Moka est le second long-métrage du cinéaste suisse Frédéric Mermoud après Complices en 2010, déjà avec Emmanuelle Devos, qu'il a retrouvé pour la deuxième fois. Entre-temps, le réalisateur a mis en scène plusieurs épisodes de la série Les Revenants avant de revenir sur grand écran : "Depuis Complices, j’avais envie de retrouver Emmanuelle Devos qui occupe une place singulière et inspirante dans mon imaginaire. Je voulais vivre une nouvelle aventure de cinéma avec elle. Avec cette certitude qu’elle serait de tous les plans. Quand j’ai découvert Moka, le roman de Tatiana de Rosnay, je me suis dit que je tenais la bonne histoire pour mener à bien ce projet", confie le metteur en scène.
Le titre Moka est tout simplement évocateur de la Mercedes que possède Marlène (Nathalie Baye), la voiture au centre du récit.
Moka est l'adaptation du roman du même nom écrit par Tatiana de Rosnay et publié en 2006 : "Dans le travail d’adaptation, j’ai conservé l’esprit et l’univers du roman, mais je me suis très vite concentré sur une petite partie du livre, comme s’il s’agissait d’une nouvelle. Le scénario s’est donc affranchi du livre, et Tatiana de Rosnay a été très respectueuse de ces libertés prises", explique Frédéric Mermoud, qui a travaillé avec le scénariste Antonin Martin-Hilbert pour adapter le roman. À noter que la romancière a déjà vu deux de ses romans adaptés sur grand écran avec Elle s'appelait Sarah et Boomerang et deux autres de ses livres sont en tournage, Spirale et Le Voisin.
Frédéric Mermoud a très vite pensé à Nathalie Baye pour la confronter à sa muse, Emmanuelle Devos : "Nathalie Baye dans le rôle de Marlène s’est rapidement imposée comme une évidence. Je souhaitais que Moka soit basé sur la rencontre entre deux actrices et je voulais, face à Emmanuelle Devos, une présence aussi forte que la sienne. Il me fallait donc trouver une actrice à l’autorité naturelle, qui ait un vrai charisme et qui imprime l’esprit du spectateur", indique le cinéaste. À noter que c'est la première fois que les deux célèbres comédiennes se donnent la réplique.
Dans le roman Moka, l'action se déroule entre Paris et Biarritz ; Frédéric Mermoud a décidé de transposer l'histoire à la frontière franco-suisse, entre Lausanne et Evian : "Je trouvais intéressant de transposer cette confrontation entre deux femmes dans un décor mettant face à face deux villes de deux pays différents, Lausanne et Evian. Au milieu, le lac Léman apparait comme un cirque, une arène de western, à l’aspect très calme mais aux remous imprévisibles qui apportent de l’étrangeté et de l’inquiétude", relate le réalisateur.
Emmanuelle Devos a tenu un journal qui reconstituait le passé de son personnage, Diane : "Je l’ai rédigé avec beaucoup d’émotion. Ce n’est pas simple de s’imaginer dans la situation d’une femme qui a perdu
son enfant. J’ai ressenti le vertige de la souffrance mais aussi compris que sa solution pour ne pas sombrer était dans l’action, elle devait prendre les choses en main. Dans ces conditions, on ne peut pas être dans le déni ou se contenter d’attendre que la police fasse son travail. Le but de cette quête n’est finalement pas tant de trouver des coupables mais d’agir. Une fois sur le plateau, être avec elle dans l’action était donc plus facile, voire plus léger", confie la comédienne.
Frédéric Mermoud revendique l'influence de Roman Polanski et Alfred Hitchcock pour Moka. Il se dit également très inspiré par Keane de Lodge Kerrigan.
"Quand je me retrouvais avec Emmanuelle Devos, qui a été de tous les plans pendant les 35 jours
de tournag, je ne pouvais pas m’empêcher de penser à des comédiennes comme Gena Rowlands ou Faye Dunaway. Je lui ai d’ailleurs souvent dit que je voulais l’épuiser, traquer la moindre de ses pulsations et la filmer comme une actrice américaine. Et c’est fou comme Emmanuelle arrive à jouer chaque instant, même les plus ténus, avec une intensité rare", raconte Frédéric Mermoud.
Frédéric Mermoud a fait appel à Christian Garcia et Grégoire Hetzel pour composer la musique de Moka. Ils avaient déjà travaillé avec le cinéaste sur Complices : "La question était de trouver un style musical qui pourrait se faufiler entre le genre, l’enquête et l’intensité de la protagoniste. Le style électro s’est imposé assez rapidement et, pour le thème de Diane, je voulais une musique duelle, à la fois répétitive et poignante", explique le metteur en scène.
"Marlène, je l’ai tout de suite vue blonde, un peu pépète. Elle est commerçante – dans une parfumerie, qui plus est –, elle ne peut pas se laisser aller. Il faut qu’elle soit nickel, avec les ongles faits, les cheveux
coiffés, le maquillage impeccable, qu’elle ait la ligne et se maintienne bien."