C’est étonnant, le cinéma ! En quelques jours, il est possible de passer du meilleur au pire, de voir un chef d’œuvre de raffinement, d’intelligence et d’émotion comme « Cold War » de Pawel Pawlikowski et d’être submergé, peu de temps plus tard, par un film accablant de bêtise et de bassesse comme ce nouvel opus de Lars Von Trier. Il est vrai que je ne suis pas surpris car il y a longtemps que je n’attends plus rien de bon de ce cinéaste. Dès la sortie de « Breaking the waves » en 1996, j’avais été effaré par la suffisance crasse d’un réalisateur qui cherchait à donner de la noblesse à la stupide histoire des prétendus « sacrifices » d’une femme amoureuse. C’était idiot et, cependant, cela plaisait beaucoup à une partie de la critique. Et ainsi de suite, jusqu’aux combles de stupidité et d’ignominie que sont les derniers films du cinéaste danois : « Nymphomaniac » 1 et 2 et, aujourd’hui, « The House that Jack built ».
Chaque fois que sort un film de Lars Von Trier, je ne vais le voir que parce qu’il se trouve toujours des critiques pour en faire l’éloge et que je veux pouvoir écrire et répéter que je déteste ce cinéma-là. Il m’a donc fallu supporter, à nouveau, les inepties d’un cinéaste sans talent pendant les 2 heures et demi que dure ce film et, qui plus est, à côté d’une jeune spectatrice qui n’a pratiquement pas cessé de pleurer et de renifler tout au long de la projection. Je la comprends, cela dit, il y a de quoi pleurer, en effet, devant tant un tel déluge d’abjection.
La petite ruse du cinéaste, dont il s’était déjà servi pour « Nymphomaniac », c’est de donner à ses histoires répugnantes une apparence, un revêtement de profondeur, en mettant en scène une sorte de confesseur à qui se confie le malade (ici un tueur en série du nom de Jack, joué par Matt Dillon) et en étalant un semblant de culture censé faire illusion. Comme s’il suffisait d’intégrer au film des séquences d’archives montrant le pianiste Glen Gould et des tableaux de peintres (en particulier de William Blake) pour faire, en quelque sorte, passer la pilule des nombreuses scènes de violence horrifique que, par ailleurs, le cinéaste inflige aux spectateurs ! En vérité, comme toujours, Lars Von Trier essaie d’enrober l’inanité de sa pensée avec des faux-semblants de culture et de métaphores insignifiantes (comme celle, sidérante de banalité, de l’homme dont l’ombre grandit et diminue tandis qu’il marche sous des lampadaires !).
Mais le pire intervient à la fin du film lorsque le cinéaste ne se contente plus de confier à son personnage le soin de se référer à de grands artistes mais à Albert Speer en personne, l’architecte de Hitler, avant de délirer sur le nazisme et sur de multiples autocrates de sinistre mémoire. À ce sujet, dans une interview, Lars Von Trier affirme que, dorénavant, Hitler sera présent dans chacun de ses films ! Nous voilà prévenus !
Je ne ferai pas le détail de toutes les pédanteries, de toutes les niaiseries, de tous les partis pris (dont une exécrable et indécrottable misogynie) et de toutes les atrocités qu’impose malignement le cinéaste à ses spectateurs.
Le plus aberrant et le plus ridicule intervient probablement à la toute fin du film, lorsque le tueur en série est promené en enfer par son guide de l’ombre. J’imagine que cette séquence est censée donner du sens à un film atroce et ridicule à la fois. Mais, au lieu de produire de l’intelligence, elle ne fait que rajouter de l’incongruité à l’imbécillité abyssale du film ! Auparavant, le sinistre Jack, se prenant pour un nouveau Thomas de Quincey ne se contentant pas d’écrire mais passant à l’acte, avait parachevé son œuvre, faisant, lui aussi, « de l’assassinat un des beaux-arts » !
Terrifiante mise en scène imaginée par le plus pitoyable des cinéastes !