Diane a les épaules est le premier long métrage de Fabien Gorgeart et s'inscrit dans la lignée des courts métrages du réalisateur qui s'intéressent à la parentalité. Le Sens de l’orientation (2012) racontait ainsi l’histoire d’un homme, interprété par Fabrizio Rongione, qui n’avoue pas à sa petite amie sa stérilité et dans Un chien de ma chienne (id.), Clotilde Hesme incarnait une femme dont la soeur vit une interminable et épuisante grossesse.
"Diane a les épaules me permet d’approfondir cette thématique à travers une procréation décalée, un peu à part : une grossesse pour autrui… Nous vivons une époque où les territoires se redessinent au sein du couple, de la filiation, de l’appartenance au masculin ou au féminin. L’identité sexuelle n’est plus réduite aux catégories biologiques et les rapports de filiation s'affranchissent du modèle parental dit traditionnel. La société s’en trouve bousculée."
Pour interpréter Diane, Fabien Gorgeart a choisi Clotilde Hesme. La raison de ce choix est à mettre en parallèle avec le jeu à la fois grave et délicat, désinvolte et consciencieux de la comédienne. Le metteur en scène précise : "Clotilde est une actrice à la fois très technique, précise et capable d’un grand lâcher-prise. Dans une même séquence, elle peut être à la limite de l’expressionnisme, puis revenir à plus de naturel… Cela crée des ruptures, du décalage. Il m’était essentiel de m’amuser de toutes ces dynamiques opposées, à l’image de son corps, libre, indépendant, d’abord en mouvement mais très vite entravé par la grossesse."
Fabien Gorgeart voit le personnage de Diane interprété par Clotilde Hesme comme étant entre la femme sublime et l’ado dégingandée, totalement libre, n’appartenant à aucun genre précisément et je ne parle pas de genre sexué. "Elle est à mi-chemin entre une héroïne rohmérienne et le Lieutenant Ripley (Alien). C’est notre Sigourney Weaver !", confie le cinéaste.
Le personnage de Diane aborde sa grossesse comme un acte généreux. Dans un premier temps, le don qu'elle fait de son ventre est assimilé à une décision inconséquente et petit à petit, il ressemble à une mission, avec tout ce que cela suppose d’abnégation, voire de jusqu’au-boutisme et de volonté de donner un sens à ses actes. Fabien Gorgeart développe :
"Mais l’expérience que Diane va faire dépasse le don de soi puisqu’il s’agit à la fin de faire un don encore plus vertigineux : un don tout court… Celui de donner un enfant. Le neuvième mois est celui d’un post-partum singulier. Le vide et la mélancolie se mêlent au soulagement, et à la joie douloureuse d’avoir accompli quelque chose de surnaturel. Voilà pourquoi il était important d’inscrire à l’écran le décompte des mois de grossesse et de déjouer l’attente du terme. Je pouvais ainsi mettre en scène un accouchement après l’accouchement, celui d’une émotion, d’un lâcher-prise de Diane. Dans la scène finale, ce n’est plus dans son ventre que ça se joue mais sur son visage."