Le précédent film d'Antoine Desrosières, Haramiste, était une comédie de 40 minutes sortie en 2015, sur deux jeunes filles voilées prises entre l’étau des interdits et leurs désirs naissants (Inas Chanti et Souad Arsane étaient déjà au casting). "Haramiste montrait comment l’interdit provoque de la frustration, et À genoux les gars travaille sur la suite, ou comment la frustration conduit à la violence. La vie et la société forgent des (mauvaises) consciences avec ces étapes, nous, nous racontons comment des jeunes femmes apprennent à y résister, en cela c’est une comédie d’apprentissage à la résistance contre la culture dominante patriarcale. Les deux films ont en commun de finir en remettant en question le saint graal des interdits sexuels culturels ou religieux", raconte le réalisateur.
À genoux les gars est ponctué par plusieurs chansons yéyé. Le metteur en scène Antoine Desrosières explique ce choix : "Comme pour les acteurs/scénaristes, je me suis livré à un casting de centaines de chansons pour en choisir sept qui m’ont parues intemporelles du point de vue de certains thèmes : les abus des garçons, et les filles qui se défendent en affirmant leurs désirs. Deux chansons insistent fortement là-dessus : « Les garçons sont des brigands », chantée par Anne-Marie Vincent, une jeune fille de 17 ans, écrite par cette même jeune fille à l’époque, et « À genoux les gars ». Elles font parfaitement écho au film, qui, comme elles, est lui aussi le fruit d’un travail d’écriture de jeunes femmes de leurs temps."
Pour Antoine Desrosières, la présence de ces chansons doit être mise en parallèle avec le fait qu'à l'heure actuelle rien a changé depuis la révolution sexuelle de la fin des années 1960. Le cinéaste précise : "En allant chercher des chansons Yé-yé d’avant la révolution sexuelle de mai 68, je voulais faire un parallèle entre les interdits et désirs des jeunes femmes de cette époque et ceux des jeunes femmes dont nous parlons dans le film."
Même s'il aborde un sujet délicat, Antoine Desrosières a choisi la comédie plutôt que le drame. Le metteur en scène pense en effet que, par la comédie, un public pouvant se reconnaître dans le reflet négatif montré par le film peut davantage rire de lui-même. "Sans relativiser la dureté des faits, le rire ouvre une brèche dans le cerveau, cela le rend plus perméable à ce qu’on veut raconter", précise-t-il.
À genoux les gars possède la particularité suivante : les acteurs du film en sont devenus eux-mêmes les co-auteurs. Ainsi, avant le tournage, Antoine Desrosières a fait quatre mois de répétitions pendant lesquelles il a développé le scénario avec eux. "Deux mois durant lesquels on passe en revue toutes les situations du film en demandant aux acteurs de les développer en improvisations filmées, puis deux mois durant lesquelles les acteurs répètent sur les scènes qui ont été réécrites par Anne-Sophie Nanki et moi à partir de ces improvisations. C’est un travail nécessaire au dépassement du cliché. Car le but de ces quatre mois d’exercice est de faire exploser le stéréotype en permanence."
Pour Haramiste, Antoine Desrosières avait auditionné des centaines d’actrices avant de choisir Inas Chanti et Souad Arsane. Avec À genoux les gars, il a procédé de la même manière pour les trois comédiens masculins, qui ont été dénichés parmi quelques mille cinq cent prétendants. Le réalisateur développe : "Je ne faisais pas seulement un casting d’acteurs, mais aussi de coscénaristes. J’avais besoin qu’ils soient capables de m’offrir du matériel comique. Sur tous les candidats que nous avons vus, seuls m’intéressaient ceux ayant de l’imagination, capables de continuer l’improvisation plus d’une demi-heure. Ce n’est pas parce que c’est long que c’est bon, mais s’ils étaient capables de m’épater par leur impudeur, leur audace et leur drôlerie, je savais que ces gens ne pouvaient pas être bêtes."
Parallèlement à la sortie au cinéma de À genoux les gars, Antoine Desrosières va montrer sur YouTube une web série de 30 épisodes de 10mn diffusés entre juin et décembre 2018. "C’est, je le crois, plein d’intérêt : tout à fait inédit comme expérience, la série faisant connaître cet univers et ces personnages aux jeunes, adeptes des smartphones et tablettes, prioritaires pour notre propos. On compte bien que cette mise en lumière les attire en salles pour voir toute l’histoire d’un coup sans attendre décembre… Nous souhaitons ainsi que le film et la série créent une synergie positive qui profite aux deux", explique le cinéaste.