Attention ! On est très loin du film romantique que le titre français (encore une fois très mal choisi) veut bien le laisser supposer. Les deux hommes ne sont pas amants. Desde allá est le premier film du vénézuelien Lorenzo Vigas Castes, et pour un coup d'essai, c'est un coup de maitre : Lion d'or au dernier festival de Venise. Sa mise en scène est d'une totale maitrise, minimaliste, sèche. Le scénario (qu'il a co-écrit avec Guillermo Arriaga, scénariste des premiers Innaritu), avec peu de dialogues, en tout cas rien de superflu, impose une ambiance tendue, un suspens presque haletant. Cela monte constamment en puissance. On ne sait jamais vraiment ce qui va se passer, qui manipule qui, ni comment cela va se terminer. Mal, on s'en doute, mais on ne sait pas pour lequel des deux personnages. Il n'y pas de musique, ce qui donne un film encore plus brut, dépourvu de tout artifice. La relation entre les deux hommes n'en est pas moins bien développée. Ils sont magnifiquement interprétés par l'expérimenté Alfredo Castro (Tony Manero, No, Santiago 73) et le débutant Luis Silva. L’alchimie fonctionne bien entre les deux, on y croit et on est happé de la première à la dernière minute. Même si l'histoire est différente, j'ai beaucoup pensé au Eastern boys de Robin Campillo. Pas de romance donc, pas d'histoire d'amour, mais une chronique plutôt sombre sur la solitude et sur la relation au père (et surtout sur son absence), sur fond de crise sociale. Une émotion sèche et brute. Un très beau film.