Le film est présenté en compétition au Festival de Cannes 2019.
Bacurau est co-réalisé par Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles. Il s'agit de la première réalisation de ce dernier qui a été chef décorateur sur les deux premiers longs métrages de Mendonça Filho, Les Bruits de Recife et Aquarius.
Les deux hommes ont eu l'idée de Bacurau en 2009, lors de la présentation du court métrage Recife Frio au Festival de Brasilia. En observant les disparités sociales au Brésil, les deux hommes ont eu envie de dépeindre une catégorie de la population méprisée qui se vengerait de ses oppresseurs. "Nous avons commencé à parler de l’idée d’un film qui se passerait dans un petit village isolé du Sertão, avec une seule rue, et des personnages nonurbains et formidables", se souvient Mendonça Filho. Il poursuit : "Puis sont arrivés les ovnis, l’idée que le village tire le meilleur parti de très peu de ressources, une atmosphère de western, une certaine douceur propre à cet endroit particulier, mais aussi de la violence graphique, et l’idée de tourner en format panoramique Panavision".
Bacurau a mis des années à voir le jour : Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles ont écrit le film ensemble pendant des mois, avant même que Les Bruits de Recife et Aquarius ne soient réalisés. "Et Bacurau était toujours là qui changeait et s’améliorait sans cesse. Ce long processus n’a pourtant pas été dramatique, il a pris le temps qu’il lui fallait", explique Mendonça Filho.
Bacurau se déroule dans un futur proche tout en mêlant l’archaïque et l’hypermoderne. "L’effet spécial le moins cher de tout le film est la phrase « dans quelques années » au tout début. Cela donne le ton en renvoyant au futur, de manière que le spectateur est à la recherche d’artefacts futuristes dans l’image. Il y en a quelques uns, mais très peu", explique Kleber Mendonça Filho. L'équipe a filmé le Nordeste (zone géographique du Brésil au climat semi-aride dont le nom renvoie à l’idée d’arrière-pays, de zone éloignée et inhabitée) tel qu'il était, en le retouchant à peine : "Aujourd’hui, on y trouve des vêtements et des technologies de masse chinois, des couleurs, une architecture et un accès à l’eau ou à l’internet qui font que cette région échappe à son image traditionnelle et aux clichés vehiculés par certains films et feuilletons télévisés. C’est très agréable de pouvoir montrer cette version moderne du Nordeste [...]".
L'équipe a utilisé des objectifs Panavision anamorphiques américains de la série C (années 1970) afin de donner un aspect industriel inhabituel pour le cinéma brésilien. Kleber Mendonça Filho revient sur ce choix esthétique : "Les distorsions optiques de ces objectifs spéciaux évoquent un souvenir de cinéma très familier (le cinéma américain), mais aussi tout à fait étranger (nous sommes des cinéastes brésiliens qui filment le Nordeste)".
Bacurau signifie en portugais engoulevent, un oiseau crépusculaire et nocturne qui se camoufle très bien quand il se repose sur une branche d'arbre. Juliano Dornelles dresse le parallèle entre l'animal et le village : "Il ne sera remarqué que s’il a lui-même envie d’apparaître. Le village de Bacurau se porte ainsi, il est intime du noir, il sait se cacher et attendre, et préfère même ne pas être aperçu".
Bacurau est un mélange des genres, dans lequel on retrouve de la science fiction, du western, du slasher movie et du film de cangaço, un genre typiquement brésilien très lié à l’imaginaire cinématographique du Sertão. Le cangaço a été une forme de banditisme social dans le Nordeste de la fin du XIXe siècle et début du XXe. Dans cette région aride où les inégalités sont fortes, de nombreux hommes et femmes sont devenus des bandits nomades, comme une forme de révolte à la domination des propriétaires terriens et du gouvernement. Le cinéma brésilien des années 1950 et 1960 a beaucoup exploré cette figure.
La musique de Bacurau est signée de deux frères, Mateus Alves et Tomaz Alves Souza. Kleber Mendonça Filho décrit leurs compositions comme un mélange entre le chanteur brésilien Geraldo Vandré, le compositeur de musique de films Jerry Goldsmith et de l'électronique. On entend par ailleurs la musique d'un autre réalisateur dans le film, comme le souligne Mendonça Filho : "Je ne cache pas non plus que ça a été un grand bonheur que de pouvoir payer les droits d’un morceau aussi puissant que Night de John Carpenter, un des cinéastes qui m’ont le plus donné envie de faire des films".