Froid ou Tenue de soirée. Convoi exceptionnel est leur 9ème collaboration. Quant à Depardieu et Clavier, ils ont déjà sept films à leur actif, avec entre autres les adaptations d'Astérix et Obélix, Napoléon, Les Misérables ou encore Les Anges gardiens (1995).
Etonnament, Convoi exceptionnel marque la première collaboration entre Bertrand Blier et Christian Clavier. "Lors d’un dîner, Catherine Frot me dit qu’elle tourne Momo avec Christian Clavier. Je lui demande s’il n’est pas trop chiant sur le plateau. Elle me répond que non, bien au contraire. Je lui confie alors avoir très envie de travailler avec lui. Le lendemain, elle s’empresse de le répéter à Clavier qui s’empresse à son tour de le répéter au producteur de Momo, Olivier Delbosc, qui m’appelle aussitôt pour organiser un rendez-vous. Et j’imagine immédiatement un truc pour Clavier et Depardieu", confie le cinéaste.
Bertrand Blier n'a plus besoin de parler à Gérard Depardieu tant les deux hommes se comprennent. "Je l’appelle juste pour lui dire les dates de tournage et il rapplique !", déclare le réalisateur. "Non mais sérieusement, je n’ai jamais essuyé de refus de sa part. Il est parfois moins emballé, il y a eu des projets qui n’ont pas abouti, mais on est fait pour bosser ensemble. Il y a plus de quarante ans, il était très bien, aujourd’hui, il est incroyable ! Je l’ai vu s’améliorer de film en film. Et on a eu la confirmation de son génie quand il a chanté Barbara, devant des salles pleines en larmes. Il est hallucinant ! C’est le patron. Et je savais bien qu’un film avec moi à l’écriture et avec son pote Clavier comme partenaire, il n’allait pas le refuser. Il ne me restait plus qu’à écrire une histoire, inventer quelque chose…"
Le scénario de Convoi exceptionnel, trop court, a dû être rallongé pendant le tournage. C’est la première fois que cela arrive à Bertrand Blier. "Mes films ont tous à peu près la même durée : 1h45, 1h50… Là, sur le papier, on n’arrivait qu’à 1h10 ! J’avais l’air d’un con ! Obligé le soir, dans ma chambre d’hôtel, d’écrire des séquences pour le surlendemain. Je n’ai pas aimé. Ou j’écris, ou je tourne, mais je n’aime pas faire les deux à la fois. Maintenant, que ça se passe sur ce film-là, c’est amusant. Comme si le scénario était trop court parce que la vie l’est aussi, justement", explique le cinéaste.
Etonnamment, Bertrand Blier n'inspire plus trop confiance aux financiers. Le réalisateur doit donc batailler dur pour parvenir à monter ses projets. De plus, les assurances exigent que le cinéaste âgé de 80 ans désigne un successeur en cas de décès durant le tournage. Ainsi, pour Convoi exceptionnel, Blier avait choisi Jan Kounen (Dobermann) pour le remplacer au cas où il passerait l'arme à gauche.
"Bertrand Blier est un grand auteur", scande Gérard Depardieu. "Il est étonnant et intemporel. Ce qu’il écrit est juste sublime. Le texte de Convoi exceptionnel est un peu « beckettien », mais avant tout « Blier ». D’autant plus que Bertrand, au fait de problèmes de l’époque, a cette incroyable énergie pour raconter ce que nous vivons. À savoir : l’uniformisation d’un monde où on ne s’intéresse désormais qu’à ce qu’on voit, où on va là où on nous dit d’aller… Comme si on obéissait, comme les personnages de Convoi exceptionnel, à des feuilles de route. Ce qui me plait dans le scénario de Bertrand, c’est que les protagonistes ne sont pas soumis à des performances. Ils doivent subir. Il est rare dans le cinéma d’aujourd’hui de participer à une aventure qu’on peut ne pas considérer comme un film, mais comme une oeuvre."
Beaucoup d'obsessions de Bertrand Blier sont dans Convoi exceptionnel, et en premier lieu celle du caddie. "C’est né sur Les Valseuses qui s’ouvre sur les deux gaillards avec un caddie sur le parking d’un hypermarché", se souvient le metteur en scène. "Plus tard, toujours dans Les Valseuses, j’ai en ai filmé un qui bougeait seul, poussé par le vent… Ensuite, il y a Merci la vie, où il partage carrément l’affiche avec Charlotte Gainsbourg et Anouk Grinberg. Jusqu’à Convoi exceptionnel… On le retrouve dans pas mal de mes films, c’est vrai. C’est un objet moderne, utile puisqu’il transporte des choses diverses – des conserves, des bouteilles, de la viande, un enfant, un vieillard, des acteurs… Et même une caméra car, comme ça roule, cela peut faire office de travelling !"
La réplique, « Quand un homme est fou de sa femme, il devient un assassin. », entendue dans Convoi exceptionnel, est un clin d’oeil au personnage de Jean Carmet dans Buffet froid. "Il y a tout de même onze morts dans Buffet froid ! Et pas que des femmes !", déclare le réalisateur. "Le meurtre, c’est ce qu’il y a de plus beau au cinéma ! C’est quand même très plaisant de tuer des gens. C’est pourquoi on aime tant les polars. Dans la vie, c’est traumatisant. Au cinéma, ça soulage. À moins d’être dérangé, personne ne descend dans la rue avec l’idée de buter quelqu’un. Moi, quand j’écris un scénario, il y en a forcément un qui va en tuer un autre. Souvent, en tout cas. Pourquoi ? Parce que le sujet le plus intéressant, ça reste la mort. Les histoires d’amour, ça fait chier. Les naissances, pareil. En réalité, c’est merveilleux, mais à l’écran, c’est emmerdant. La mort, on ne sait pas bien ce que c’est et on y va tous inéluctablement. Ça en fait le plus grand thème de l’Humanité ! La plus grande question que tout le monde se pose sans avoir de réponse."
La chanson qu’interprète Farida Rahouadj, Danse avec moi, est tirée de Quai des orfèvres de Henri-Georges Clouzot où Bernard Blier, père de Bertrand, tenait un rôle important. C'est un hommage direct", explique le metteur en scène. "C’est un des plus beaux films du cinéma français, et mon père y jouait le pianiste et le mari de Suzy Delair. Par ailleurs, c’est Clouzot qui m’a donné envie de faire du cinéma."
À Convoi exceptionnel, situation exceptionnelle : Bertrand Blier a autorisé une improvisation à Gérard Depardieu à la fin du film. "C’est vrai que je ne le fais jamais, mais là, c’était particulier. Quand j’ai eu l’idée de cette inversion des personnages, l’un devenant riche, l’autre, pauvre, je tenais ma fin. Mais comme je l’ai eue en cours de tournage, je n’avais que des brouillons, rien de précis. La ligne directrice, c’était la bouffe. Ils devaient parler de foie gras (vu qu’ils en mangeaient), et embrayer. Gérard ne s’est pas fait prier : « Moi, ce que j’adore, c’est le poulet ». Comme il est très brillant quand il parle de bouffe, il donne sa recette et cela donne une fin de film… surprenante."