Mélanie (Galatéa Bellugi) et Maxime (Kacey Mottet Klein) sont deux adolescents de 15 ans qui s'aiment d'amour tendre ou, plus exactement, qui apprennent à s'aimer : une des premières scènes du film l'indique habilement, aimer c'est aussi respecter l'autre, ne pas l'obliger à faire ce pour quoi il (ou elle en l'occurrence) n'éprouve que dégoût. A 15 ans, on a tout le temps qu'il faut pour découvrir ce que c'est que de s'aimer vraiment. En tout cas, on devrait avoir tout le temps nécessaire, mais pour les deux tourtereaux de ce film, les choses se compliquent de façon inattendue le jour où Mélanie découvre qu'elle est enceinte !
Deux adolescents de 15 ans confrontés à la naissance d'un enfant : on imagine aisément que cela ne va pas de soi. Ce n'est pas un âge pour être parents et pourtant il faut bien se prononcer et prendre des décisions. Les discussions sont d'autant plus vives que, on s'en doute, à cet âge-là, on est bien obligé un jour ou l'autre de tout révéler aux parents et d'entendre leur avis. Ceux de Maxime (bien que séparés) se rejoignent dans une position d'ouverture et d'accueil. C'est surtout le cas de la mère du garçon, le père étant habité aussi par d'autres préoccupations. Quant à la mère de Mélanie, elle se souvient trop d'avoir elle-même souffert d'avoir eu sa fille alors qu'elle était très jeune pour accepter que cette dernière subisse le même sort. Discussions, petits arrangements, peurs, hésitations, décisions : le film avance en prenant en compte tous les enjeux, toutes les difficultés, faisant naître et grandir chez le spectateur une empathie pour les deux personnages d'adolescents, joués par deux acteurs qui, en dépit de leur âge, font preuve d'un grand talent. Quand Mélanie, soutenue par Maxime, décide de tenir tête à sa mère qui voudrait la faire avorter et lui affirme qu'elle veut garder l'enfant, on en reste pantois d'admiration tant le jeu de l'actrice est fort et convaincant.
Pour Maxime, les décisions à prendre s'avèrent d'autant plus complexes que le cœur du garçon est divisé : s'il est habité d'un côté par son amour pour Mélanie, il l'est aussi d'un autre côté par sa passion pour le football. Belle idée que d'en avoir fait un gardien de but qui, guidé par son père, rêve de grimper les échelons de l'excellence. Le « keeper », le gardien, se trouve empêtré dans ses dilemmes. Que lui faut-il garder ? Garder un but, garder Mélanie, garder l'enfant... Peut-on tout garder sans rien perdre ? Ou faut-il faire des choix et, de ce fait, accepter des renoncements ? Et quels choix opérer quand on a affaire à une fille imprévisible comme Mélanie ?
En optant pour un sujet aussi délicat, aussi périlleux pour son premier film, le belge Guillaume Senez a pris tous les risques. Mais il a su parfaitement maîtriser sa mise en scène, choisir ses acteurs et les diriger et réussir un film qui échappe totalement à tous les écueils, et en particulier à celui du moralisme. Ce n'est certes pas de leçons de morale dont ont besoin les deux adolescents qui sont au cœur de ce long-métrage, mais d'écoute, d'accompagnement, de soutien et, peut-être, de miséricorde. Jamais le réalisateur n'invite à juger ses personnages, il veut simplement nous les faire aimer tels qu'ils sont, forts et fragiles en même temps. 8/10