Pour fêter les 10 ans de Disneynature (né de l’impulsion donnée par Jean-François Camilleri après le succès critique et commercial de "La marche de l’empereur" de Luc Jacquet en 2004), quoi de mieux que "Blue" pour sensibiliser le public à un monde encore aujourd’hui chargé de mystères ? Pourtant, le concept n’est pas nouveau au sein de la firme aux petites oreilles rondes. En effet, les studios Disney ne font que renouer avec le documentaire animalier initié par… l’Oncle Walt en personne. Eh oui, le père de Mickey avait décidé de populariser quelques soixante-dix ans plus tôt le genre auprès du grand public par une première collection nommée "True-life adventures" dont les courts et longs métrages entamés par "L’île aux phoques" se sont vus primés par des Oscars à plusieurs reprises. Le grand Walt peut et doit être considéré comme un pionnier en la matière. Mais de ces années-là, on retiendra plutôt les films d’animation, lesquels vendaient des rêves à une population plus satisfaite de voir ses rêves d’enfant se matérialiser à l’écran que de se préoccuper du monde qui l’entourait (et l’entoure encore). Mais la situation de notre planète est devenue si préoccupante que le genre a fait bien plus que survivre : il s’est développé. Il n’y a qu’à voir le nombre de reportages proposés par les différentes chaînes de la TNT ou d’ailleurs. Mais rares sont ceux qui sont distribués dans les salles. "Blue" fait partie de ceux-là. Evidemment, le titre rappelle immanquablement les mers et océans qui recouvrent notre bonne vieille planète à hauteur de 70%, alors que le titre original est "Dolphins". L’ennuyeux avec le mot "Dolphins", c’est qu’on dirige le spectateur vers un spectacle entièrement dédié aux dauphins. Eh bien ce n’est pas tout à fait vrai, bien que ceux-ci occupent une grande part de ce documentaire. Alors je considère que "Blue", choisi pour la version française, est bien plus judicieux, même si ce nom commun a été attribué à un dauphin. On s’en accommode facilement en accordant au titre un double sens. La narration est distillée par la douce voix de Cécile de France, une actrice française que je n’attendais certainement pas là, et je ne dois pas être le seul. Seulement, saviez-vous qu’elle ne s’est pas contentée de prêter son timbre à la voix off ? Elle a aussi participé au tournage : elle a revêtu les combinaisons de plongée et est allée voir de près ce qui évolue sous la ligne d’eau, comme par exemple les raies géantes, animal fascinant par sa grâce mais pour lequel il convient de prendre quelques précautions. Alors comme emportée dans un tourbillon de bonheur qui restera à jamais gravé dans sa mémoire, elle invite le spectateur à « Plonger. Plonger dans le monde du silence et de la vie infinie. Plonger pour découvrir, comprendre, aimer un monde encore mystérieux ». Et il est vrai que ce monde fascine par ses couleurs, ses formes et ses sons, qu’ils soient merveilleux ou inquiétants. Bien qu’on ait l’impression d’avoir vu et revu ce genre de documentaire, on apprend des choses, comme le mode de vie de la squille multicolore ou les différentes techniques de chasse propres à chaque espèce. On y découvre une variété d’espèces foisonnante dans un vaste univers dénué de frontières, un monde chatoyant qui inspire la quiétude mais qui cache bien des dangers. Un monde à la fois enchanteur et impitoyable où les prédateurs des uns deviennent les proies des autres selon les règles établies par la chaîne alimentaire visant à garantir le nécessaire équilibre naturel d’un milieu complexe menacé par l’activité humaine. Eh oui, leur monde est notre monde. Du coup, les 77 minutes paraissent bien courtes. C’est avec regret que nous retrouvons l’air libre, après avoir eu le privilège (parce que ça en est un) de passer la quasi-intégralité du document sous l’eau. Mais au moins, nous avons hérité de très belles images, et il est vrai qu’on partage les propos de Cécile de France quand elle exprime son désir de « Plonger. Plonger une dernière fois avec la squille aux couleurs multiples et regard étrange, avec la sèche scintillante, envoûtante. […] Plonger avec ce dauphin qui joue un grand rôle dans le cycle de la vie. Plonger, plonger dans cet équilibre naturel et complexe, dans le monde secret des dauphins, des baleines et des récifs coralliens ». C’est tout à fait ça, à plus forte raison quand la musique toujours opportune donne un semblant de scénario à ce qui nous est raconté ici. Et comme pour dire que tout doit être révélé pour susciter une réelle prise de conscience, comme pour dire combien l’homme est tout petit dans cette immensité bleue à côté des mastodontes marins ou autres espèces toutes plus étonnantes que les autres, on nous gratifie même d’une sorte de making off en quelques images sur le générique de fin. Un seul regret : c’est que ça ne dure pas plus longtemps.