Petra Costa se rappelle comment elle a été amenée à collaborer avec Lea Glob sur ce projet : "La directrice du festival de Copenhague cherchait des réalisateurs originaires d’Amérique latine pour mettre en place des coproductions avec des cinéastes danois. C’est ainsi que j’ai rencontré Lea. On avait une semaine pour proposer un pitch. Lea est fidèle à la réalité, et moi qui viens du théâtre, je suis davantage tournée vers la fiction."
Lea Glob poursuit : "Notre rencontre a été initiée effectivement par le Docs Lab du festival de cinéma documentaire de Copenhague. Mon film de fin d’études parlait de mon père, un sujet tragique proche de l’essai intimiste de Petra. C’est pourquoi, on nous a mises en relation. Travailler avec Petra, qui est actrice, a été une expérience féconde. Tout comme travailler avec des acteurs capables de nous proposer différentes interprétations. Notre projet a gagné en profondeur et en complexité, devenant une réflexion sur le jeu et une double création : fabriquer un enfant et fabriquer un film."
La genèse du projet est à mettre en parallèle avec la volonté de Petra Costa de travailler avec des comédiens, elle-même venant du théâtre. C'est lors de la tournée du Théâtre du Soleil au Brésil qu'elle a fait la connaissance de deux acteurs de la compagnie, Serge Nicolaï et Olivia Corsini. Elle se rappelle : "Après avoir vu Elena (son précédent film), cette dernière a exprimé le souhait de travailler avec moi un jour. Plus tard, j’ai dit à Lea que je caressais l’idée de faire un film parlant d’une journée dans la vie d’une femme. Lea a proposé de mélanger, à cette occasion, documentaire et fiction. Mais Olivia Corsini venait de tomber enceinte et nous avons repensé notre projet, à l’aune de sa grossesse. Nos recherches ont montré que peu de films racontaient ce qui se passe dans la tête d’une femme enceinte."
La répartition des tâches s'est faite de la manière suivante entre Petra Costa et Lea Glob : tandis que la seconde filmait les scènes documentaires en accompagnant Olivia Corsini, sans la diriger ou presque, la première était plus interventionniste en provoquant le couple pour le faire sortir de sa zone de confort. Costa explique : "Il y a eu des moments où Lea tournait sans moi, avec l’aide d’un chef opérateur. Dans ce cas-là, elle faisait le son. J’avais moi aussi un chef opérateur attitré quand je filmais sans elle."
Tim Robbins est producteur exécutif sur Olmo et la Mouette. Le célèbre acteur et réalisateur américain avait beaucoup aimé le précédent film de Petra Costa Elena et, souhaitant le sortir au Etats-Unis, était devenu producteur exécutif dessus. "J’étais déjà en train de travailler sur Olmo et je lui en parlais beaucoup. Il se trouve qu’il a une compagnie de théâtre dont le fonctionnement s’inspire de celui du Théâtre du Soleil. D’ailleurs, il connaissait Serge Nicolaï et Olivia Corsini et c’est ainsi qu’il s’est investi sur ce nouveau projet", confie Petra Costa.
Lorsqu'on lui pose la question de définir Olmo et la Mouette, Lea Glob ne saurait dire s'il s'agit d'un film de fiction ou pas. Elle développe : "Dans ce cas particulier, cela importe peu, la frontière est poreuse. J’étais fascinée de voir à quel point ce couple de comédiens se connaît parfaitement dans le monde artificiel de la représentation. Serge est tombé amoureux d’Olivia sur scène. Petra partage cette fascination pour le jeu des acteurs. Tout dans ce film est circulaire : la réalité et les rôles qu’on interprète. La forme et le style du film se joue dans cette circularité. C’est aussi en quelque sorte un journal intime car nous avions donné à Olivia un dictaphone pour qu’elle enregistre ses pensées intimes pendant sa grossesse."
Olmo et la Mouette est plus qu'une référence à La Mouette de Tchekhov, il possède plusieurs thèmes communs avec la célèbre pièce de théâtre, comme le flirt avec la décadence, le sacrifice au nom de l’art, l’ennui ou encore le statut utopique de l’actrice. Petra Costa voit encore d'autres correspondances entre les deux oeuvres :
"Dans la pièce, le personnage de Nina désire être actrice, le devient, a un enfant et sombre dans la folie. Dans cette folie, elle fait preuve de sagesse. Elle dit qu’elle est heureuse car elle est sûre de vouloir être comédienne. Il y a là beaucoup de parallèles avec le personnage joué par Olivia Corsini. Le choix de La Mouette s’est justifié car on y parle de l’invisible mais aussi de la vocation artistique. On trouve encore le personnage d’Arkadina, une vieille actrice qui commence à tomber dans la décadence, après avoir eu beaucoup de succès par le passé. Devenir folle et vieillir sont deux peurs qui animent également Olivia."