Lion est sorti alors que j'étais loin des salles obscures. Je ne voyais pas le film de Garth Davis comme une priorité à rattraper d'urgence. Et puis, tout le monde m'en a dit du bien! Ma petite fille a pleuré tout le temps (faisons la part de l'exagération de l'adolescence....
Une incroyable histoire vraie : Saroo (le merveilleux petit Sunny Pawar, au sourire irrésistiblel!) vit avec son frère Guddu, sa soeur et leur maman, Kamla (Priyanka Bose), dans un hameau misérable au fin fond de l'Inde. Elle travaille comme manoeuvre, charriant de lourdes pierres. Guddu trouve des petits boulots de nuit, emmène son petit frère pour faucher du charbon sur des trains de marchandise.... Et puis une nuit, dans une gare, les deux frères sont séparés. Saroo monte dans un train à l'arrêt, qui ne prend pas de voyageurs mais qui, soudainement, démarre. Au bout de 24 heures, il se retrouve à Calcutta, petit bonhomme perdu dans une ville immense, terrifiante, personne ne s'occupe de lui -une indifférence monstrueuse- ils sont chassés comme des chiens des sous sol de la gare par les vigiles, hordes sales d'enfants abandonnés; il se réfugie près d'autres sans abri, fouille dans les ordures.... En plus il ne parle pas le bengali.... Qui pourrait répondre à ses questions? Il ne connait que le nom de son village -en phonétique. Quelle vision d'une société dure, indifférente, où la misère est partout -mais comme invisible. Non, ce n'est pas vraiment un document touristique..... Saroo est finalement recueilli dans un orphelinat, qui ressemble plus à un zoo.... puis il est adopté par un couple d’Australiens.
Un couple admirable, interprété par Nicole Kidman et David Wenman. Ils ne sont pas infertiles, mais ils pensent que leur devoir, leur éthique, c'est, plutôt que d'avoir des enfants, de recueillir des petites victimes de la vie. Ils vont d'ailleurs adopter un second petit garçon, Mantosh, avec qui ça se passe beaucoup moins bien. Mais Saroo, lui, a adopté ces nouveaux parents, si tendres. Ils vivent dans une belle maison de Tasmanie,jusqu'à ce que Saroo (Dev Patel) retourne à Melbourne terminer ses études.
Il rencontre des Indiens, parmi les étudiants, qui se moquent gentiment de lui parce qu'il ne sait pas manger sans fourchette.... Et tout à coup, un flash, devant des beignets de poivron dont il rêvait dans son enfance.... et qui étaient inaccessibles. Et pour la première fois, il parle, non, il n'a pas été adopté à Calcutta, il vient d'ailleurs, il ne sait d'où.... Et pourquoi pas, compte tenu du temps passé dans le train, calculer la distance de Calcutta et grâce à Google Earth, explorer ce large cercle où on doit retrouver le village?
Et c'est là que je diverge des inconditionnels de Lion: toute la seconde partie du film regorge de facilités dont le réalisateur aurait pu se passer. Il abuse de flash backs où Saroo se revoit, revoit des épisodes de son enfance, revoit son frère, la gare où ils se sont perdus... Le jeune homme est obsédé par sa recherche, il laisse tomber son boulot, néglige ses parents alors même que sa mère ne va pas bien, rompt avec sa fiancée (Rooney Mara). Il vit en reclus, ne se coupe plus les cheveux, ressemble à un vieux baba cradingue.... Tout cela est commercial et alourdit le film qui n'en a pas besoin pour être émouvant.
Qui n'en reste pas moins un beau film, touchant, et dont la fin est magnifique: ce sont des vidéos d'archive de ceux, des vraisgens, dont le vrai Sadoo a raconté l'histoire: vidéos du moment où les Australiens rencontrent la mère indienne retrouvée (on comprend enfin pourquoi Nicole Kidman arbore une permanente carotte...), où ils s'étreignent, tous parents de coeur... une belle feel good story! Kamla sait que son fils est devenu un véritable Australien; mais elle est heureuse parce qu'elle a toujours attendu le retour de ce film et qu'enfin, elle sait qu'il est vivant...