Votre avis sur La Favorite ?
4,5
Publiée le 4 février 2019
Et un film en costumes pour Yorgos Lanthimos. Ceux qui s'attendent à ce que le cinéaste grec dépoussière l'histoire anglaise ne seront pas déçus. La favorite est à peine moins radical que Canines ou The Lobster mais comme il est fidèle, dans les grandes lignes, à l'histoire du règne d'Anne d'Angleterre, le film marque un renouvellement bienvenu dans la carrière du réalisateur. La favorite raconte la guerre farouche qui opposa la favorite de la reine à sa cousine, qui n'avait pas d'autre objectif que de la supplanter, quitte à utiliser les plus basses manoeuvres pour y parvenir. C'est à un combat de garces (c'est le terme le moins trivial que l'on puisse utiliser) auquel le spectateur est invité à assister avec moult injures et actes d'une moralité douteuse. En même temps, c'est une lutte politique sans merci qui s'engage puisque ces femmes influencent voire dirigent toute la diplomatie anglaise de l'époque, dans le contexte d'une guerre contre la France (nous sommes au début du XVIIIe siècle) et de l'opposition entre Whigs et Tories. Une cour des grandes où tous les coups sont permis et les hommes des objets que ces dames traitent selon leur bon vouloir. Ceux qui n'aiment pas le cinéma de Lanthimos trouveront sans doute le film vulgaire et outrancier dans sa vision historique. Mais cela fait intégralement partie du plaisir de ce long-métrage, qui est aussi une farce grotesque, réalisé avec une maîtrise et une virtuosité stupéfiantes. Le trio d'actrices est dément : Olivia Colman en souveraine infantile, entourée de sa cohorte de lapins ; Rachel Weisz en maîtresse de la reine, cruelle et arrogante ; Emma Stone en arriviste forcenée et manipulatrice. Cette dernière, à mille lieux de La La Land, domine la distribution en incarnant son personnage avec une délectation manifeste.
4,0
Publiée le 22 février 2019
Yorgos Lantimos qui va se risquer dans un drame historique à la cour d’Anne Stuart ? J’avoue que ça m’a mis la puce à l’oreille. Je me demandais comment l’auteur grec allait pouvoir exprimer son esprit farfelu dans un genre cinématographique aussi codifié. Eh bien – surprise – le bon Yorgos a décidé de s’assagir un peu pour mieux faire coïncider ces deux univers : celui d’Anne Stuart et le sien. Ainsi se retrouve-t-on avec une intrigue assez classique de conspiration de palais et de lutte d’influence mais le tout est clairement imprégné d’une espièglerie, aussi bien dans la forme que dans le fond, qui sait apporter le souffle (et le souffre) nécessaire pour dynamiser le tout. On sent dans la réalisation de Lanthimos l’envie de malmener ses personnages en même temps que de les prendre en pitié. Les lieux et les codes sociaux sont clairement des entraves qui oppriment ces hommes et ces femmes, les poussant régulièrement à l’absurde, au ridicule ou au vice. Aussi, chercher de l’humanité dans ce monde de fou revient à s’exposer. Et ceux (et surtout celles) qui savent jouer de ces faiblesses deviennent les rois et les reines de ce théâtre (politique) de l’absurde. Et avec cette fresque historique Lantimos sait donc se montrer sage, il n’en reste pas moins juste. Par des lentilles de très grand angle il parvient à la fois à apporter une distorsion des lignes suggérant une certaine oppression par le lieu, autant qu’il parvient à apporter de la vitesse et du dynamisme dans la plupart des dépassements opérés. Tout ceci ne traduit que d’autant mieux toutes ces tensions refoulées par chacun, puissant moteur des uns comme des autres. Et j’avoue que j’admire d’autant plus la mesure que l’auteur a su mettre dans son œuvre qu’il est parvenu à insuffler une vraie tension sexuelle aussi malaisante qu’elle est liée à chaque fois à des rapports de pouvoir, de domination et de manipulation, mais tout en sachant s’arrêter là où il faut, sans sombrer dans une sorte de racolage malsain. Bien évidemment, si l’exercice fonctionne aussi bien, c’est aussi parce que l’ami Yourgos a su réunir de l’autre côté de la caméra un trio Weiz / Watson / (et surtout) Colman remarquable d’efficacité. Alors après, certes, cela reste malgré tout, dans l’ensemble, assez classique aussi bien dans le propos que dans la démarche globale, mais ne serait-ce que pour ce dynamisme de forme et l’efficacité de l’interprétation, je dois bien le reconnaitre : j’ai été conquis. Donc bravo Yorgos ! Mais bon, après ça ne reste que mon point de vue. Donc si vous n’êtes pas d’accord et que vous voulez qu’on en discute, n’hésitez pas et venez me retrouver sur lhommegrenouille.over-blog.com. Parce que le débat, moi j’aime ça… ;-)
4,0
Publiée le 7 février 2019
Anne (Olivia Colman) est reine d'Angleterre dans les premières années du dix-huitième siècle. Malade de la goutte, cyclothymique, gloutonne, elle ne prête guère d'attention aux affaires du royaume, notamment à la guerre qui fait rage avec la France, et en a délégué la charge à sa favorite, Lady Sarah (Rachel Weisz).
Cousine de Lady Sarah, Abigail Hill (Emma Stone) a été réduite par les revers de fortune de son père à s'employer comme servante à la Cour. Mais grâce à une concoction d'herbes qu'elle prépare pour apaiser la goutte de la reine, la jeune femme entrevoit la possibilité de s'attirer ses grâces et de retrouver son rang.

