On a découvert Frédéric Tellier avec son magistral premier film, le passionnant policier « L’affaire SK1 ». Il change de registre ici en signant un drame, mais encore une fois tiré de faits réels. Il y applique de nouveau cet art du romanesque conjugué à un réalisme confondant. « Sauver ou périr » n’est pas vraiment le film que l’on pourrait croire de prime abord, c’est-à-dire l’évocation de la vie de pompiers tout en étant une forme d’hommage à ce métier si dangereux et nécessaire. Si le long-métrage débute comme tel, un peu comme une peinture de la vie d’une caserne et d’un homme du feu en particulier, il change vite de registre. D’ailleurs ce n’est pas sur ce créneau qu’il est le plus probant, la première demi-heure ressemblant davantage à un documentaire dynamique et éclairé sur le sujet plus qu’à un film de cinéma. On préférera d’ailleurs l’excellent « Les Hommes du feu » avec Roschdy Zem et Emilie Dequenne sur le même registre.
« Sauver ou périr » dévoile sa véritable facette lors de l’accident que subit Franck, le héros du film, lors d’une intervention pour incendie et le drame qui s’ensuit. Le pompier se retrouve en effet pris dans les flammes et fortement brûlé à tel point que sa vie soit mise en danger et qu’il passe deux ans à l’hôpital où l’attend un tout autre défi : celui de réapprendre à vivre. Le film est donc avant tout le formidable récit d’une renaissance doublé d’un combat pour la vie et contre la mort. On suit le délicat chemin que doit accomplir cet homme qui ne se reconnait plus dans un miroir, marqué à vie par le feu. Dans ce rôle difficile, Pierre Niney délivre une performance incroyable et d’une maturité sans précédent. Il est aussi crédible en pompier aguerri malgré l’aspect frêle qu’on lui connait qu’en grand brûlé qui ne s’accepte pas. Durant certaines scènes, il nous émeut comme jamais. Anaïs Demoustier n’est pas en reste, tout en sensibilité intériorisée, à l’instar de Chloë Stéfani, touchante en infirmière compatissante. Leurs échanges sont déchirants et nous font pleurer plusieurs fois à chaudes larmes. La séquence où il se confie à son aide-soignante ou encore celle qui clôture le film alors qu’il tente de reconquérir sa femme sont poignantes comme jamais. Loin de « Patients » par exemple, le film choisit, très certainement à raison pour faire honneur à cette histoire, d’adopter le registre le plus tragique et dramatique qui soit.
Frédéric Tellier sait qu’il a entre ses mains un sujet hautement lacrymal. Et c’est peut-être le petit reproche que l’on pourrait faire à « Sauver ou périr » : s’il évite de sortir les violons, il y a tout de même une accumulation de scènes destinées à faire sortir les mouchoirs. Et, parfois, son film n’est pas loin d’atteindre la puissance émotionnelle des plus grands mélos américains à la « Titanic » ou « N’oublie jamais », pour le pire mais souvent le meilleur tout de même. Quant à la mise en scène de Tellier, elle s’avère dynamique dans la première partie, qui semble très documentée et en proie avec le réel, puis plus discrète ensuite, faite d’images aux teintes grises et bleues en adéquation avec le contexte des hôpitaux et l’état d’esprit de Franck. La psychologie du personnage est d’ailleurs bien fouillée, on comprend les démons qui l’habitent et la souffrance, physique comme intérieure, qu’il subit. « Sauver ou périr » est un beau film, un tantinet trop long, qui donne envie de vivre envers et contre tout et un bel exercice de cinéma porté haut par des acteurs à leur sommet.
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