Emmanuel Gillibert a eu l'idée du pitch du film à partir d'un événement personnel. Le metteur en scène était en effet lui-même un fêtard/célibataire endurci qui s'est retrouvé à vivre avec une personne qui avait deux enfants. "Un soir, j'ai entendu mon amie dire : "Les dents, pipi et au lit !" – Je me suis arrêté net : pour moi c’était surréaliste. Je me suis alors positionné comme un anthropologue de documentaires animaliers, avec un oeil vierge et objectif, et un certain recul pour découvrir cette nouvelle "faune" !", se rappelle-t-il.
Pour écrire Les dents, pipi et au lit, Emmanuel Gillibert s'est associé à Marion Thiéry, avec qui il avait fait de la pub. Cette dernière étant une mère divorcée avec un petit garçon sur les bras, le cinéaste lui a proposé d'écrire avec lui pour apporter cette touche féminine dont il avait besoin ainsi que son expérience. "Comme on avait tous les deux un boulot par ailleurs, et qu'il ne s'agissait pas d'une commande, on ne pouvait se retrouver qu’une fois par semaine, les mardis soir, pour écrire, sans savoir si ce projet se concrétiserait un jour. Du coup, il nous aura fallu quatre ans pour le mener à bien", précise Gillibert.
Emmanuel Gillibert voulait qu'Antoine (Arnaud Ducret) soit un antihéros qui évolue vers la vie de famille et que Jeanne (Louise Bourgoin) soit une maman forte mais touchante, une mère moderne. "Une sorte de Wonder Woman qui s'occupe de tout, mais qui a aussi ses faiblesses : quand elle se pose enfin le soir et que les enfants sont couchés, elle prend conscience qu'elle a mis sa vie de femme de côté", explique-t-il.
Afin de dénicher les deux perles rares, Emmanuel Gillibert et sa directrice de casting Adélaïde Mauvernay ont vu au moins une centaine d'enfants. Tous les deux voulaient privilégier des "caractères". Le réalisateur se souvient : "J'ai rencontré des mômes qui avaient un formidable CV mais qui étaient un peu "singes savants" – bons acteurs certes, mais manquant de spontanéité. J'étais animé par la volonté que les personnages soient dans la vie et la vérité, et il fallait donc que "ça déborde". Je recherchais des fortes personnalités et c'est ce que j'ai privilégié."
Emmanuel Gillibert avait par le passé tourné un court métrage avec Jérôme Alméras, le directeur de la photographie des dents, pipi et au lit. Ensemble, ils ont voulu donner une cohérence globale au film tout en faisant en sorte que chaque scène ait une personnalité forte.
"Avec Emmanuel, on s'était représenté Jeanne comme l'archétype de la bourgeoise du 6ème arrondissement de Paris, avec un petit côté décoratrice d'intérieur : elle est le clown blanc de l'histoire. Chez elle, rien ne dépasse : elle s'habille en grège et elle porte des cachemires, des pantalons moulants, des bottes ni trop hautes, ni trop basses. Bref, elle est toujours en demi-teinte et je m'en suis donné à coeur joie dans son côté psychorigide. Du coup, forcément, la situation est très drôle quand elle se lâche et qu'elle se met à vomir ! Elle est tout l'opposé de moi : personnellement, je déborde et je fais du bruit en marchant et en parlant ! (Rires) Pour autant, je l'ai dépeinte comme une maman-poule et elle passe de l'amour de ses enfants à l'amour d'Antoine."
Les références d'Emmanuel Gillibert et son équipe étaient surtout anglo-saxonnes, comme Maman, j'ai raté l'avion, Love Actualy et Quand Harry rencontre Sally. "Je trouve qu'en France on a tendance à faire de la comédie un sous-genre. Chez les anglo-saxons, au contraire, il y a un respect de l'image, du son et de la musique et ils sont généreux dans leur approche du genre", note-t-il.
Arnaud Ducret explique comment il voit son personnage de grand adolescent qui n'assume pas de devenir adulte : "C'est effectivement un grand gamin qui ne veut pas d'enfant et, contre toute attente, ce sont les enfants qui vont le faire devenir adulte ! C'est ce que je trouve très drôle chez lui. Il est dans un mécanisme de vie : il veut en profiter en maximum, enchaîner les nanas, les soirées où l'alcool coule à flot, les bons moments avec ses potes… Et peu à peu, il va s'attacher aux enfants de sa colocataire. Ça me plaisait de jouer un éternel ado qui peut se révéler romantique sans se l'avouer."
Depuis 2013, Louise Bourgoin a refusé pas mal de comédies parce qu'elle avait envie de s'attaquer à des sujets plus intimes et plus mélancoliques. Le désir de renouer avec le genre est revenu avec la naissance de son fils, à un moment où elle avait davantage besoin de légèreté. La comédienne confie : "J'avais aussi envie de rejoindre le public qui m'a découverte à la télé. Il faut dire que les rôles s'impriment en moi profondément et que je peux être très affectée pendant tout un tournage par la tristesse d'un personnage. C'est pour cela que j'ai tourné L'un dans l'autre et Sous le même toit et enchaîné avec Les dents, pipi et au lit."