Vous croyez bien connaître le tableau "Le jardin des délices" du peintre néerlandais Jérôme Bosch, vous allez voir le film, vous assistez à un débat "pointu" d'une durée de 1 heure et vous ressortez de la salle en en sachant certes beaucoup plus sur le dit tableau mais en vous disant qu'il reste une foultitude de zones d'ombre le concernant. Bizarre ? Pas tant que cela, car, plus de 500 ans après la "naissance" de ce tableau, les spécialistes se disputent encore sur un grand nombre de points. Déjà, pour commencer, on ne sait même pas quand, exactement, il a été peint, et son commanditaire est inconnu. Quant à Jérôme Bosch, 500 ans après sa mort, on n'a aucune certitude sur sa pratique religieuse, ce qui s'avère fort gênant lorsqu'il s'agit de donner un degré d'orthodoxie catholique à ce tableau. On sait qu'il a été membre de l'illustre confrérie de Notre-Dame, on ne sait pas s'il ne l'est pas devenu après avoir fait partie de la secte des adamites. Mais qu'importe, après tout, la tableau est impressionnant de beauté et de richesse et le film permet d'aller en voir tous les détails. Ce tableau a traversé les siècles et chaque période a pu le voir en fonction de l'esprit du moment. C'est ainsi que, parmi les intervenants, nombreux, qui sont interrogés sur la vision qu'ils ont du tableau, on entend dire, et ce n'est pas faux, que "Le jardin des délices", avec ces mutations qu'on observe chez les animaux, annonce le darwinisme, 350 ans à l'avance. C'est ainsi, que le Festival de Woodstock est mis en parallèle avec la partie centrale du triptyque. Quant aux rapprochements avec Salvador Dali et Gaudi, ils sont tout sauf étonnants. En fait, on voit dans ce tableau ce qu'on a en soi en matière de culture, de croyance, de traditions. Comme le dit Reindert Falkenburg, historien d'art et écrivain : « La plupart des gens se voient dans ce tableau. Lorsqu’on réalise que l’œuvre n’est que le reflet de nous-mêmes et que l’on regarde à l’intérieur, on se met à rêver. » Seuls deux petits regrets ternissent un peu (très peu !) ce film magnifique : un accompagnement musical trop présent, même si en font partie quelques pépites (Brel en flamand, Arvo Pärt, JS Bach) ; la présence d'un trop grand nombre d'intervenants pour commenter le tableau, ce qui donne, pour certains, des interventions trop courtes. C'est ainsi que si on entend Michel Onfray dire que "seul l’art a la capacité de rendre l’âme humaine réceptive au bien", on reste persuadé qu'il a dû dire bien d'autres choses, probablement très pertinentes, mais qui ont été coupées au montage. Dommage !