Quand j'ai vu la présentation de ce "petit" film, j'ai tout de suite su que j'irai le voir.
Petit? Dans la mesure où il ne fera pas des masses d'entrées au box-office, où il est peu programmé et ne tiendra sans doute pas longtemps. Comment espérer une longue carrière à un film sans "histoire", sans scénario et sans acteurs, quand on nous vend des daubes sur les seuls noms de Deneuve ou de Huppert? Mais grand par son ambition et son originalité. L'acteur, c'est la nature; le scénario, la vie de la nature.
Ca se passe en Galice, dont le relief accidenté m'a surprise. C'est la province d'Espagne où, chaque été, les incendies sont les plus destructeurs.... Les collines sont couvertes de végétation dense. La première séquence, sublime, nous montre des machines monstrueuses détruisant de jeunes (mais s'élevant déjà haut!) eucalyptus. Elle fait tomber cinq, six troncs élancés de rang, avance, inexorable, jusqu'au moment où elle se trouve devant un vieil arbre, énorme, tordu, creusé de cavités comme une bête apocalyptique....
Amador (Amador Arias, garde forestier dans la vraie vie), sort de prison où il a passé deux ans... comme pyromane. Il retrouve sa vieille mère (Benedicta Sanchez), son vieux chien, ses trois vaches. Bénédicta aime son fils. mais entre les deux, il n'y a aucun geste d'affection, aucune embrassade, ces gens rudes n'ont pas l'habitude d'étaler leurs sentiments. C'est l'hiver, il pleut, on patauge dans la boue dans ce pauvre hameau, où des voisins retapent des maisons à l'impressionnant toit de lauze, en pensant qu'ils attireront des touristes. Mais la nature sauvage, autour, ces bois sauvages, accidentés, c'est tellement beau... Oliver Laxe films le silence de nature, la brume qui s'accroche, l'herbe détrempée...
La vie de la maison se passe autour du gros poêle de cuisine. La mère cultive quelques légumes dans un champ trop en pente pour être exploitable; le fils mène les trois vaches en pâture. C'est un vieux garçon, un taiseux. Oh, on voit bien qu'il trouve la jeune, nouvelle vétérinaire, séduisante -mais d'amour dans sa vie solitaire, il n'en a sans doute jamais été question.
Revient l'été. Et l'incendie. C'est comme un documentaire. Laxe et son équipe ont suivi une formation de pompier et ont attendu qu'un feu se déclenche pour filmer, le travail des soldats du feu, et ces habitants, les vieux qui ne veulent pas partir, les moins vieux qui veulent défendre eux même leur terre, plus gênants qu'autre chose. Et ce monstre, flamboyant, dévastateur, sautant d'arbre en arbre, contre lequel les pauvres moyens humains apparaissent dérisoires.
Mais quand le feu est vaincu, vient le moment du règlement de compte. C'est lui, Amador, le pyromane, qui a recommencé! J'ai pensé à la fin de "Peter Grimes", quand après la mort du second petit mousse, le hameau se retourne contre Grimes.
C'est très beau.... mais disons que c'est un film "de niche", pour un public qui aime la nature, la vie paysanne.... Amateurs de vedettes, passez votre chemin!!