"La Favorite" déboule sur nos écrans précédé d'une flatteuse réputation. La critique l'encense - à l'exception de "Libération" ("un barbouillis d’images qui s’affaissent sous leur propre poids") et des "Inrocks" ("Prostré derrière sa malice dont il se gargarise grassement, [le cinéma de Lánthimos] semble condamné à rester éternellement englué dans l’admiration de son propre génie"), qui prennent méchamment le contrepied de leurs confrères . Le film a raflé une moisson de récompenses à la "Mostra" de Venise et aux "Golden Globes" en attendant sa probable consécration aux "Oscars" dans quinze jours.

Yórgos Lánthimos est un jeune réalisateur grec surdoué qui, à l'instar d'un Alfonso Cuarón, d'un Denis Villeneuve ou d'un Alejandro Iñárritu, après avoir fait ses premières armes dans son pays ("Canine" en 2009, "Alps" en 2011), a tapé dans l’œil des studios hollywoodiens ("The Lobster" en 2015, "Mise à mort du cerf sacré" en 2017). Dès les premières images, on reconnaît sa patte. L'image est particulièrement soignée, qui nous plonge dans le même état de confusion que la reine malade : longs travelings, très larges objectifs, effets "fish-eye" refus du champ-contrechamp rapetissent les personnages, les isolent dans des espaces immenses, tordent les lignes droites. La bande son est tout aussi intrigante, mélange de musique baroque et sérielle.

"La Favorite" est un titre singulier pour un film pluriel. Il met en scène trois femmes : une reine et deux favorites. Des trois actrices, il est difficile de distinguer la meilleure. Qu'Olivia Colman soit en lice pour l'oscar du meilleur rôle et les deux autres pour celui du meilleur second rôle n'a guère de sens. Bien entendu, c'est pour Emma Stone que j'ai les yeux de Chimène (la bisexualité des personnages m'autorisant cette audacieuse métaphore). Elle joue à merveille la jeune ingénue, moins naïve qu'il n'y paraît. Mais force m'est de saluer aussi la maîtrise de Rachel Weisz, impériale de froideur, de beauté et de rage.

