Le cinéaste israélo-américain Udi Aloni, né en 1959, est très engagé pour la cause palestinienne et se révèle très virulent contre les dirigeants de l'Etat d'Israël, ce qui en fait un personnage très controversé, notamment dans son pays. Le metteur en scène a toujours prôné la réconciliation entre Juifs et Palestiniens dans ses oeuvres, notamment Forgiveness en 2006.
Jonction 48, qui raconte le parcours d'un rappeur palestinien dans la ville mixte de Lod, a fait polémique lors du 66ème Festival de Berlin. Le film, qui a remporté par ailleurs le prix Panorama du public pour le Meilleur film de fiction, a défrayé la chronique grâce à son réalisateur américano-israélien, Udi Aloni. En effet, ce dernier a dénoncé à la tribune la collaboration de l'Allemagne avec ce qu'il estime être le régime fasciste israélien, coupable d'atrocités envers le peuple palestinien. Ces accusations ont soulevé un tollé dans son pays. Le cinéaste a été contraint de préciser qu'il s'élevait contre les dirigeants israéliens et non contre son pays qu'il aime. Selon lui, le Premier ministre Benjamin Netanyahu appelle à la haine en toute impunité.
Le personnage principal du film, Kareem, est interprété par le rappeur palestinien Tamer Nafar. Ce dernier est également le co-scénariste du film avec Oren Moverman. Le film est inspiré de sa vie. Le réalisateur Udi Aloni a rencontré Tamer Nafar en 2002, lors du tournage de Local Angel, dans lequel le jeune homme apparaît avec son groupe. Devenus amis, les deux hommes ont collaboré sur plusieurs films avant Jonction 48 (Forgiveness, Art/violence).Deux autres rappeurs figurent également au casting, avec des noms et histoires différents.
La ville israélienne de Lod était autrefois à la cité palestinienne de Lyd. En 1948, les Palestiniens ont dû laisser place aux Israéliens ; encore aujourd'hui, la ville est mixte de ces deux populations. Les citoyens palestiniens d’Israël sont souvent désignés comme "Palestiniens de 48", d'où le titre du film.
Le tournage de Jonction 48 s'est partagé entre Lyd et la ville palestinienne de Jaffa, où une vieille maison a été entièrement transformée en studio de cinéma par le chef décorateur Salim Shehade. "Il a également transformé différentes pièces de la maison pour en faire un lieu de rencontre entre communistes (la salle où se produisent les parents), une salle de concert (pour les performances de hip-hop), une cache de dealers, et même un poste de police", précise le réalisateur Udi Aloni.
Udi Aloni a choisi les acteurs de Jonction 48 dans son propre entourage. "Pour certains, comme Salwa Naqara, qui joue la mère, il s’agit de collègues, pour d’autres, d’étudiants, comme Ayed Fadel et Maryam Abu Khaled. En complétant l’équipe, nous avions conscience de créer une communauté vouée à être liée dans l’avenir", déclare-t-il. Samar Qupty était également une étudiante du cinéaste, dont il devait superviser le scénario tandis qu'elle devait l'assister à la réalisation. La jeune femme s'est identifiée au personnage et a convaincu Udi Aloni de lui faire passer une audition. Pour être sûr de son choix, il a attendu encore un mois pour s'assurer de sa compaatibilité amicale avec Tamer Nafar.
Udi Aloni dédie Jonction 48 à sa mère Shulamit Aloni, une femme politique décédée en 2014. C'est encore le réalisateur qui en parle le mieux : "Shulamit Aloni était une femme exceptionnelle qui s’est battue toute sa vie pour améliorer la situation en Israël et en Palestine. Tout ce que je sais de la lutte pour la justice et les droits de l’Homme, c’est elle qui me l’a appris. C’est elle qui a obtenu la dépénalisation de l’homosexualité en Israël. Elle a aussi mis les débats féministes sur le devant de la scène. Elle s’est battue pour les droits des Palestiniens comme aucun sioniste avant elle. J’espère que ce film contribuera à faire vivre son héritage".