Sollers Point - Baltimore : les secrets du tournage

Sollers Point - Baltimore a remporté le Prix du jury au Champs Elysées Film Festival 2018 et le Prix du meilleur film de fiction au New Hampshire Film Festival.

Matthew Porterfield revient sur ses intentions avec Sollers Point - Baltimore : "J’espère, avec Sollers Point, avoir réussi le pari que je m’étais fait : y impliquer la communauté même dont je parle dans le film, dans sa conception comme dans sa fabrication, à l’image du personnage de Marquis, dont la musique hip-hop illustre certains passages du film. La liste des interactions entre les amis du film, et le film lui même, est aussi belle qu’elle est longue. Le pari était de parvenir à créer la plus juste des réciprocités et d’établir la relation la plus honnête possible entre le cinéaste que je suis et ces « sujets » auxquels je dois tout". 

À l'instar de ses précédents longs-métrages, Sollers Point se situe à Baltimore, ville dont est originaire le réalisateur Matthew Porterfield : "Malgré sa taille relativement petite et le fait que j’ai grandi ici, Baltimore détient pas mal de mystères et de quoi me surprendre. C’est une ville faite de quartiers, avec des distinctions claires en termes de race et de classe. Les quartiers sont si nombreux à avoir leur propre histoire et leur caractère distinctif, que je pense pouvoir passer ma vie à les explorer et les filmer, en ne faisant qu’en érafler la surface".

Ce besoin de filmer Baltimore remonte à ses débuts : "Je trouve Baltimore d’une grande beauté, l’été en particulier. Ces longues journées, ce soleil, cette chaleur étouffante et assourdissante, en suspension humide au-dessus des arbres et du béton. Ici, l’été est palpable. Mon premier film Hamilton (du nom du quartier où j’ai grandi) est né du désir d’imprimer ce lieu sur pellicule, d’en observer les détails, les attitudes, le temps qui passe, tout en évitant les conventions narratives qui exagèrent les conflits et qui réduisent les histoires à leur intrigue".

Sollers Point, est une enclave afro-américaine du sud-est de Baltimore, qui longe la côte ouest de la baie de Chesapeake. Fondée par la société de sidérurgie Bethlehem Steel en 1917, cette cité industrielle est confinée aux limites de ces terres escarpées. Pendant l’apogée de la sidérurgie, de la Grande Guerre aux années 50, Bethlehem Steel était le plus grand pourvoyeur d’emplois de l’Etat du Maryland. Mais dans les années 70-80, lorsque l’économie américaine s’est désintéressée de la production industrielle, des centaines de milliers d’emplois se sont volatilisés.

Dans le quartier de Sollers Point, déjà isolé de par sa situation géographique et son profil socio-économique (classe ouvrière, prédominance afro-américaine), la déchéance de la population est d’autant plus visible.

Pour le réalisateur, son film permet de s’intéresser à "une communauté abandonnée par l’industrie qui l’avait elle-même créée. J’espère ainsi pouvoir faire un film dont l’intimité n’aura d’égal que la force de ce contexte, et l’urgence qu’éprouvent ces gens à être réhabilités aux yeux du monde".

Sollers Point - Baltimore s'inspire d'anciens prisonniers réinsérés dans la société que le réalisateur a connus. Dans chacun de ses films, Matthew Porterfield s'intéresse à l'idée de communauté et de comment elle est liée à un lieu. N'ayant pas grandi dans le quartier décrit dans son film, le metteur en scène a dû effectuer des recherches : "Sollers Point fait partie du Comté de Baltimore, relativement à l’écart de la ville. Il est proche de l’ancien site de Bethlehem Steel, où a travaillé mon grand-père ; c’est le quartier de beaucoup d’ouvriers de la métallurgie et de leurs familles. La proximité de l’eau et de la tradition maritime sont des aspects de la vie de Baltimore que je n’avais pas explorés dans mes précédents films".

Habitué à faire lui-même le casting de ses films, Matthew Porterfield s'est entouré cette fois d'une directrice de casting professionnelle, Jessica Kelly. Elle s'est occupée de trouver avec son équipe une partie des rôles secondaires tandis que le réalisateur et Abby Hari, une ancienne étudiante, se sont occupés des autres seconds rôles. Quant à McCaul Lombardi qui tient le rôle principal, c'est par le biais de la productrice Alexandra Byer qu'il a rejoint l'aventure. Enfin, Jim Belushi est arrivé par l’intermédiaire d’un agent qui a adoré le scénario : "Il vient d’une famille ouvrière de Chicago, a un fils qui a presque le même âge que Keith et il recherche des projets intéressants avec lesquels il ait un lien", explique le réalisateur.