"La Favorite" a la cruauté sadique des "Liaisons dangereuses", l'ironie flamboyante de "Amadeus", la sophistication baroque de "Meurtres dans un jardin anglais". Un chef d’œuvre.
4,5
Publiée le 22 octobre 2018
Après les déconcertants « The Lobster » et « Mise à Mort du Cerf Sacré », le cinéaste grec revient avec une nouvelle fable d’humour dérangeante. « La Favorite » est un film à costume qui se situe dans l’Angleterre du XVIIIème siècle. La reine Anne, OIivia Colman, a la santé fragile et délègue la gestion du pays à son amie Lady Sarah, Rachel Weisz. Un jour Abigail Hill, une nouvelle servante arrive, Emma Stone. Elle est alors prise sous l’aile de Lady Sarah pensant faire d’elle une alliée. Mais la servante voit une occasion de retrouver son titre de Lady et va dangereusement se rapprocher de la reine. Entre situations extrêmement loufoques et mise en scène anxiogène, le film ne nous emmène jamais dans la direction attendue. Il fallait pourtant se douter qu’avec Yórgos Lánthimos aux commandes, le film ne serait pas qu’une simple querelle de titres. Le cinéaste nous fait douter chaque minute sur la méfiance à avoir entre la manipulatrice ou la vipère. Est-ce l’amour et la vérité qui triomphe ou le mensonge et la fourberie ? Les actrices sont sidérantes tellement elles habitent leur personnage avec conviction. Les acteurs secondaires comme Nicolas Hoult apportent également une valeur à cette histoire imprévue, déroutante et jubilatoire.
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4,5
Publiée le 21 décembre 2018
Yorgos Lanthimos était un réalisateur prometteur. Et il confirme ici avec panache et fracas. Ce grec avait surpris son monde avec ses premiers films aux scénarios complètement azimutés de « Canine », où une famille élève ses enfants complètement coupés du monde en leur inculquant des noms pour chaque chose complètement opposés à leur réelle dénomination, à l’excellent « The Lobster », où des célibataires sont envoyés dans un hôtel et doivent trouver l’âme sœur sous peine d’être transformés en animal (!). Mais, aussi étranges soient-ils, ses films ont un sens et s’avèrent maîtrisés de bout en bout. Seul son précédent, le pédant et soporifique « Mise à mort du cerf sacré », nous avait laissé sur le bas-côté. Ici, le cinéaste grec désormais le plus connu à l’international monte encore en gamme et en budget et s’assagit en apparence avec un film d’époque haute couture. Plus accessible que ces précédents (il adapte pour la première fois un scénario qui n’est pas de son cru), son relatif conformisme n’en est pas moins de façade tant cette oeuvre bouscule les conventions du film en costumes et se place instantanément comme son meilleur film.

Proche du chef-d’œuvre, « La Favorite » est un jeu de massacre méchamment déjanté où les joutes verbales et les scènes impertinentes s’enchaînent à un rythme effréné à tel point qu’on en redemande encore et encore. Loin, très loin du classique film d’époque, le réalisateur s’accapare une période de l’histoire anglaise et des personnages ayant réellement existé mais les broie à sa sauce, une mayonnaise absolument délicieuse faite de scènes incongrues, d’humour très noir voire loufoque (mais qui fait constamment mouche) et de propos osés et fortement féministes (les hommes en sont réduits à de simples figurants, hormis Nicholas Hoult plus pimpant… et féminin que jamais !). Il s’est entouré d’un trio d’actrices exceptionnelles pour un espèce de ménage à trois haut en couleurs dont on ne sait jamais vraiment s’il ressort du triangle amoureux lesbien ou d’une guerre de tranchées en corsets. Il serait d’ailleurs difficile de les départager tant elles excellent toutes les trois en (au choix) perfidie, malice, bêtise ou encore opportunisme. On connaissait déjà bien les qualités de Rachel Weisz (encore une fois royale) et Emma Stone (de mieux en mieux c’est dire…) mais c’est la moins connue Olivia Colman en reine malade et niaise qui emporte le morceau et les meilleures répliques. Si un prix d’interprétation commun existait aux Oscars, il faudrait le leur donner !

