ARQ m'a fait mal au coeur. J'adore le cinéma, les voyages dans le temps, en somme les films de paradoxe temporels. Ici, même s'il était produit par Netflix et tenu par le frère de Stephen Amell, le film ne partait pas trop mal : mêler l'idée du bond dans le temps à un futur dystopique, un huis clos et des machinations idéologiques avait tout du scénario prometteur. Brasser autant de thèmes en un film est suffisamment audacieux pour en attendre un minimum.
Mais c'était oublier que c'est une production Netflix, et qu'ils ont pris Robbie Amell pour interpréter le rôle principal, lui qu'on n'aura qu'entre-aperçu dans les autres daubes DC de la CW. Alors on a pris Rachael Taylor pour l'épaulée, qu'on aura déjà aperçue dans quelques rôles de jolie femme combattive, entre Jessica Jones et autres Transformers. On se rend alors compte qu'il y a quelque chose qui cloche : ils sont trop lisses pour le concept du film.
Du coup, on les suit sans véritable entrain, on les observe interpréter mollement leurs rôles mal écrits, forcément modifiés pour rentrer dans les cases de l'amourette américaine à deux balles. Au milieu de trahisons d'un soir réparées par les répétitions d'une même soirée, Taylor joue ici le rôle de la petite traîtresse quand même gentille, qui ne pourra retenir ses hormones une fois perdue dans le regard inexpressif d'Amell (au moins meilleur acteur que son grand frère).
Elle le trahit, se rend compte de son erreur et tente de la réparer; exit les réflexions sur la loyauté, l'éthique et les intérêts personnels de Total Recall; ne pensons pas trop non plus à comment mieux monter les retour en arrière à la Edge of Tomorrow, ou mieux organiser l'évolution des mêmes personnages agissant différemment, comme dans L'Effet Papillon. Tout est simplifié pour livrer un divertissement un maximum linéaire et commun, qui ne sortira jamais des sentiers battus de peur de trop s'y perdre (reste la fin prévisible mais quand même pertinente, encore qu'on pourra toujours chercher à pinailler sur son côté happy end forcé, la fille se réveillant avec ses souvenirs laissant clairement penser qu'ils parviendront à modifier les choses prochainement).
Tout ce qu'on peut espérer, c'est que cette conclusion ouverte ne présage aucune suite, le reste n'étant pas plus trépidant; tout ici est linéaire, et c'est pour cela, je pense, qu'ARQ passe à côté de son sujet. Au moment où le but était de nous proposer une histoire en poupée russe, où chaque évènement serait revécu différemment, sans cesse, en se donnant, notamment par le montage, un ressenti suffoquant et effréné (Edge of Tomorrow, recitons le, reste une référence dans le genre), Arc se contente de livrer une vague histoire de complot inintéressante, déjà vue ailleurs en mieux, sans même jouer avec l'architecture de son intérieur d'appartement pour étoffer son huis-clos sans grand souffle.
C'est que sa mise en scène ne sait pas comment s'articuler autour de son histoire : alors elle la suit mollement en y ajoutant quelques effets clipesques de dtv, caméra à l'épaule pour y donner quelque tension dramatique supplémentaire. C'est là qu'on en vient à moins suivre le film, à se soucier finalement très peu de ces personnages dont on ne sait pas grand chose, si ce n'est qu'ils sont physiquement aussi lisses que ce qu'ils sont psychologiquement vides.
Cela reste un petit divertissement pas trop mauvais, qui tente des choses par sa conclusion et quelques réflexions sur l'utilité de sa sacrifier constamment, mais il évoque tellement mal ses thèmes qu'il passe à côté de son principal : le ressenti que l'on peut avoir au moment de mourir et de se réveiller directement ensuite. Il n'est même pas fait une mention à ce propos, les personnages prenant cela comme un respawn de jeu vidéo promettant qu'ils feront un meilleur score la fois suivante.
Arc, tout aussi vide soit-il, n'est cependant pas un mauvais film; il est juste plat, sans grande émotion, fade. Sa photographie le résume plutôt bien : grisâtre, elle ne transmet aucun moment de beauté, d'émotion, de lyrisme. Reste le faux bordel transmit par le scénario, qui s'il se perd quelques fois, reste cohérent et amuse en tentant de se rendre plus complexe que ce qu'il n'est.
Une nouvelle fois, Netflix prouve que leur catalogue de productions cinématographiques originales est bien pauvre.