Le Peuple loup parle de la volonté des hommes de contrôler les éléments. « L’histoire se déroule au XVIIème siècle, quand les Anglais cherchaient à "civiliser" l’Irlande en coupant toutes les forêts et en essayant d’exterminer les loups, car ils incarnaient symboliquement le caractère indomptable du pays », explique Tomm Moore. Lui et Ross Stewart, le coréalisateur, ont grandi à Kilkenny. Ils souhaitaient revenir vers tous les thèmes abordés dans les deux premiers films de Moore. Celui-ci raconte : « Nous arrivons à la mi-temps de nos vies, à un moment où l’on se sent tirés vers le confort et le conformisme. Nous voulions continuer à nous découvrir nous-mêmes. J’ai souffert de plusieurs troubles psychologiques dans ma vie. Ils rétrécissent votre horizon, en vous donnant le sentiment que vous serez en sécurité si vous restez chez vous et n’allez pas voir le monde. C’est un des thèmes de mes films : il est important d’aller au-delà de ce qui paraît rassurant, de s’ouvrir à l’inconnu ».
Le Peuple loup est le troisième long-métrage de Tomm Moore. C'est aussi le dernier volet, avec Brendan et le secret de Kells et Le Chant de la mer, d'un triptyque sur le folklore irlandais mais aussi sur les liens entre l'homme et son environnement. Très sensible depuis l'enfance au sort de la nature et des animaux, Moore espère que ce film permettra aux jeunes spectateurs de ressentir un lien avec ces thèmes : « Il peut être bon de prendre conscience [que la nature] n’est pas juste cette chose bienveillante et douce, mais aussi une force impressionnante, puissante et sauvage. Elle est capable de bien des choses que beaucoup ignorent ».
Si on peut aisément faire un rapprochement entre l’œuvre de Tomm Moore et celle d'Hayao Miyazaki pour l'importance de la faune et de la flore et la vision pessimiste des rapports entre les hommes et leur environnement, le cinéaste irlandais a en réalité découvert les films du réalisateur japonais assez tardivement, bien qu'il soit sensible aux thématiques qu'il développe et à son esthétique. Son inspiration provient plutôt de l’animation d’Europe de l’Est : « Les films hongrois, notamment, adaptés de contes folkloriques, comme ceux de Marcell Jankovics. Leur approche artistique m’a beaucoup influencé, bien davantage que les anime japonais. Ces derniers ont un très beau style, mais je trouve les illustrations et l’animation d’Europe de l’Est beaucoup plus variées. J’aime aussi la façon dont ces films sont liés à l’art moderne ».
Visuellement, les formes géométriques du film sont inspirées de l'art celtique ainsi que par des peintres de la Sécession viennoise, comme Gustav Klimt. Moore précise : « Je suis également intéressé par les structures fractales présentes dans les plantes. Elles sont davantage perceptibles lorsque l’on vit une expérience psychédélique, durant laquelle se révèle la géométrie infinie et sacrée de la nature. Autant de choses que l’on voit dans les mandalas ou dans l’art indigène. Chez les Haïdas, peuple amérindien de la côte ouest du Canada, le vivant est représenté comme une suite d’éléments nichés les uns dans les autres, comme des poupées russes ».
C'est la première fois que Tomm Moore co-signe un film avec un autre réalisateur. Pour Ross Stewart, il s'agit aussi d'une première puisque Le Peuple loup marque son passage à la réalisation. Il travaille dans l’animation depuis plus de vingt ans en tant que peintre, illustrateur et concepteur. Il a été directeur artistique et artiste concepteur sur Brendan et le secret de Kells et Le Chant de la mer et a contribué au développement visuel de L'Étrange pouvoir de Norman des studios Laika.