Mais outre une histoire qui se suit avec appétit comme une sitcom de cinéma d’auteur en accéléré de (très) haute qualité et une interprétation de haut vol, « La Favorite » se distingue également par une direction artistique très raffinée où les décors et les costumes sont tout aussi soignés que les dialogues. De plus, Lanthimos, pour ne pas faire comme tout le monde mais sans que cela soit un choix pour se faire remarquer, filme ses personnages avec des plans alambiqués qui semblent les enfermer dans une espèce de sérénade, d’univers clos aux coins excessivement arrondis. Comme si on les observait par le biais d’un œil de bœuf, ajoutant avec ce regard déformé un aspect formel singulièrement bizarre. Les mouvements de caméra suivent les personnages et le réalisateur évite au maximum les champs/contrechamps, ce qui nous immerge dans ce cirque royal d’une drôle de manière. Mais d’une manière qu’on adore. Le film pourrait être de mauvais goût mais il ne l’est jamais, son originalité nous draguant à la perfection sans jamais tomber dans l’excès. Dommage que la fin soit si abrupte et laissé à l’appréciation de chacun bien qu’elle soit lourde de sens. Mais c’est un peu la marque de fabrique du réalisateur grec. Dans tous les cas ce sont deux heures exquises à écouter comme à regarder, on ne voit pas le temps passer et c’est confectionné avec un soin maniaque. « La Favorite » est un morceau de cinéma d’orfèvre dont il serait dommage de se priver tant le plaisir est intense.

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4,5
Publiée le 2 février 2019
C’est une réussite totale. Un jeu de manipulation passionnant, une écriture scénaristique et des personnes très précis, un humour noir, des faux semblants, des trahisons, et un regard intelligent sur l’époque. La favorite est un chef d’œuvre incontestable. La bande originale est magnifique, et la technique imposante entre des plans serrés, des panoramas à 180 degrés très vifs, des caméras à grand angle, des plans incurvés, bombés, c’est splendide. Le rythme est endiablé et à part une légère baisse de régime sur le dernier quart c’est parfait.

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4,0
Publiée le 18 août 2019
"The Favourite" se déroule au début du 18ème siècle, à la cour de la Reine Anne d'Angleterre. Souveraine affaibli psychologiquement et physiquement, elle est contrôlée (et le royaume avec) par sa favorite, Sarah de Malborough. Jusqu'à l'arrivée d'une nouvelle servante, ancienne noble déchue, qui va redistribuer les cartes... Yorgos Lanthimos reprend ici le film d'époque, genre souvent très académique, pour mieux le dynamiter. Ainsi le réalisateur fait d'une part preuve d'une grande maîtrise technique et d'un véritable soin de l'image (décors et costumes somptueux, belle photographie, univers visuel que ne renierait pas "Barry Lyndon"). D'autre part, il apporte des éléments inhabituels pour le genre : de très nombreux grand angles pour souligner les bassesses des personnages et les coups tordus que cachent les pièces carrées et corridor rectilignes, un humour acerbe et cynique, des dialogues mordants, de grandes libertés (volontaires) avec la véracité historique, et une évocation sans concession de la condition féminine. Les femmes sont par ailleurs au centre de l'intrigue, avec ce trio amoureux entre une reine souffrante et larguée (étonnante Olivia Colman), et deux rivales aussi intelligentes, manipulatrices, et égoïstes l'une que l'autre (impeccables Rachel Weisz et Emma Stone, qui adopte l'accent british pour l'occasion) . Des protagonistes ambigües qui ne plairont pas à tous, mais qui permettent d'établir une histoire complexe et forte, qui dénonce des manigances politiques toujours d'actualité.
4,5
Publiée le 7 décembre 2019
Après les très âpres et crépusculaires, "The Lobster" et "The Killing of A Sacred Deer", Yorgos Lanthimos revient avec un film d'époque tout simplement unique.
Fort de plusieurs nominations et récompenses (Mostra de Venise Golden Globes et Oscars entre autre), "The Favourite" place son action en 1708 lors de la Guerre de la Succession d'Espagne, en plein conflit entre l'Angleterre et la France.

