En Egypte, le 3 juillet 2013, un coup d’état militaire a renversé le gouvernement de Mohamed Morsi et des Frères musulmans. Et alors, comme il est annoncé au début du film, « Les jours suivants, Frères musulmans et partisans de l’armée s’affrontent dans toute l’Egypte ». C’est durant cette période particulièrement agitée que se déroule "Clash", film choisi pour faire l’ouverture de la sélection Un Certain Regard à Cannes 2016. Toute l’action du film se déroule dans un fourgon dans lequel la police va entasser dans des conditions indignes des manifestants venant des deux camps ennemis. Même si le film permet de voir tout ce qui se passe autour du fourgon, ce choix générait une difficulté : arriver à ce que, dans ce quasi huis-clos, l’intérêt du spectateur reste éveillé durant toute sa durée. Pari réussi : il se passe toujours quelque chose. Par contre, ce choix présentait l’avantage, en mettant en quelque sorte les spectateurs aux côtés des prisonniers, de leur permettre d’être confrontés aux discours des deux camps, à la façon dont ils se perçoivent les uns les autres.
Avec beaucoup d’habileté, Mohamed Diab fait le tour, sans aucun didactisme, de tous les comportements et de toutes les situations qu’un tel contexte peut engendrer. Cela va de l’antagonisme le plus dur et le plus physique entre rivaux politiques à une forme de rapprochement et même de coopération lorsque la fatigue a fait son effet et, a contrario, des querelles intestines et des problèmes de hiérarchie apparaissent au sein de tous les camps, partisans de l’armée, Frères musulmans et même au sein de la police. Les événements plus triviaux générés par Dame nature et que la promiscuité empêche de réaliser facilement ne sont même pas oubliés, tout en étant traités avec délicatesse. On peut entendre aussi une phrase très « trumpienne » lancée par un des prisonniers à un journaliste américano-égyptien qui, en fait, a été le premier à être jeté dans le fourgon par la police : « Un journaliste, ça ment et ça trahit ! ». Un peu plus tard, une forme de réponse sera donnée : « Je suis là pour couvrir l’info, pas pour la faire ».