On a du mal croire, que c'est fait par le même auteur, qui a pondu le pétaradant Boogie Night, que par ailleurs j'adore. Toujours de la virtuosité et de la maitrise dans la mise en scène. Mais que de raffinement et de subtilité, dans ces discrètes images d'esthète. Une grande maturité. Presque de l'humilité. Le rythme est tranquille et millimétré, pas intensément passionnant. Surement à l'image de la vie austère et maniaque, que mène ce vieil artisan quasiment ascète. Pourtant, malgré la nonchalance de la narration, jusqu'au "twist" final, je n'ai pas vu passer les deux heures. Un film certes calme et tout en sobriété. Mais pas réellement ennuyeux. Un concept original. Une d'histoire d'amour romanesque et romantique, pourtant traité avec réalisme et froideur. Mais surtout, avec tension et suspens, comme un thriller psychologique, à travers une espèce de dramatique et dangereuse lutte de pouvoir. Le scénario joue avec notre cinéphilie des clichés, nous prenant régulièrement à contre-pied, lorsqu'on s'imagine face à des situations attendus.
Et cette idée de jouer la surprise, sur un duo de névroses qui se complètent, pour servir de base intime aux fondations d'un couple, jusqu'à la fin, je ne l'ai pas vu venir. Un homme du monde ultra sensible, immense artiste snob et narcissique, atteint d'un syndrome de Münchausen, qui rencontre son âme sœur dans sa muse du moment. Une belle prolo ingénu, ignorante, et un peu gauche. Mais aussi un peu sorcière, et qui apprend vite. Et qui développe un Münchausen par procuration, seulement pour lui plaire et par amour pour lui. Il fallait y penser. C'est plutôt tordu, malsain, et perverse. Mais très bien vu.
à l'époque de sa sortie en salle, on a loué les qualités d'interprétations de Daniel Day-Lewis dans ce film. J'en aurait fait tout autant, si ce n'est plus encore, pour celles de Vicky Krieps, qui restera pour moi, la découverte la plus épatante de ce malicieux film de grande classe. à voir au moins une fois. Pour ma part, ce film étant assez loin de ma cinéphilie habituelle, ça sera la seule. Bien que, au vu des nombreux non dits et détails floues de cette histoire, je reste persuadé qu'il ne soit pas inintéressant en deuxième lecture. Je connais des films qui cachent des indices, dans leurs flot soutenu d'image ou de dialogue, que l'on peut aisément louper par manque d'attention. Mais un film tellement économe et posé, qu'on en arrive à passer à coté d'importants détails d'intrigues, distrait par une fausse impression de banalité, c'est pour moi une première.