Écrit il y a 20 ans par Deborah Davis, le film nous conte l'histoire de la Reine Anne Morley (une Olivia Colman impériale qui livre tout simplement la meilleure performance de sa carrière) dans un triangle affectivo-toxique avec 2 femmes de cour :
d'un côté Abigail Masham, jeune domestique forte et ambitieuse tombée en disgrâce (interprétée par la superbe Emma Stone, qui manie l'accent british avec un flegme déconcertant), de l'autre la Duchesse Sarah Churchill (Rachel Weisz, également excellente), la confidente de la reine et femme de pouvoir autoritaire.

De ce canevas et cette "histoire à peu près vraie", s'ensuit un récit tout simplement jubilatoire et osé, entre Barry Lyndon, Liaisons Dangereuses, Phantom Thread et The Lobster.

Une histoire qui mêle le classique et l'absurde, pour un résultat détonnant.
Sous ses airs de biopic historique, le cinéaste grec apporte un ton résolument barré et méchant à l'ensemble à coups de jeux de pouvoir, manipulation affective et sexuelle, franchissement des diverses strates sociales, menaces toxiques...

Ce qui frappe d'entrée de jeu est également le soin formel tout particulier (voire expérimental), via une photographie de Robbie Ryan (Fish Tank, American Honey) composant de véritables tableaux classiques, ou la mise en scène de toute beauté, à coups de grands angles, de fish-eye et d'autres inspirations Kubrickiennes.
Les dialogues sont ciselés et les diverses saillies burlesques, alliés à un humour noir et ravageur confèrent à l'ensemble un charme indéniable, où le grotesque se mêle à l'anachronisme avec une aisance qui force au respect.

Ajoutons à cela une musique baroque et anxiogène, des décors et costumes fabuleux... c'est toute la fabrication du long-métrage qui est une prouesse. Mais au-delà de ça, "The Favourite" est surtout porté par un trio d'actrices fabuleux et inoubliable (les joutes verbales et jeux de dupes entre Stone et Weisz méritent à eux seuls le visionnage, ainsi que toutes les scènes où Olivia Colman interprète son personnage de manière délurée, malgré le caractère écorché de la Reine, en proie au chagrin et la maladie) où chaque sourire est une façade au sein d'un jeu de manipulation vénéneux et grandissant qui va de plus en plus loin.
Il existe un décalage savoureux entre la sobriété quasi austère voulue de l'époque et les diverses mœurs, notamment la condition de la femme. Et tel un pamphlet féministe, le film dresse un vrai portrait de femmes fortes, tirant les ficelles du pouvoir par des moyens détournés, souvent au dépens de la gente masculine (Joe Alwyn et Nicholas Hoult sont également de très bons atouts au casting).

En définitive, The Favourite est un film mordant, jouissif, brillant, unique.

