Folles de joie a été sélectionné en Compétition officielle dans la section de la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes 2016. C'est la première fois que le metteur en scène italien Paolo Virzì foule le tapis rouge cannois après plus de 20 ans de carrière et une douzaine de films.
C'est la seconde fois que Valeria Bruni-Tedeschi travaille avec le réalisateur italien Paolo Virzi après Les Opportunistes, sorti en 2014.
Folles de joie a été tourné à Livourne, Viareggio et Montecatini aux mois de mai et juin 2015. L'institut psychiatrique présent dans le film, La Villa Biondi, a été créé pour le film à partir des différents éléments recueillis par Paolo Virzi lors de ses repérages : "Nous avons visité des endroits décourageants, où les patients étaient traités de manière expéditive : placés sous sédatifs, attachés par des lanières, ou oubliés. Mais nous avons aussi découvert des endroits très beaux chargés d’énergie, où on essaie de mettre en place des projets de réinsertions, qui vont au-delà de la surveillance, où il fait bon vivre. Surtout, nous avons rencontré beaucoup de médecins, psychiatres, psychothérapeutes, personnel paramédical, bénévoles et motivés, compétents et passionnés, dont le dévouement était total et touchant, malgré une carence en structures et en personnel adéquat. Nous avons créé la Villa Biondi en nous inspirant d’éléments observés sur les collines de Pistoia, dans les pépinières, où travaillent des personnes venant d’un centre comme celui-ci.", confie le metteur en scène.
Paolo Virzi a eu l'idée de réunir Valeria Bruni Tedeschi et Micaela Ramazzotti pour Folles de joie lors du tournage de son précédent film, Les Opportunistes, dans lequel il dirigeait déjà la comédienne franco-italienne. Il relate une anecdote à ce sujet : "Micaela était venue en visite, le jour de mon anniversaire. Je tournais la dernière prise avant la pause déjeuner. Et je vois justement sur le terrain où se trouvaient les mobile-homes des acteurs et de la production, Valeria emmenant Micaela vers le chapiteau du traiteur, la première portant une robe dorée et élégante, trottinant sur ses talons, tandis que l’autre la suivait péniblement, avec un mélange, m’a-t-il semblé, de confi ance et d’effarement. Et à un moment, comme le terrain était inaccessible et détrempé par la neige fondue, Valeria a tendu la main vers Micaela pour l’aider. C’est à cet instant que j’ai eu une envie soudaine de pointer la caméra vers ces deux fi lles intrigantes, très belles, drôles et peut-être un peu folles."
De par son pitch (deux femmes s'enfuient d'un institut psychiatrique), Folles de joie rappelle le film de Howard Zieff, Une journée de fous, sorti en 1989. Dans ce long-métrage, un groupe de patients (mené par Michael Keaton) d'un hôpital psychiatrique prend la fuite dans New York.
Avant de se lancer dans l'écriture du scénario, le cinéaste Paolo Virzi et sa co-scénariste Francesca Archibugi, ont fait un gros travail de documentation, notamment auprès de psychiatres et de patients : "Nous avons commencé par interroger de vrais psychiatres et psychothérapeutes et leurs avons demandé de nous accompagner dans le monde des structures cliniques. Nous avons rencontré toutes sortes de patients : catatoniques, hystériques, mélancoliques, importuns, paranoïaques, prolixes. Et j’ajouterais: comme dans la vie de tous les jours. Parmi eux, il y avait aussi des personnes que les institutions, les juges, les services sociaux avaient jugées dangereuses car elles avaient commis des délits et risquaient un internement dans des hôpitaux psychiatriques judiciaires. Nous y avons rencontré bon nombre de Beatrice et de Donatella", indique le réalisateur.
Pour aborder son rôle, Valeria Bruni Tedeschi s'est notamment inspirée de Blanche DuBois, un des personnages principaux d'Un tramway nommé Désir, la pièce écrite par Tennessee Williams : "J’ai beaucoup pensé à Blanche DuBois, au personnage en soi, à sa fragilité, à sa solitude, à sa manière de sortir de la douleur, de s’en protéger par la folie. J’ai éprouvé physiquement comment la folie protège de la douleur, comment l’imagination et la folie, qui chez elles vont ensemble, la préservent de la douleur insupportable et de la solitude. Quand un personnage comme celui de Beatrice est aussi bien écrit, si complet et si parfait – parce qu’il contient toutes les guerres intérieures, les dynamiques, les motivations, les besoins, les actions, les rêves – alors pour un acteur tout est plus facile", confie la comédienne.
Micaela Ramazzotti revient sur le travail sur son personnage de Donatella et sa collaboration avec de vrais patients : "Je me suis plongée dans des textes médicaux, mais j’avais l’impression de tomber dans un puits sans fond. J’ai surtout cherché à mettre au point l’histoire de Donatella, son rapport avec des parents qui l’ont méprisée ou ignorée, sa nature réservée, sa personnalité méfi ante, blessée utilisant avec peine un vocabulaire de quelques mots, ses pulsions d’autodestruction et d’automutilation, ayant subi des injustices toute sa vie durant. (...) Ensuite, avec Valeria, Paolo et Valentina Carnelutti, qui interprète Fiamma, la psychiatre, nous avons visité aussi la Maieusis à Porta Capena, un centre plus comparable à celui dont nous parlons dans Folles de joie, autrement dit une villa à la campagne, avec un jardin, des graffi tis pleins de couleurs, où les patients aux troubles mentaux très graves suivent des thérapies pour se réinsérer. (...) La rencontre avec les patients a été une expérience très intense."
Pour rendre compte d'une certaine mélancolie, Paolo Virzi a tenu à tourner certaines scènes durant le crépuscule : "Paolo a souvent cherché la lumière entre le jour et la nuit, pour donner un air romanesque mais aussi une idée de la peur des personnages, le crépuscule et l’aube font naître un sentiment de beauté et de déchirement en même temps. Nous avons vécu ces différentes phases crépusculaires durant le fi lm, avec toute la troupe, qui pouvait donner l’impression d’un groupe de patients en cure, et ce fi lm nous a peut-être appris à tous à accepter notre propre côté psychopathologique, les troubles que nous portons en nous et qui nous tiennent compagnie", explique Micaela Ramazzotti.