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    Maya
    Anecdotes, potins, actus, voire secrets inavouables autour de "Maya" et de son tournage !

    Mia passe la 6ème

    Maya est le 6ème long-métrage de Mia Hansen-Love, 37 ans : "Plus d’une fois, j’ai été saisie par l’aura des journalistes otages à leur libération. S’entremêlaient l’indicible de leur expérience, la souffrance endurée et la joie d’être libre. Par ailleurs, j’ai eu un grand-père (Paul Bonnecarrère, ndlr) correspondant de guerre, journaliste à Paris Match et auteur de livres de guerre. Il est mort jeune, je ne l’ai pas connu. Il n’a pas directement inspiré le personnage, mais sa figure m’a aidée dans l’écriture. Enfin, après avoir tourné deux fois avec Roman Kolinka [Eden et L'Avenir], je voulais le voir porter un rôle principal. Et j’ai pensé qu’au-delà de ses qualités de jeu, certains aspects de sa présence à l’image, comme une forme de pudeur, son charisme, sa dureté aussi, pourraient lui permettre de se glisser dans la peau d’un reporter de guerre."

    Inspiration papy

    Les récits familiaux sur le grand-père de Mia Hansen-Love, reporter de guerre pour Paris Match, ont influencé la cinéaste pour Maya : "Ma mère et ma grand-mère admiraient beaucoup mon grand-père, elles le décrivaient comme un homme très séduisant. La part romanesque, héroïque de ce métier m’attirait, bien sûr. Il y a chez les grands reporters un goût pour l’aventure, pour le mouvement, qui est aussi, d’une façon très différente, ce qui m’a poussée vers le cinéma. Outre les qualités caractéristiques du reporter de guerre – curiosité, indépendance, témérité…- ce qui me fascine, c’est le pragmatisme nécessaire, l’absence d’état d’âme face à des situations extrêmes, face à la violence, l’ambivalence morale que cela implique. Les grands reporters côtoient la mort comme s’ils voulaient flirter avec elle. C’est peut-être justement parce que je me trouve aux antipodes de ce rapport au monde que je voudrais essayer de le comprendre. Cela dit, le métier de reporter n’est que le point de départ du film. Ce que je regarde, avant tout, c’est une quête intérieure, la renaissance d’un homme après une épreuve."

    Documentation

    Parmi les lectures qui ont accompagné l’écriture du scénario de MayaMia Hansen-Love cite notamment La maison du retour (Jean-Paul Kauffmann). "Je pense aussi à mon souvenir ébloui des journaux de Dan Eldon (un photo-journaliste et artiste mort à 22 ans en Somalie), ou encore au sourire de Didier François à sa descente d’avion. Plus tard, j’ai rencontré deux reporters de guerre. L’un, Jonathan Alpeyrie, un journaliste franco-américain, fut otage en Syrie en 2013. Sa lecture a été précieuse, ainsi que le dialogue que j’ai eu avec Alfred de Montesquiou, un autre jeune journaliste, reporter à Paris-Match."

    Une rencontre miraculeuse

    La rencontre avec son héroïne, Maya, jouée par Aarshi Banerjee, a été miraculeuse selon Mia Hansen-Love. "Aarshi, qui vit à Bombay, n’avait jamais joué ; quand je l’ai rencontrée, elle avait 16 ans, vivait seule avec sa mère et semblait sortir de l’enfance. Je crois que je n’aurais pas pu faire le film sans elle. Je n’ai vu aucune autre fille qui, de près ou de loin, pouvait incarner Maya. Lumineuse, simple, profonde. La beauté d’Aarshi m’a d’autant plus séduite que je la trouve à la fois intemporelle et très contemporaine, tout en étant loin des canons de Bollywood. A la veille du tournage, je suis passée par un dernier mouvement d’écriture du scénario pendant lequel je me suis beaucoup rapprochée d’elle, pas en important de manière littérale des éléments de sa vie, mais en m’inspirant de sa langue, de sa liberté, de sa manière d’être au monde."

    Direction l'Inde

    Mia Hansen-Love avait déjà tourné à l’étranger, mais par petites touches : New York dans Eden, Vienne dans Tout est pardonné. Elle a posé ses caméras en Inde pour Maya :