Du grand cinéma donc
4,0
Publiée le 24 février 2019
La Favorite est une farce et, à ce titre, convertit la fièvre misanthropique de son réalisateur en frénésie grotesque parfois très drôle, toujours captivante. L’œuvre est boursouflée, ne respire guère : sa mise en scène chérit les cadrages insolites, jouant ainsi sur la notion de naturel, tout bonnement absente de l’époque ainsi dépeinte. Surtout, trois actrices principales assurent le spectacle, avec une mention spéciale pour Olivia Colman qui, après avoir interprété Elizabeth II dans la saison 3 de la série The Crown, campe une Anne d’Angleterre impériale, à la fragilité autant ridicule que bouleversante. L’emploi du fish-eye enferme ces femmes dans leur condition et dans la cour où se joue une rivalité à mort : car il est bien question ici d’assurer sa survie, de s’élever dans la hiérarchie, mouvement que le film traduite par deux symboles : d’une part la position couchée qui place la favorite et la reine sur le même plan, d’autre part l’agenouillement final qui vient briser les illusions de notre héroïne et rétablir son infériorité. Avec La Favorite, Yórgos Lánthimos livre certainement son film le plus abouti, et fait preuve d’une indépendance vis-à-vis de l’Histoire et du cinéma qui transporte l’âme.
4,5
Publiée le 5 avril 2020
Après les très déroutants The Lobster et la mise à mort du cerf sacré voici enfin un film de Yorgos Lanthimos qui m’emballe complètement. La favorite est un film magnifique: décors, costumes, lumières, cadre tout est esthétiquement remarquable. On voit constamment à l’écran un faste qui n’est qu’artifice et qui semble là pour masquer le vide terrible que ressent chaque personnage. Il parle de la déliquescence du pouvoir, les jeux d’influence, les intérêts privés qui finalement guident ceux qui prétendent défendre les intérêts collectifs. Mais surtout de l’amour, de l’amour dont a besoin chaque individu, et qui rend soit trop faibles ou trop durs ceux qui en on manqué. Le trio d actrice est extraordinaire, parmi elles Rachel Weisz trouve peut être ici le plus grand rôle de sa carrière. Un film admirable en tout point qui mérite d’être vite découvert.
4,0
Publiée le 9 février 2020
Pour celles et ceux qui ont vu The Lobster ou Mise à Mort du Cerf Sacré, un constat s'impose : cet homme-là, Yorgos Lanthimos, n'est pas là pour rigoler. Du moins, jusqu'à ce que La Favorite retourne un peu la table.
Partant sur les bases d'une histoire réelle (la rivalité entre deux femmes à la cour pour avoir les faveurs de la reine Anne, au début du XVIII ème siècle), Lánthimos délivre son film le plus accessible tout en conservant la bizarrerie qui caractérise son cinéma.
Extrêmement satirique, La Favorite tire à boulets rouge sur l'aristocratie et asperge l'âme humaine de son acide. Incroyablement décomplexé, le long-métrage mêle composition picturale blafarde et tonalité libidineuse. À grand renfort de grands-angles, la caméra cloisonne ses personnages dans une prison où seuls le stupre et l'égoïsme trouvent leur place.
Ajoutez-y l'imagerie macabre entourant le seul protagoniste un tant soit peu empathique (Anne) notamment avec les lapins, et vous obtenez une œuvre singulièrement réussie. Lánthimos est une véritable mine d'or pour quiconque a envie de se réinventer (cf. Colin Farrell).
Il frappe très fort en offrant à Rachel Weizs et Emma Stone des rôles à l'opposé de ce à quoi les comédiennes nous ont habitué. Lady Sarah et Abigail jouissent d'une vilénie jubilatoire et/ou écœurante (notamment dans son dernier acte); les actrices fracassent joyeusement la bienséance à coups de dialogues au vitriol et de remarques paillardes.
Mention également de Nicolas Hoult, assez hilarant en jeune comte odieux et dépravé.
Comme je le notai plus haut, Lánthimos n'aime rien tant que subvertir les attentes. Cela se manifeste ici non seulement par l'apparence de sa fable grivoise, mais également avec le personnage de la reine Anne d'Angleterre, finalement le plus appréciable. Olivia Colman (fantastique) ajoute une couche tragique à La Favorite, la monarque étant accablée par la perte, le manque et la solitude. Une figure complexe mais très émouvante, à laquelle Colman confère une terrassante humanité.
À mes yeux, il s'agit du meilleur film de son auteur à ce jour. Incroyablement direct et cruel, simultanément drôle et poignant, il fait l'état des lieux du pouvoir, cette zone de chasse permanente. Film d'époque et pourtant intemporel, La Favorite est une diatribe sans âge, sans fard sans retenue.
