Ip Man 3 (2015
Un propriétaire terrien véreux souhaite s'accaparer d’une partie de la ville. La police n'étant pas efficace, Ip Man décide de défendre l'école du quartier des bandits.
Le film se situe dans la continuité des deux premiers, avec une intrigue simple basée sur un vilain, agressif, se plaçant en opposition avec Ip Man, représentant de la tranquillité et de la paix. Ip Man sera forcé de prendre les choses en main, étant le seul capable de défendre les valeurs de la communauté. Cela nous permettra par la même occasion d'avoir quelques moment d'humour et d'agréables combats, toujours dans la ligné des deux premiers films. Par contre, la seconde partie du film entreprends un tournant. C’est quelque peu déstabilisant, mais est au finale totalement justifié et est une décision sensée et judicieuse dans l’intérêt du développement du personnage. Alors que jusqu'à présent, il s'agissait d'une suite utilisant les mêmes outils, cette seconde moitié du film change le but et le besoin du personnage de Ip Man, lui conférant beaucoup plus de profondeur, d'humanité et nous révèle soudain ses valeurs intimes, celles par lesquelles il vit et puise sa force. L'intrigue acquière une touche plus personnelle tandis que le film gagne en forme, en profondeur, allant chercher différentes émotions auprès du spectateur et faisant appel à aux sentiments.
Le premier film développait le personnage et sa place dans la société, le second était la reconnaissance de son art, de sa passion. Celui-ci a pris le choix, logique de se focaliser sur la touche personnelle, avec un travail d'introspection.
L'histoire est composée de trois intrigues principales qui se développent en parallèle, ce qui est intéressant car chacune d'elles se construit progressivement et est en complémentarité. Malheureusement, une de ces trois intrigues se conclut trop tôt, laissant la situation sur une petite note incomplète. Cette remarque vaut pour quelques-unes des autres sous-intrigues, par exemple,
j'aurai souhaité connaître d'avantage sur l'école, son directeur et Miss Wong, sur la police et sa gestion colonialiste désintéressée sur le peuple locale, ou la corruption sous-jacente de l'époque. Ou encore ce côté généralement peu sérieux (limite amateur) qui se dégage des scènes.
Pour incarner Ip Man, Donnie Yen reprend le rôle éponyme. Alors que le personnage a généralement été dépeint dans cette série comme étant généralement stoïque et amical, un choix artistique assumé, cela nous empêchait par moment de ressentir un réel attachement, de connaître les sentiments inaperçus. Durant la première partie du film, Ip Man est le même, comme dit plus haut, que dans les deux premiers films, mais dès la seconde partie, c'est une nouvelle facette que nous découvrons et Donnie Yen a l'occasion cette fois-ci d'approfondir le coté plus humain de son personnage lorsqu'il est confronté à ses passions, son art martial et sa femme, tandis que ses valeurs les plus profondes sont mises à mal. Cela se voit par exemple dans la scène où
sa femme lui demande de s’entraîner sur le mannequin en bois, ou lorsqu'elle lui demande de faire des portraits photo.
Cheung Wing-Sing, joué par Lynn Hung, avait jusqu’à présent le rôle de fleur vivante, gentillette et sans profondeur, servant simplement de support à Ip Man. Mais cette fois-ci, la relation qu'elle a avec son mari est un enjeu majeur, liant le cœur et l'âme, répondant à la fois aux peurs et au bonheur du héros.
Mike Tyson a une présence redoutable, mais son jeu est amateur. Par contre ses coups sont rapides et j’éprouvais de la crainte et de la compassion pour Ip Man, qu'il ne se prenne une droite meurtrière.
Jin Zhang est doué et son personnage, foncièrement bon, est confronté à l'injustice et nous le voyons douter et être confronté à des choix compliqués.
Quant à son combat contre Ip Man, il m'a pris aux tripes, car c'est avant tout le combat le plus important du film, mais que l'échange de coup de couteaux était magnifiquement chorégraphié et que la peur induite était prenante.
La direction va dans le même sens. Nous avons toujours de magnifiques combats, chorégraphié de mains de maître par l’indétrônable Yuen Woo Ping (bien que, et c'est un minuscule détail, j'ai reconnu des enchaînements qui sont réutilisés de films antérieurs), avec une difficulté et un sensationnalisme croissant. Cela commence par des petites bagarres de rue, les mêlées jubilatoires et insensées, mais cela croit vers le combat contre Frank, puis le combat final et personnel.
Accompagnant le tout, des prises de vues consciente de l'action (et non ce qu'on voit à Hollywood, où la caméra pan en retard sur les coups), avec un travail de cadrage et des scènes artistiquement agréable à suivre, un montage de qualité, calculant le rythme, l’enchaînement des coups et l'emplacement des personnages (un vrai travail de monteur), et des plans plus rapprochés, mettant en avant les émotions des personnages, leur ressentit et leurs craintes.
La musique était entraînante, mettant en valeur les combats et les scènes dramatiques, mais j'avais l'impression devant le grand écran de cinéma que les bruitages étaient exagérés.
J'ai vu un film aux combats impressionnants, qui m'a amusé, qui m'a également ému et que j’ai apprécié.
8/10