Marcello Foix, écrivain sarde contemporain, dans son, roman « la Lignée du Forgeron », parle de la mer comme quelque chose qui apporte et qui reprend. C’est précisément le thème développé par Fois que reprend Mati Diop dans son premier long métrage, couronné par le Grand Prix à Cannes cette année, « Atlantique ».
Nous sommes à Dakar. Un groupe de jeunes hommes travaillent dans la construction d’immeubles pour un promoteur qui ne les paie pas. On le découvrira plus tard, grassouillet dans une riche demeure. Les jeunes réclament leurs salaires, en vain.
Souleiman aime Ada, sans trop s’avancer, et Ada aime Souleiman. Mais Ada a été promise par les parents à un homme riche qui fait des affaires en Italie. Le soir, les jeunes hommes s’embarquent pour l’Europe, mais la pirogue coule. Enfin, c’est la rumeur, comme celle annonçant le corps de Souleiman retrouvé dans un filet de pêche. Lors du mariage d’Ada, le lit nuptial brûle mystérieusement. Un inspecteur est chargé de l’enquête, d’autant plus que des témoins affirment avoir aperçu Souleiman. Qui dit vrai ?
Mati Diop nous embarque alors dans une histoire de revenants, de femmes possédées, de djinns, de zombies, où des maladies curieuses apparaissent, même l’inspecteur est atteint.
Le film de Mati Diop peut se lire de deux manières : soit croire aux forces surnaturelles, c’est beau l’Afrique et son folklore, ou comme une arnaque des faibles qui font cracher le fric aux pourris, riches à millions, qui ont la police corrompue dans la poche, et qui ne craignent justement que les revenants. Cette double lecture du film, sans que Mati Diop ne donne de réponse, est en fait la principale qualité « d’Atlantique », une plongée dans l’Afrique noire qui pourrait avoir les moyens de son développement, mais livrée à des potentats sans vergogne.
Une très belle actrice, genre mannequin, au visage lumineux, est révélée : Mama Sané éblouissante, découverte par la réalisatrice sur un trottoir de Thiaroye, faubourg de Dakar tristement célèbre pour le massacre commis par l’armée française en 1944 ! Beau film qui nous sort des sentiers battus, mettant l’accent sur les raisons qui poussent les jeunes à partir au péril de leurs vies, tourné en langue wolof avec quelques expressions françaises qui émergent ça et là, mais un « Grand Prix », c’était un peu poussé, d’autant que certains films repartis bredouille, auraient pu s’inscrire au palmarès.