Notre beau pays qu’est la France a beau être un pays évolué (quoique des fois on se le demande...), la misère gagne peu à peu nos rues. La preuve réside en le fait que de plus en plus de gens vivent en-dessous du seuil de pauvreté, confirmée par une dernière évaluation qui fait état de 9 millions de personnes… Alarmant ! Et personne n’est épargné : des retraités, des adultes, mais aussi des enfants ! Pour aider ces gens-là, des organisations ont été créées avec la mise en place de structures d’accueil. L’intention est là, fort louable, mais pas toujours adaptée aux différentes situations en raison de règles préétablies, des règles souvent bien trop rigides. C’est ce dont le téléfilm d‘Arnaud Sélignac vient nous parler, en proposant une réflexion sur la façon dont l’Etat doit aider et protéger les enfants plongés dans la misère. "Box 27" raconte avec une éblouissante sobriété que chaque cas est un cas à part. "Box 27" est l’histoire de Vincent, veuf et sans emploi fixe, profondément attaché à son fiston de 10 ans, Tom. Entre eux, la relation est fusionnelle. Malgré la précarité de leur situation aux conditions de vie difficiles, ils sont heureux et s’accommodent de leur sort tant bien que mal en attendant des jours meilleurs, nichés dans un garage d’un parking souterrain. Qu’à cela ne tienne, il n’y a pas de problème, mais que des solutions. Ainsi, ils pallient comme ils peuvent au fait que leur habitat ne soit pas équipé d’eau courante ni d’électricité. Pour le reste, je vous laisse le découvrir… Je concède que le thème n’est pas nouveau. Il est même souvent casse-gueule pour la bonne et simple raison qu’on cherche souvent à exagérer le côté émotionnel en appuyant trop sur le misérabilisme, à tel point que ça tombe parfois dans la caricature. Là, non. Les deux scénaristes ont su trouver le ton juste, sans pirouette scénaristique, tandis que le réalisateur a su éviter les effets faciles qui auraient pu engendrer un insupportable pathos. Bien sûr que toute personne humaine se dit qu’on ne peut laisser un enfant vivre dans ces conditions, même s’il est bercé par l’amour d’un père entièrement dévoué. Mais on se surprend à désirer plus que tout au monde à les laisser tranquilles, parce que le gamin est parfaitement équilibré. "Box 27" réussit à faire adhérer le spectateur à la cause du maintien de cet équilibre parfait à la fois solide et fragile entre ce père et son enfant. Au passage, on notera qu’on n’a pas besoin de grand-chose pour être bien : la télévision, les consoles de jeux... tout cela est assez futile en fin de compte ! Le spectateur succombera au superbe jeu d’acteurs. Eric Elmosnino est MO-NU-MEN-TAL !! Il donne à son personnage une humanité bouleversante en parvenant à exprimer l’amour inconditionnel pour son fils par une attention de tous les instants, mais aussi à nous faire ressentir d’abord la méfiance quand il est confronté pour la première fois aux services sociaux, ensuite l’immense détresse de son personnage avec son regard qui se perd dans le vide devant la perspective de ce qui peut lui arriver de pire, c’est-à-dire la séparation. Impossible de rester insensible à ses craintes viscérales. Impossible de rester insensible au mutisme dans lequel Tom se réfugie. Impossible de rester insensible devant l’entêtement de Vincent à garder le cap avec les moyens du bord. Impossible de rester insensible quand il prend connaissance du message salvateur. Eric Elmosnino est au meilleur de son talent, justement récompensé par le Prix de la meilleure interprétation masculine au Festival de la fiction TV de La Rochelle en 2016. A travers son personnage, on sent vraiment la documentation approfondie pour en faire le portrait d’un homme à la dérive. Marius Blivet montre également une finesse dans son jeu en ayant su garder le naturel de l’enfance, comme s’il avait compris la gravité du sujet, ou comme s’il avait connu ce genre de situation. Bravo ! Par ailleurs, on ne restera pas insensible non plus à l’élan de solidarité qui se crée. Certes c’est devenu rare en ces temps de développement de l’individualisme, mais ça existe encore ! La preuve avec Juliette, interprétée avec beaucoup de subtilité par Natalia Dontcheva. Quant à Zabou Breitman, elle rend comme à son habitude une copie propre en assistante sociale qui a une conscience et qui veut bousculer les règles parce qu’il y a des choses impalpables à prendre en compte. La mise en scène est sobre et efficace, naturelle, et même si l’histoire s’était basée sur une histoire vraie, on n’aurait pas vu la différence. Le naturel se retrouve également dans les dialogues, parmi lesquels ont été aménagés des silences pourtant lourds de sens, laissant alors libre cours à l’expression scénique, au langage corporel. Pour parachever ce commentaire, il faut parler aussi de la musique de Fabrice Aboulker (récompensé par le prix de la meilleure musique lors du festival de La Rochelle) qui vient appuyer les plans silencieux, qui renforce le drame de la situation. Les notes sont discrètes, mais se font remarquer car elles participent elles aussi à ce témoignage poignant qui devraient vous tirer quelques larmes et vous nouer la gorge. "Box 27" a bien mérité ses récompenses à La Rochelle, y compris le Prix spécial du Jury. A découvrir absolument ou à revoir sur le replay de France 2 jusqu’au 8 février 2017.