Elephant Song, le premier film anglophone de Charles Binamé, est d’un académisme désuet, mais son trio d’acteur principaux vaut le détour. ♥♥♥
Au cours des derniers années, depuis Le Piège Américain sorti en 2008, M. Binamé a mené une carrière anglophone, tournant plusieurs épisodes de diverses séries-télé et quelques téléfilms. Elephant Song est son retour sur le grand écran et pour la première fois dans la langue de Shakespeare. A mes yeux, Binamé n’a jamais été un grand réalisateur; ces films sont, la plus part du temps, assez ennuyeux au niveau la mise en scène et de la direction photo. Elephant Song ne déroge pas à cette règle. Binamé fait du Binamé, mais en anglais. La mise en scène est peu inventive, son image (avec filtre pour faire «vintage») est d’une mièvrerie constante.
S’il faut rendre à césar ce qui est à César, Binamé est un grand directeur d’acteur. Chacun de ses longs métrages est indissociable d’une remarquable performance d’acteur : Lucie Laurier dans C’était le 12 du 12, Pascale Bussière dans Eldorado, Pascale Montpetit dans Le Cœur au point, Pierre Lebeau dans Séraphin, Roy Dupuis dans Maurice Richard et Rémi Girard dans Le Piège Américain. Et à cette liste, nous pouvons ajouter l’entièreté du trio d’acteur d’Elephant Song, Bruce Greenwood, toujours excellent, Catherine Keener et la surprise du film, Xavier Dolan, qui se révèle être un formidable comédien.
Le film est adapté de la pièce de Nicolas Billon par l’auteur lui-même, Binamé réussit mal à faire oublier l’origine théâtrale de son matériel de base. Nous suivons le Dr Toby Green (Bruce Greenwood) qui cherche à élucider le mystère entourant la disparition de son collègue, le Dr Lawrence. Son principal témoin est Michael (Xavier Dolan), un patient de l’hôpital psychiatrique où il travaille. Michael est un enfant «dérangé» qui vécut avec sa mère suicidaire et son père chasseur d’éléphant. Les troubles de Michael ont pour point d’origine le safari à lequel son père l’a convié enfant, voir son père tuer un éléphant fut un événement traumatisant pour le jeune Michael, depuis la ligne entre le bien et le mal et la vie et la mort est plus que flou, lorsqu’il voit sa mère se suicider, il la regarde mourir froidement.
Michael amène le Dr Green sur différentes pistes: parfois fausses, parfois vraies. Pour lui, tout cela ne semble qu’un jeu. Dolan réussit à nous exposer le coté maladif du personnage, toujours en finesse et sans jamais tomber dans l’excès. Face à lui, Greenwood est en tout point formidable, à la fois empathique et contrarié; cet habitué des secondes places trouve ici l’un de ces plus beau premier rôle. Gravitent autour d’eux l’infirmière en charge de Michael et ex-femme de Dr Green, interprétée par la talentueuse Catherine Keener.