Je dois dire que je suis déçue; j'attendais beaucoup mieux d'Un Homme Intègre que ce film démonstratif au point d'en devenir caricatural, et dont l'interprétation est critiquable.
Ce que veut nous montrer Mohammad Rasoulof, actuellement sous la menace d'une incarcération: que le système iranien est complètement pourri. Ce n'est que corruption, du bas en haut de l'échelle. De lourds agios à la banque? mieux vaut graisser la patte de son conseiller, qui partagera avec son responsable qui lui même partagera avec le directeur de l'agence. Et hop! les agios disparaissent comme par enchantement, et cela revient beaucoup moins cher.
Cela,Reza le refuse. Marié à Hadis, la directrice du lycée local -une région moche, triste, froide.... d'un ennui accablant-, il s'est endetté pour monter une ferme piscicole. Mais la compagnie des eaux voudrait bien récupérer sa terre; alors l'approvisionnement en eau est fluctuant, et comme ça ne suffit pas, la compagnie utilise une riche famille locale dont le patriarche, Abbas, ne recule devant rien. Bagarre, Reza se retrouve en prison. Pour qu'il en sorte rapidement, il faut graisser des pattes, ce que son beau frère fait pour lui. Ses poissons sont empoisonnés: pour qu'il touche l'assurance.... etc, etc. Hadis (la belle Soudabeh Beizaee), plus réaliste, est prête à se compromettre pour aider son mari, encore ne faut il pas qu'il le sache
Rasoulof dénonce la collusion entre les riches propriétaires, les fonctionnaires, les mollahs.... Mais il n'y a pas que les honnêtes gens qui sont les victimes. Il y a aussi les minorités religieuses. On découvre qu'une élève du lycée n'est pas musulmane: il faut la renvoyer. Hadis n'a pas le choix. Ce sont les ordres supérieurs.... et, quand elle se suicide, on ne sait pas quoi en faire. Malgré le désespoir de sa famille, pas question de la faire reposer en terre musulmane! Finalement Reza s'en sortira quand son désir de revanche le fera devenir aussi retors que ses adversaires, par un mécanisme auquel, il faut le dire, le spectateur ne comprend rien!
Reza Akhlaghirad est un bien bel homme. De profil il ressemble à Georges Clooney et de face, à Romain Duris quand il fait la gueule. Le problème, c'est qu'il ne fait pas toujours la gueule, Romain, alors qu'Akhlaghirad n'a qu'une expression, seule et unique: l'oeil noir.
Tout cela plombe un peu le film qui n'en est pas moins un témoignage passionnant.
Selon les bonnes normes iraniennes, Hadis ne quitte jamais son foulard, même chez elle avec son mari et son fils.... Mais à quoi bon sacrifier aux normes puisque, de toutes façons, le film ne sera jamais projeté en Iran?
Et une chose me frappe (dans ce film iranien comme dans d'autres) c'est l'absence de religion, dans un pays qui vit sous la loi religieuse. On ne voit jamais les gens prier (ne serait que chez soi, pour implorer quand tout va mal!) ni se rendre dans un édifice religieux. A part le traditionnel "Si Dieu le veut", qui n'a pas vraiment de sens (moi même, quand je dois me séparer de quelqu'un pour longtemps, je lui dis "à l'année prochaine, si Dieu nous prête vie"!) La chape de la religion a tué, écrasé la simple foi....