Si j'étais déçu de n'avoir pas pu voir ce documentaire à sa sortie, je suis aussi un peu déçu par le film en lui-même. Je suis déçu car je trouve ça finalement peu cinématographique, je ne dis pas que ce n'est pas bien, mais ça reste une série d'extraits que commente Tavernier en retraçant sur parcours de cinéphile. Ces extraits sont accompagnés de tout un tas d'anecdotes, d'explications où l'on voit Tavernier (ou plutôt où l'on l'imagine) passer d'un cinéma à l'autre, d'un metteur en scène à l'autre et se faire finalement son petit nid dans le milieu.
Sauf que 3h15 c'est long pour ça, c'est exactement ce que j'aurais pu imaginer comme format de série pour Arte, un truc qui passe tous les soirs après le journal et avant le film et qui se suit... Et l'autre bémol serait que je trouve les extraits plus intéressants que ce qu'il raconte dessus. Donc là il m'a donné envie de voir plein de films que je connaissais de nom, notamment certains Becker, Melville, Sautet, des films qui m'étaient inconnus comme ceux avec Eddie Constantine ou encore de revoir des films que j'ai déjà vu, notamment La grande illusion.
Évidemment le film fourmille de petites anecdotes sympathiques, mais la sauce ne prend pas tout à fait, parce que oui, j'aime apprendre des choses sur le comportement d'untel ou d'untel, de savoir que Prévert est allé cherché Kosma pour mettre en musique une chanson qu'il a écrite pour un film de Renoir, mais finalement ça ne dépasse jamais vraiment la petite anecdote sympa... et 3h15 avec juste ça, encore une fois je trouve ça long.
Alors oui, heureusement on a Tavernier qui explique ce qu'il aime chez tel ou tel réalisateur, il donne envie de voir plus de films de Becker, même si je ne suis pas tout à fait d'accord avec ce qu'il raconte sur l'intrigue d'Antoine et Antoinette qui pour moi plombe un peu le film, il a l’œil pour sortir ce qu'il faut retenir d'une séquence, d'une façon de mettre en scène... Et forcément ça marche mieux lorsqu'on a la scène devant soit pendant qu'il l'explique, on s'épargne pas mal de descriptions, ce qui permet au film d'être assez dynamique.
Mais ce qui me pose finalement le plus problème, c'est que le film s'ouvre sur une citation de Godard, allant donc plus chercher la filiation avec Histoire(s) du cinéma qu'avec Scorsese qui si je ne m'abuse a aussi fait un film où il explore le cinéma de son pays. Sauf que Godard faisait quelque chose de ses extraits qui est déjà un peu plus innovant sur la forme et moins classique, mais qui était peut-être moins centré autour de lui, de sa vie, mais plus sur ses réflexions. Paradoxalement le film de Godard était divisé en plein de parties toutes autour d'un thème et pouvait donc être vu en plusieurs fois, mais était plus cinématographique, moins planplan en somme, que le film de Tavernier qui est à bouffer d'un coup (bon il annonce à la fin un second volet, on a évité le film de 6h).
J'en attendais donc plus de la part de Tavernier, qui livre un film personnel, loin d'être mauvais, qui donne envie de voir des films où l'on apprend quelques petites choses, mais qui malheureusement manque un peu de substance, je reste sur ma faim, ça me semble léger et il faut bien le dire, un peu lisse.
Reste que pendant le film j'étais entrain de me dire "ah il faut que je voie ça... et ça... et ça... ah et ça aussi", donc c'est déjà ça de pris.