Film de guerre & drame réaliste scandinave : deux genres dont je suis loin d’être fan, & leur mélange dans Krigen a failli être à la hauteur de ce que sa première partie me faisait attendre de mal. Ce sont même les deux premiers tiers qui m’ont vraiment déplu. Les réalistes auraient voulu plus que ces deux tiers, histoire de nous faire sentir un peu mieux que la guerre, ce n’est pas un sujet qu’on couvre en deux scènes franches.
Dans une parcelle danoise de la guerre afghane, on nous fait voir des soldats mais surtout des hommes – un motto lassant que Lindholm tient à nous faire subir en nous écrasant sous le drame égal de la mort violente & d’une famille déchirée parce que le père est loin. Un écrasement, c’est bien le mot pour qualifier la pression nauséeuse qu’on nous inflige longtemps, comme si la guerre & l’absence d’un père étaient les deux seules souffrances possibles, & qu’on se conseille de mettre sur le compte d’une réalité généralement déformée d’une famille dont le pater – ce barbu nordique de Pilou Asbæk qui ressemble à Ewan McGregor – est parti belligérer.
Mais le fait est que le film s’y prend mal : subjectivement déplaisant (c’est exprès, on est d’accord), il est objectivement forcé dans des scènes intimes trop naturelles pour être vraies, littéralement corrompues par la recherche d’une vérité, sans compter des doutes que j’émettrais sur le confort du tournage pour certains acteurs enfants. Admettons que ça ne soit pas mon problème, voire que ça soit un témoin de qualité.
Quand on comprend, sur le tard, que tout cela n’est que le prétexte à introduire un jugement mixte dans le scénario (comprendre : un jugement civilo-militaire pour déterminer la responsabilité de McGregor dans la mort de 11 civils), on ne regarde pas nécessairement en arrière avec un air de s’excuser, mais on sent que le film se réservait pour être bon dans cette partie-là, une partie qui prend le mot de ”guerre” & le déplace d’un sujet sur l’autre : la guerre d’Afghanistan commanditée par plus grand que soi devient une guerre intestine où l’on se bat contre la justice pour son espoir égoïste, puis une guerre intérieure quand plus personne ne peut servir de cible à ses états d’âme & que la culpabilité (justifiée ou non) prend le dessus.
Il faut au moins connaître Krigen pour ces différentes parties & pouvoir juger l’une avec l’autre. Un peu sobre aussi bien du côté guerrier que judiciaire, il reste relativement impressionnant sur les deux aspects en plus que du côté familial.
Si je tranche en sa défaveur, c’est parce que, pour moi, il a renié l’ensemble de son combat en une phrase : quand le fils du soldat inculpé demande à son père si c’est vrai qu’il a tué des enfants. Guerre, famille, justice, réalisme : tout est trahi parce que le montage dispense le père de répondre. Trop sobre encore, A War passe à côté d’une guerre bien plus étrange dont elle aurait pu faire le nœud de son histoire.
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