    "L’Inde était à l’origine du projet, au même titre que la figure du grand reporter. J’avais été à Goa plusieurs années consécutives, et j’ai fini par m’interroger sur mon attirance pour ce pays. Après L’Avenir, j’avais besoin de partir loin de la France, de me confronter à un autre monde, avec les risques que cela comporte. C’est sans doute en cela que j’ai pu m’identifier à Gabriel. J’avais, moi aussi, besoin d’aller en Inde, d’y plonger vraiment, manière de fuir, mais aussi, peut-être, de me retrouver. L’Inde m’a paru être le pays avec lequel je pouvais trouver la bonne distance. Mes voyages passés m’ont aidée à filmer ces lieux en évitant l’exotisme. Goa est un ancien comptoir portugais, avec une architecture et une culture à part, et où cohabitent le catholicisme et l’hindouisme. C’est aujourd’hui une région considérée comme corrompue par le tourisme. Un paradis perdu, une utopie galvaudée, vendue. J’entends toujours dire que Goa n’est pas vraiment l’Inde. C’est un aspect que je voulais utiliser pour sortir d’une vision schématique de l’Inde, partagée entre splendeurs et misères, et tenter de filmer une Inde plus complexe, peut-être impure, mais contemporaine. Sans renier sa culture, l’Inde adopte la modernité à une vitesse fulgurante ; passé et futur se mélangent à tous les niveaux. J’espère que le film rend un peu compte de ça, notamment à travers Aarshi Banerjee (Maya), qui incarne à mes yeux magnifiquement l’Inde d’aujourd’hui. L’histoire avec Gabriel est une histoire d’amour, mais elle raconte aussi un rapprochement fragile entre deux cultures, deux mondes."

    Le Fleuve de Mia

    Maya emprunte au Fleuve de Renoir dans cette friction entre une exigence de mise en scène et un désir documentaire.

    "J'ai vu le film, mais pas avant de tourner. J’avais peut-être peur que le film m’écrase… Le Fleuve est une référence absolue pour un cinéaste français qui va en Inde. Mais il me semble qu’il y a malgré tout une forme de classicisme dans Le Fleuve, dont Maya est éloigné. Avant le tournage j’ai surtout vu ou revu des films de Satyajit Ray, en particulier la trilogie d’Apu, qui dresse le portrait d’un homme à trois âges de sa vie. C’est peut-être davantage la fragile enfance indienne, puis l’intériorité d’Apu adulte joué par Soumitra Chaterjee, un acteur merveilleux qu’on retrouve dans beaucoup de ses films, qui m’ont servi de boussole. Il y a une vérité à mes yeux indépassable dans le regard que Ray porte sur l’Inde rurale, une sensibilité bouleversante dans son regard sur l’enfance et quelque chose de profondément moderne dans sa manière d’associer la fiction, le romanesque, au précis documentaire."

    Séquence en Super 16

    Mia Hansen-Love a tenu à filmer une séquence du film en Super 16. Elle explique : "Il y a une vérité à mes yeux indépassable dans le faire le film qui le rendait possible sans renoncer à rien et notamment pas à la pellicule, irremplaçable pour le rendu des couleurs, pour capter la chaleur sensuelle de l’Inde. Il a fallu chaque jour redoubler d’énergie et trouver des solutions pour préserver à la fois notre liberté et nos ambitions. C’est par exemple ce qui nous a conduit à tourner en super 16 la séquence du voyage dans le voyage – lorsque Gabriel part en train à travers l’Inde. Pour réaliser cette partie du film, nous sommes partis à 4, enchaînant avions et trains du Bengale au Rajasthan, Roman Kolinka portait les caisses, Hélène Louvart la caméra, et moi, je m’occupais (mal) du son. Je ne voulais pas être acculée à certaines décisions formelles qui me seraient étrangères pour des raisons économiques, et le dialogue avec Hélène m’a permis de trouver un équilibre entre une légèreté de tournage et nos exigences de mise en scène."

    La place de la musique

    Maya est un des films les plus musicaux de Mia Hansen-Love, une bande-originale qui mélange des chansons indiennes inconnues à du classique et de la pop anglo-saxonne. "La musique compte beaucoup dans tous mes films, même si j’en utilise peu, puisqu’il s’agit presque toujours de musique de source. Comme Maya est mon film le plus romanesque, j’ai cru que ça faisait sens d’y associer pour la première fois un compositeur, mais au montage, le film résistait à cette idée. Les quelques chansons que j’avais en tête depuis le début ont donc pris une importance décisive. Le Lied de Schubert s’est imposé par le biais de Judith Chemla – elle en avait par le passé chanté une version réinventée en français, qui m’a inspirée ce choix. L’autre morceau qui m’a accompagnée dès le début, c’est “Distant Sky”de Nick Cave, qui donne la note du film et que j’ai mis à la fin. Ce morceau détenait l’émotion vers laquelle le récit tendrait. Les titres indiens se sont trouvés au fur et à mesure. J’aime beaucoup “Come Closer”, un tube disco de Bappi Lahiri que Gabriel entend en boîte de nuit et qui se prolonge jusqu’à son accident, un morceau envoûtant, qui devient presque mortifère ici."

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