4,0
Publiée le 5 février 2019
Le réalisateur Yórgos Lánthimos, en alternant habilement l’humour et le drame noir avec des dialogues ciselés et colorés, donne à son récit un ton qui rappelle bien entendu le(s) monument(s) du genre, comme Les Liaisons dangereuses. La Favorite ne démérite pas sa présence aux Oscars et permet aux cinéphiles de commencer l’année en beauté, aux côtés d'Emme Stone, Olivia Coleman et Rachel Weisz avec des rôles écrits à la mesure de leur talent !
4,0
Publiée le 25 mars 2020
En temps normal, je n’aime pas du tout les films historiques, mais je dois avouer que celui-ci m’a vraiment plu. Cela partait pourtant d’un mauvais pied car j’ai eu beaucoup de mal à rentrer dedans. Je n’ai pas du tout accroché avec la réalisation de Yórgos Lánthimos. Il faut dire que je n’avais pas non plus apprécié celle de MISE À MORT DU CERF SACRÉ. La musique était très lourde. À certains moments, elle était limite pesante en appuyant de manière accentuée les actions. Je n’ai rien contre la musique classique mais là elle était étouffante. De plus, la manière de filmer avec pas mal de plan en caméra d’angle ne m’a pas ravi. Il y avait aussi des cadrages très dynamiques qui n’allaient pas forcément avec le rythme des scènes. Une fois que j’ai pris du recul sur cette mise en scène, je me suis mis à apprécier cette œuvre. L’histoire est passionnante. On a une vraie intrigue psychologique, avec tout un jeu de manipulation, qui se forme autour de la jeune Abigail. La trame est très bien faite et prenante. Pour moi c’est vraiment Emma Stone la star de ce film. Après le discret BATTLE OF THE SEXES, l’actrice oscarisée avec LA LA LAND revient sur le devant de la scène. Elle est très bien entourée par ses comparses Olivia Colman et Rachel Weisz. Les deux m’ont fait forte impression. Pour les hommes, on aura tout de même le gracieux Nicholas Hoult connu sous le maquillage du Fauve dans X-MEN. Ce beau casting m’a beaucoup aidé à m’investir dans ce récit aux bases historique. Sa nature nous permet bien évidemment d’avoir de superbes costumes et des décors grandioses, ce qui est toujours agréable à voir.
4,0
Publiée le 12 février 2019
Olivia Colman superbement entourée donne la pleine mesure de son talent
en incarnant la reine Anne malade de la goutte et dont les deux favorites
vont s'affronter de façon féroce pour éliminer son adversaire.
les décors costumes sont magnifiques.
le jeu d'actrices est sidérant et montre le ridicule de certaines situations.
par contre la musique est vraiment insupportable en grande partie malgré
quelques classiques mélodieux.
ce film ne repartira pas bredouille des oscars ça c'est sur.
4,0
Publiée le 13 février 2019
La Favorite, c'est d'abord un exercice de style de Yorgos Lanthimos (réalisateur d'un précédent The Lobster déjà bien barré) : on a l'impression que la caméra fait ce qu'elle veut, quand elle veut. Travellings jamais cachés mais au contraire exposés fièrement, filtre "œil de poisson" utilisé à l'excès, plans statiques sur des sujets immobiles qui n'en finissent pas et surimpression (la superposition de plusieurs images en une seule)... La liste des prises de risques esthétiques n'en termine jamais, jusqu'à un final des plus étranges (voire incompréhensible ?), La Favorite se regarde principalement pour ce traitement unique de l'image (et du son, cette musique lancinante infernale !). On adore ou on déteste, pour ma part je déteste, mais je reconnais son aspect ingénieux et audacieux. Olivia Colman est parfaite dans le rôle de cette reine Anne "gros bébé taré", Emma Stone en perfide courtisane est également convaincante, et Rachel Weisz forme une dernière pièce de ce trio diabolique qui fonctionne à merveilles. Nicholas Hoult, bien qu'en second rôle de courtisan, se fait remarquer agréablement, et la somptuosité des costumes nous ravit les yeux (il ne serait pas étonnant que le film gagne quelques récompenses pour ses costumes magnifiques). Je n'ai subjectivement rien compris à cette fin "invasion de lapins" (la folie dévastatrice qui augmente ? L'invasion du souvenir des enfants perdus comme indice qu'elle ne sera jamais heureuse ? Chimères qui représentent la fausseté des gens de la Cour qui l'entourent ? ...). En n'étant pas sensible à la forme, mais en lui reconnaissant une audace certaine, tout en contemplant les acteurs très bons et les costumes somptueux, La Favorite reste un drame toujours étonnant.
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