Ainsi donc, l'on tiendrait avec A beautiful Day le "Taxi Driver du XXIe siècle" ? Mais le film de Scorsese avait un scénario, lui, non ? Remarquez que le film de Lynne Ramsay a obtenu ce prix lors du dernier Festival de Cannes ! Du meilleur scénario, incroyable. Alors que si le jury avait choisi de récompenser la mise en scène, eh bien on n'aurait pu qu'acquiescer. Car même si la cinéaste écossaise a parfois la main lourde, elle poursuit dans sa veine de ses trois premiers films, notamment le terrible We need to talk about Kevin, dans une manière poisseuse, sauvage et radicale qui laisse admiratif (bon, ce n'est pas le cas pour ceux qui quittent la séance avant la fin et, d'une certaine façon, on les comprend). Pourtant la violence est pratiquement toujours hors champ dans A beautiful Day, hormis dans l'avant-dernière scène, pas des plus subtiles, il faut bien le dire. Pour le reste, et, on est obligé d'y revenir, faute d'un scénario digne de ce nom, le film ressemble à un exercice de style, assez souvent impressionnant, mais quand même assez vain, voire poseur dans ses plus mauvais moments. Néanmoins, Cannes a eu la bonne idée de donner un autre prix au film et celle-ci, honorant l'immense Joaquin Phoenix, est incontestable. Avec ou sans marteau, l'acteur délivre une nouvelle performance hors normes, prodigieuse de monstruosité. Le contrôle anti-dopage n'existe pas sur les plateaux de cinéma mais on le croit assez frappé pour jouer avec une telle intensité sans avoir besoin d'user de produits illicites. Son personnage n'arrête pas de se mettre martel en tête mais que dire alors de son interprète, de plus en plus impressionnant physiquement et que l'on verrait bien incarner bientôt le colonel Kurtz dans un remake d'Apocalypse now, que heureusement personne n'aura l'idée de faire.