C'est la scénariste Marie Vien, elle-même pensionnaire dans un couvent quand elle était jeune, qui a écrit la première version de cette histoire. Elle a ensuite fait appel à Léa Pool pour l’aider à structurer son scénario puis le réaliser. La cinéaste a particulièrement été intéressée par le projet pour pouvoir mettre en scène la musique au sein d'un univers féminin.
Léa Pool avait, en 1975 pour ses études, déménagé au Québec. Sur place, elle fut fascinée par la liberté qui y régnait mais apprit que six ans plus tôt, les choses étaient bien différentes puisqu'à ce moment la religion avait encore une emprise forte sur la population (qui souffrait d’une éducation très rigide). La cinéaste a été particulièrement interpelée par la rapidité de ce changement et s'est demandée pourquoi il n’a pas encore été traité de l’intérieur via le point de vue d'une petite communauté religieuse.
La scénariste Marie Vien avait une professeur de piano qu’elle aimait beaucoup et qui a été l’étincelle lui ayant donné envie d’écrire ce scénario.
Les religieuses du couvent dépeintes dans La Passion d'Augustine sont pour la plupart progressistes, comme soeur Augustine qui se bat pour les valeurs mêmes qui vont mener à la perte son école. Léa Pool explique ce choix : "On tombe trop souvent dans le cliché de la religieuse rigide et rétrograde. Beaucoup d’entre elles étaient au contraire des personnes d’exception, très libres et avant-gardistes. Au Québec, les plus grands hôpitaux, en particulier les hôpitaux pour enfants ont été fondés par des soeurs. Ainsi que les grandes écoles de musique. Elles étaient des bâtisseuses et ont apporté beaucoup de choses au niveau social et culturel. La plupart avaient des idées de gauche, des positions très affirmées face au monde, à la pauvreté. Souvent, elles entraient en religion car elles n’avaient pas envie de se marier, d’avoir des enfants, de se couler dans le moule de la femme au foyer."
Les extérieurs ont été tournés à Saint Jean sur Richelieu au Québec et les intérieurs dans le couvent des sœurs Ste-Anne, dont les six dernières soeurs partaient pour une maison de retraite appartenant à la congrégation le jour même où l'équipe de tournage y entrait.
Léa Pool a opté pour une mise en scène proche des actrices sans pour autant filmer en trop gros plans, la cinéaste ne voulant pas faire un film trop claustrophobe. "La nature était donc importante, il fallait maximiser sa présence, en faire un espace de liberté, une ouverture conquise peu à peu par ces soeurs. J’ai été beaucoup inspirée par le peintre Jean-Paul Lemieux pour les scènes de neige. Je voulais partir de l’hiver pour aller vers un dégel progressif, jusqu’à l’éclosion du printemps. Le film raconte aussi le dégel d’une société."
Au départ, Léa Pool a commencé par rencontrer des comédiennes qui savaient tout juste jouer au piano, mais elle s'est rapidement rendue compte qu'il allait être difficile et ennuyeux de "tricher" à l'écran en alternant avec des plans sur les mains d’une vraie pianiste. La réalisatrice a donc décidé de chercher ses comédiennes du côté des écoles de musique. Au final, aucune image n'a été doublée dans le film, même du côté des actrices professionnelles comme Céline Bonnier qui jouent réellement.
Léa Pool a l'habitude de mettre en scène des personnages féminins au caractère fort comme dans La Femme de l'hôtel (1984), Anne Trister (1986), Emporte-moi (1999) ou encore Rebelles (2001) où trois adolescentes s'éveillent à la sexualité. Comme La Passion d'Augustine en témoigne également, l’émancipation féminine est donc une thématique au coeur de la filmographie de la cinéaste : "C’est sûr que cela fait partie de mes préoccupations. Faire du cinéma quand tu es une femme est déjà un acte d’émancipation. En tout cas, c’était le cas il y a trente ans. Aujourd’hui, il y a plus de femmes. Et encore, pas tant que ça…"